Les artères du CHU Benbadis habituellement bondés de blouses blanches et de citoyens qui déambulaient à longueur de journée, étaient curieusement vides hier à la mi-journée. Hormis quelques passants et les agents de sécurité, l'hôpital donnait l'impression d'une structure vide. La peur d'une éventuelle contamination a fini par gagner du terrain. Ilhem Tir- Constantine (Le Soir)- Avec 664 contaminations et 25 décès au dernier bilan du lundi 6 juillet, Constantine semble être désarmée face à la recrudescence de la pandémie. Le dépistage systématique des sujets même asymptomatiques et chez le personnel soignant explique aussi la hausse des cas de Covid-19 confirmés et l'on affirme que le nombre relativement faible des contaminations à Constantine «est imputé au manque de tests» puisque l'antenne de l'Institut Pasteur n'en aurait pas effectués pendant plusieurs jours en raison du manque de réactifs. Le personnel médical du CHU a observé un sit-in devant le siège de la direction de l'hôpital réclamant des moyens et des renforts. En effet, l'absentéisme bat son plein puisque le CHU fonctionne à peine avec 20% de ses capacités en personnel «il y a des médecins qui gèrent leurs services par téléphone» souligne un cadre de la direction qui a préféré témoigner sous couvert de l'anonymat «la situation est déjà tendue et on ne veut pas verser dans l'alarmisme mais vous pouvez voir de vous-même» ajoute-il. Une situation intenable pour ceux qui travaillent et qui sont exténués. Une lettre de dénonciation a été transmise hier au directeur de l'hôpital pour qu'il puisse intervenir et rappeler le personnel en congé exceptionnel ou confiné à la maison. Une grève pointe à l'horizon et si les paramédicaux et médecins en service mettent à exécution leur menace, «ça sera la catastrophe», affirme-t-on. Depuis quelques jours déjà, les médecins résidents, les maîtres-assistants et les paramédicaux ont lancé des appels de détresse en raison de leur nombre réduit et également en raison de la multiplication des contaminations au Covid-19 au niveau de plusieurs services comme ceux de la parasitologie, la radiothérapie, l'oncologie, l'hématologie, la microbiologie et l'orthopédie, pour ne citer que ceux-là «La contamination est fulgurante et les hôpitaux sont saturés» alertent- ils. Plus de 100 personnes, entre médecins, paramédicaux, aides-soignants, femmes de ménages, ambulanciers et agents de sécurité exerçant dans les trois unités Covid-19, sont contaminés par le nouveau coronavirus. La direction du CHUC, s'est contentée d'un message de soutien et de prompt rétablissement adressé aux membres du personnel malade. Leïla, jeune résidente témoigne : «Nous sommes fatigués et désarmés face au manque de lits, au manque de moyens de protection.» Avant d'ajouter : «La peur d'être contaminés et transmettre le virus à nos familles nous hante surtout que, le nombre des confrères et consœurs affectés ne cesse d'augmenter.» Une infirmière affectée au service de pneumologie prend la parole pour décrire la situation dans laquelle elle vit depuis plus de 4 mois déjà, «je me réveille la nuit et alors, je cherche mon masque car à force de voir partir des malades emballés dans un drap, sans toilette mortuaire». Au niveau du service d'infectieux, le protocole de traitement des cas de coronavirus avec de la chloroquine, commence à avoir des résultats «encourageants pour la plupart» a-t-on signalé et donc «il y a autant d'espoir d'avoir des guérisons». Au niveau du service de cardiologie, les consultations sont de plus en plus chargées, «nous n'avons pas les moyens matériels et humains pour la prise en charge de ce nombre de malades», selon Farid, un paramédical qui précise que les besoins d'urgences se font sentir et le manque de barboteurs humidificateurs d'oxygène pénalise énormément les malades. Ainsi la peur d'une contamination et les informations quotidiennes de personnels contaminés ne sont pas restés sans conséquences sur le reste. «Nous avons certes peur mais cette situation nous pousse à travailler dans la sérénité avec un maximum de vigilance», expliqua Fayçal, surveillant général dans l'un des services non encore contaminé. Pour ce qui est de la gynécologie, le ras-le-bol des sages –femmes a été encore une fois affiché hier à l'occasion d'un sit-in, le 3e depuis le début de la pandémie en raison du manque de matériel. «Nous devons apporter aide et réconfort à nos malades dans cette maternité qui est saturée et dont le personnel soignant est au bout du rouleau après des semaines d'efforts et de sacrifices pour mener à bien leur mission», lança Houda, sage-femme. «Déjà en temps normal, la maternité du CHU est débordée alors qu'en est-il avec le Covid-19 ?» s'insurge-t-elle. Ilhem Tir