L'audience que devait accorder, hier, Abdelaziz Bouteflika au prince héritier d'Arabie Saoudite, Mohamed Ben Salmane, qui effectuait une visite officielle de deux jours en Algérie, a finalement été annulée, le jour même, et ce, pour raison de maladie. C'est en tout cas ce qu'expliquait la présidence de la République dans un communiqué officiel diffusé via l'agence APS en début d'après-midi. Kamel Amarni - Alger (Le Soir) - Le communiqué en question est très court. Il y est annoncé, tout simplement, que «alité du fait d'une grippe aiguë, Son Excellence Monsieur le Président de la République, Abdelaziz Bouteflika, n'a pu recevoir comme prévu le prince héritier d'Arabie Saoudite, Son Excellence Mohamed Ben Salmane, en visite de travail en Algérie». Aussi, y est-il ajouté : «Devant cet empêchement, l'illustre invité a formulé ses meilleurs veux de prompt rétablissement pour le chef de l'Etat.» Pour rappel, le prince héritier Mohamed Ben Salmane, l'homme fort du royaume et qui détient la réalité du pouvoir dans son pays, est venu en Algérie, en visite officielle, à la tête d'une délégation de très haut niveau. D'où l'importance de cette audience, notamment, à quelques jours seulement d'une réunion décisive des pays membres de l'Opep et dont on connaît le poids de l'Arabie Saoudite, le seul pays dans le monde qui peut faire basculer les prix du pétrole, dans un sens ou dans un autre. Pour autant, cette annulation n'est pas une première du genre. En effet, le 20 février 2017, c'était carrément la visite d'Etat que devait effectuer la chancelière allemande, Angela Merkel en Algérie qui avait été, elle aussi, annulée la matinée même, avant que Merkel ne décolle de Berlin. Un communiqué de la présidence de la République évoquait, ce jour-là encore, quasiment le même motif : «Indisponibilité du Président Abdelaziz Bouteflika en raison d'une bronchite aiguë.» La visite de Merkel avait fini toutefois par être reprogrammée et effectuée en septembre dernier. Ceci étant, l'annulation de l'audience d'hier ne pouvait mal tomber pour Bouteflika et son entourage, à moins de cinq mois de l'échéance cruciale de la présidentielle. C'est un autre coup dur qui s'ajoute à la campagne menée, tambour battant, en faveur du cinquième mandat. Un autre coup dur après, effectivement, la dernière apparition en date de Abdelaziz Bouteflika, à l'occasion de la fête nationale du 1er Novembre où il paraissait dans sa posture des «mauvais jours». En fait, depuis son premier grand accident de santé, fin 2005, puis, davantage après l'AVC dévastateur qui l'avait frappé le 27 avril 2013, l'homme alterne périodiquement des phases où il apparaît extrêmement diminué, avant de reparaître au mieux, plus tard. Le 30 décembre 2013, par exemple, à l'occasion de la traditionnelle cérémonie de signature de la loi de finances à la présidence de la République, Bouteflika paraissait tellement diminué, tellement fatigué ce jour-là que, immédiatement après, et pour la quasi-totalité des observateurs et de la classe politique, il était évident que l'option «quatrième mandat» était définitivement enterrée. Or, la suite on la connaît. Cinq années plus tard, et à période équivalente des mêmes élections, la présidentielle, l'on en est exactement au même débat, sur le même sujet, et avec les mêmes acteurs adoptant, chacun, la même position. L'état de santé de Bouteflika, que chacun tente de décrypter à travers les images de la télévision nationale, alimentera, à coup sûr, l'essentiel du débat et de l'actualité nationale des jours à venir. En tout cas, jusqu'à la prochaine apparition de l'homme. Il faut dire que, depuis l'affaire de l'ancien Premier ministre, Manuel Valls, en septembre 2016, Bouteflika et son plus proche entourage ont complètement modifié leur approche et leur gestion des audiences présidentielles : Bouteflika ne recevant plus, depuis, que les chefs d'Etat, et encore, ces rencontres pouvaient même être annulées, à tout moment, y compris pour une Angela Merkel, si l'hôte n'était pas au mieux de sa forme, celle lui garantissant une bonne image. Pour son invité du jour mais, surtout, pour le journal télévisé de l'ENTV… K. A.