Synthèse de Saïd B. En Août dernier, lorsque le nouveau sélectionneur des Verts, Djamel Belmadi avait déclaré qu' " on ambitionne d'aller chercher cette première Coupe d'Afrique à l'extérieur de notre pays après celle remportée à Alger en 1990 ", personne ne croyait en cette finalité. A ce moment-là, c'était bien compréhensible, parce que la sélection algérienne était disloquée avec une division en clans au sein du groupe. Aucune concurrence entre les joueurs, puisque les " cadres " étaient toujours assurés d'être " titulaires ". Mais, durant les matchs, les joueurs avaient l'impression de jouer beaucoup plus " individuellement " que collectivement. C'était un jeu particulièrement brouillon des Verts qui n'inspirait la confiance d'aucun fan. Et c'est dans ces " conditions-là " que Djamel Belmadi annonçait alors qu'il vise le trophée de la Can avec ces " mêmes joueurs " à quelques éléments près.
Des critiques à la reconnaissance de Belmadi Et justement, Belmadi a subi beaucoup de critiques dès qu'il a annoncé la liste des 23 pour la CAN : on lui reprochait, entre autres, d'avoir convoqué Guedioura, Belamri et Slimani. Et lui, à chaque intervention médiatique, il adressait des messages cryptés en direction, surtout, de ceux qui ne croyaient pas en lui. Il ne cessait de dire que la meilleure réponse sera donnée sur le terrain, réussissant ensuite à joindre l'acte à la parole. Belmadi a réussi d'abord à mettre dans la " tête " des joueurs cette " ambition " et surtout cette " possibilité d'arracher la Can en terre égyptienne ". Il a métamorphosé le groupe, responsabilisé certains cadres dont Guedioura, Mahrez et autres, Brahimi et Feghouli. Engagé par la Fédération algérienne de football (FAF) pour relancer une équipe nationale aux abois, Djamel Belmadi a réussi là où ses prédécesseurs ont échoué : redorer le blason des "Verts", vainqueurs vendredi avec brio de la CAN-2019 en Egypte aux dépens du Sénégal (1-0). Pourtant, personne ne s'attendait à un tel exploit, d'abord d'atteindre la finale puis soulever le trophée tant convoité, 29 ans après l'unique sacre remporté par l'Algérie à domicile en 1990. La traversée du désert a été longue, très longue même pour les "Verts" qui se sont souvent heurtés à la réalité du terrain en Afrique subsaharienne, jusqu'à cette quatrième place décrochée en Angola en 2010, dans ce qui avait été le meilleur résultat depuis le trophée de 1990. Les coéquipiers du capitaine Riyad Mahrez ont déjoué tous les pronostics, imposant le respect en Egypte jusqu'à porter le "costume" de favori N.1 après l'élimination sans gloire du pays organisateur, du Cameroun, champion sortant et du Maroc. Pour beaucoup, Belmadi, déjà vainqueur de la Coupe du Golfe et de la Coupe de l'Asie de l'Ouest avec le Qatar, est le véritable artisan de cette "révolution" en marche, grâce à une méthode efficace qui a permis aux joueurs non seulement de se libérer sur le plan psychologique, mais aussi de retrouver un jeu "à l'Algérienne", chatoyant, avec une "grinta" et une détermination à toute preuve.
Promesse tenue Le 1e juin dernier, Belmadi, sûr de lui, avait clairement affiché son ambition de remporter le trophée, au cours d'une conférence de presse tenue au Centre technique national de Sidi-Moussa (Alger), à quelques jours du départ des "Verts" pour Doha (Qatar), en vue du stage précompétitif. "Ce rendez-vous ne constitue nullement pour moi une étape transitoire.Personne ne nous interdit d'être ambitieux dans la vie. Il fallait bien changer de discours avec les joueurs et ne pas se contenter de dire qu'il fallait réaliser un bon parcours. Nous avons l'ambition de remporter cette CAN. Je devais changer de discours, ce qui constitue une stratégie, c'est ma manière de fonctionner. En revanche, je ne garantis rien, je ne veux pas entendre les gens dire que j'ai échoué dans le cas où on ne remporte par cette Coupe. Nous allons tout faire pour réaliser cet objectif. Je pense que nous avons le droit de viser le plus haut possible, c'est légitime", avait-il déclaré aux médias. Certains observateurs n'avaient pas hésité à évoquer un objectif "démesuré", eu égard à la présence de l'Egypte, qui jouait devant son public, du Cameroun, du Maroc, ou encore du Nigeria, considérés comme des favoris en puissance Mais le temps a fini par donner raison à Belmadi, élu meilleur entraîneur de la phase de poules, qui a non seulement tenu sa promesse, mais également permis à cette nouvelle génération de rééditer l'exploit de son aînée par la plus belle des manières. Jeu rapide, passes courtes, solidarité collective. L'équipe nationale de football a retrouvé ses vertus sous la conduite de Belmadi, dont le mérite est d'avoir redonné une âme aux "Verts". La méthode Belmadi n'a pas tardé à porter ses fruits. Onze mois après son arrivée à la tête de la sélection, il a pu cerner le malaise pour entamer ensuite un véritable chantier. Le plus urgent était de redonner une identité de jeu à la sélection, ce qui est chose faite. S'imposer face au Sénégal (deux fois), à la Côte d'Ivoire et au Nigeria dans un seul tournoi relevait d'un miracle il n'y a pas si longtemps. L'équipe nationale a franchi un palier avec Belmadi, même si elle l'avait fait auparavant en 2014 sous la houlette de Vahid Halilhodzic, avec cette place de huitième-de-finaliste au Mondial brésilien, mais sans pour autant parvenir à préserver la dynamique par la suite. L'équipe nationale, cuvée Belmadi, doit confirmer cette embellie dès les prochaines échéances, dans ce qui sera la prochaine mission des "Verts", appelés à éviter les erreurs du passé pour maintenir le cap et s'imposer définitivement dans le gotha du football africain.
Le parcours sans faute des Verts Et au fil des matchs depuis le premier contre le Kenya gagné (2-0), les Verts commençaient à avoir de la confiance. Certains fans sont alors réticents. Puis vient ce match d'importance, mais pas décisif contre le Sénégal. C'était un match pour " une référence " et un véritable test pour Belmadi et ses joueurs. Et la victoire finale avec l'art et la manière même si c'est par la plus petite des marges (1-0). Cette victoire a mis les Algériens dans la trajectoire du " rêve " d'une deuxième étoile continentale après celle de 1990 acquise en Algérie. Le match contre la Tanzanie, le dernier de la poule a été disputé par une sélection " bis " et gagné (3-0). En huitièmes de finale, les Verts ont eu quelques difficultés à gagner contre une coriace équipe de la Guinée 3-0, puis en quarts de finale la Côte d'Ivoire 1-1 a.p. (Algérie aux t.a.b 4-3). Et c'est à partir de ce match véritable " coup sentimental " que les fans des Verts ont crû en cette sélection pour le sacre final. En demi-finale, Belmadi et ses joueurs ont éliminé la dangereuse sélection nigériane 2-1 pour retrouver, une fois de plus, au Caire, le Sénégal, mais cette fois-ci pour la finale dans cette même CAN 2019. Ainsi et 29 ans après son premier titre à domicile, l'Algérie a conquis sa deuxième Coupe d'Afrique des nations (CAN) en battant le Sénégal en finale (1-0). Un but de Baghdad Bounedjah a permis aux Fennecs de s'emparer de la coupe en Egypte. " Félicitations Algérie ", pouvait-on lire sur les panneaux du Stade international du Caire. Arrivés sur la pointe des pieds, les Verts ont le trophée en main, après une épopée fantastique Rafik Halliche raconte que " J'ai vécu la Coupe du Monde en 2010, un huitième de finale au Brésil en 2014, et cette victoire ce soir au Caire. Je ne pouvais pas espérer mieux ", avant d'ajouter, tout sourire que " Maintenant je peux désormais prendre ma retraite internationale en toute quiétude. Les Fennecs et Halliche ont largement fêté leur victoire et communié avec les milliers de spectateurs présents dans l'enceinte du Caire. Et hier, au moment où on mettait sous presse, Mahrez et ses compatriotes ont pris place sur un bus royal pour faire la tournée des champions à travers les artères de la capitale. Une vraie communion entre ces joueurs et leur staff et leurs fans dont la jeunesse augure une " nouvelle Algérie ". L'avion de la compagnie Air Algérie qui transportait les coéquipiers de Baghdad Bounedjah, s'est posé vers 14h00 sur le tarmac de l'aéroport international Houari-Boumediene. Le capitaine Mahrez, trophée à la main, le président de la FAF Kheïreddine Zetchi et le sélectionneur national Djamel Belmadi étaient les premiers à descendre de l'avion. La délégation algérienne a été accueillie à son arrivée par Noureddine Bedoui, Premier ministre et Salim Raouf Bernaoui, ministre de la Jeunesse et des Sports, ainsi que des membres du gouvernement. Il est utile de noter que les champions africains ont été accueillis par le chef de l'Etat M. Bensalah, au palais du Peuple, où une cérémonie en leur honneur a été organisée. Malgré la chaleur, les Algériens ont envahi les rues d'Alger, hier pour exprimer leurs joies et leurs gratitudes à leurs héros, qui ont sillonné les rues de la capitale après leur arrivée du Caire. Une ambiance qui n'a pas manqué de raviver les souvenirs forts agréables des triomphes et autres épopées sportives algériennes.