Quel destin attend l'accord liant l'Algérie et le Maroc pour l'exploitation du gazoduc Maghreb-Europe qui doit arriver à terme à l'automne prochain ? Les gesticulations tous azimuts des Marocains ne militent pas pour une reconduction du contrat, même si nos voisins de l'Ouest ont beaucoup à perdre dans l'histoire, l'Algérie ayant de bons atouts pour parer à l'impossibilité d'exploitation de l'installation en question. Selon une source qui s'est confiée à la publication ibérique El Confidencial Digital, l'Espagne a pris ses devants pour que ses approvisionnements en gaz naturel à partir de l'Algérie ne soient pas interrompus en cas de non-reconduction du contrat liant les deux voisins du Maghreb. Un gazoduc qui, doit-on le rappeler, est entré en exploitation il y a 25 ans pour le transport à partir de Hassi R'mel en direction de l'Espagne et du Portugal de plus 10 milliards de mètres cubes de gaz en passant par le Maroc. Long de 1 400 kilomètres pour unir le nord de l'Afrique au sud de l'Europe, à travers un conduit sous-marin le long du détroit de Gibraltar, le gazoduc Maghreb-Europe permet à l'Espagne et au Portugal d'assurer leurs approvisionnements à plus ou moins 30% de leurs besoins annuels en gaz. Ceci sans compter l'apport de l'autre gazoduc qui va de Béni-Saf à Almeria à travers la Méditerranée, le gazoduc Medgaz, détenu par Sonatrach et son partenaire espagnol Naturgy, la compagnie espagnole de distribution et commercialisation de l'électricité et du gaz. La publication El Confidencial Digital, tout en révélant le secret de Polichinelle que constitue la forte probabilité que ne soit pas reconduit l'accord pour l'utilisation du gazoduc Maghreb-Europe qui expire dans quatre mois, affirme que le gouvernement espagnol a été contraint de se mobiliser pour garantir son approvisionnement en gaz algérien en raison d'une éventuelle aggravation de la crise avec le Maroc. « L'Espagne a réussi à sauver avec l'Algérie un possible problème d'approvisionnement si une escalade de représailles à l'encontre de notre pays par le Maroc commençait », assure, en effet, la publication en ligne qui annonce que la solution de rechange privilégiée sera de recourir au gazoduc Medgaz, installations appartenant pour 51% à Sonatrach et 49% à son partenaire espagnol Naturgy. L'Algérie demeurera ainsi le principal fournisseur de gaz de l'Espagne, « notamment parce qu'elle dispose de deux gazoducs reliant les deux pays par lesquels transite cette matière première, ce qui rend le transport beaucoup moins cher », explique El Confidencial Digital. Les autorités espagnoles sont donc prêtes à toute éventualité concernant le renouvellement du contrat qui permet d'acheminer le gaz algérien du cœur du Sahara vers l'Europe en traversant le Maroc, en mettant en avant, en plus des relations tendues entre l'Algérie et le Maroc, « le conflit entre Madrid et Rabat (qui) a compliqué ce renouvellement ». Les Espagnols, selon la publication, ont également reçu des garanties de la part des Algériens afin que la baisse qui a caractérisé l'approvisionnement en gaz à partir du sud du pays, l'hiver dernier, ne se reproduise pas et évitera ainsi que le marché se tende et produise une hausse de prix. Une situation dont la responsabilité incombe à Sonatrach qui « vendait le gaz qu'elle devait fournir à l'Espagne à un prix plus élevé à la Chine ou au Japon, profitant du fait qu'ils subissaient également une importante vague de froid à l'époque », selon des sources diplomatiques qui se sont confiées à El Confidencial Digital. Pour éviter que les tensions sur le marché déclenchent une hausse des prix, l'Espagne a, donc, obtenu l'engagement de Sonatrach de réduire les expéditions de gaz vers l'Asie tant que l'approvisionnement du système gazier espagnol n'est pas garanti, affirme la publication qui souligne, par ailleurs, que si l'Algérie décide de ne pas renouveler le contrat pour le gazoduc Maghreb-Europe, le Maroc rencontrera de grandes difficultés : il devra acheter près de la moitié de sa consommation de gaz dans un marché indexé sur le Brent, qui ne cesse d'augmenter, et sans le soutien de l'Espagne, qui sera assurée d'être approvisionnée par l'Algérie elle-même. Azedine Maktour