Elle devait être «historique», et elle le sera effectivement, la visite que Abdelmalek Sellal a effectuée, hier, dans la wilaya de Tizi Ouzou. Première du genre depuis Sid Ahmed Ghozali, dernier haut responsable à visiter officiellement la capitale de la Kabylie, l'événement sera pourtant éclipsé par un autre : le retour de Abdelaziz Bouteflika. De notre envoyé spécial à Tizi Ouzou, Kamel Amarni De toutes les sorties du Premier ministre dans les wilayas, celle d'hier à Tizi aura été ainsi la plus courte. A 13h, tout était fini. «Je suis tenu par des engagements et je dois impérativement rentrer sur Alger», dira Sellal aux membres de «la société civile» qu'il réunissait à la maison de la culture Mouloud Mammeri, rituel qui couronne toutes ses visites. Sans autres précisions. Sellal devait, en fait, se rendre non pas à Alger mais à Blida, à l'aéroport militaire de Boufarik plus exactement, qu'il rejoindra par hélicoptère. Curieusement, Sellal n'annonçait pas le retour de Bouteflika lors de cette réunion. «Il va rentrer», répondra-t-il à une femme qui tenait à souhaiter «un prompt rétablissement au Président Bouteflika». Ceci dit, selon une source très bien informée, ce n'était que la veille, soit lundi dernier que Sellal avait été informé du retour du Président. D'ailleurs, le programme de la visite, déjà très modeste par rapport aux autres wilayas, en raison des contraintes sécuritaires, subira une autre modification de dernière minute pour le ramener au strict minimum nécessaire. Tout était fait de sorte à libérer le Premier ministre le plus tôt possible, mais aussi à ce que tout se déroulera au seul chef-lieu de wilaya et alentour. Aqmi, qui écume la région, a, par ailleurs, «souhaité la bienvenue» à Sellal par un attentat, certes pas meurtrier, perpétré la veille à la sortie de Draâ Ben Khedda. Lors de son intervention à la maison de la culture Mouloud Mammeri, le Premier ministre avait d'ailleurs tenu à rendre un hommage appuyé «à nos forces de l'APN et de l'ensemble des services de sécurité. De temps à autre, ajoutera-t-il, il nous faut nous rappeler ces hommes qui veillent à la sécurité du pays». «10 milliards de dinars pour relancer les projets» Ceci étant, à Tizi Ouzou, et outre les problèmes liés à la situation sécuritaire, puis aux conséquences des dramatiques événements de 2001, un autre, et pas des moindre, plombe tout acte d'investir : le foncier et les histoires d'expropriation. «En terme d'investissement, nous sommes prêts à vous aider (...) Quant à ces histoires d'expropriation, l'Etat payera ce qu'il faut pour les régler. Mais il ne faut pas exagérer. A titre exceptionnelle, nous mettrons 10 milliards de dinars pour relancer les projets bloqués. Mais ne comptez pas sur moi pour payer des sommes excessives. Je ne vais tout de même pas aller en prison pour cela ! Nous payerons seulement le prix réel.» A titre exceptionnel également, «nous avons pris la décision hier (lundi, ndlr) de construire un nouveau grand centre hospitalo-universitaire de 500 lits à Tizi Ouzou. «Cosider pour prendre en charge la JS Kabylie» Tout à fait à la fin de son intervention et de sa visite, Sellal lancera : «Il ne faut pas que nous oublions la JSK ! C'est pour cela que nous avons décidé que ce grand club soit pris en charge par la société Cosider. Je demande seulement à Moh Chérif Hannachi de nous ramener de bons résultats !», ironisera Sellal en direction d'un président de la JSK, au comble du bonheur. Auparavant, Sellal n'a pas manqué de... malmener le responsable de l'entreprise espagnole partenaire dans la construction du nouveau stade de Tizi Ouzou qui accuse un énorme retard. «Où en êtes-vous ?» attaquera d'emblée le Premier ministre. «Nous avons un problème de personnel qualifié. Il faut bien planifier le projet», répond l'Espagnol qui se verra répliquer du tac au tac : «Moi, je ne cherche pas à comprendre. Septembre 2014, vous nous livrez le stade.» Le wali de Tizi Ouzou intervient à son tour pour préciser : «Ils (les Espagnols, ndlr) ont eu tout ce qu'ils voulaient. Et parfois, nous avons effleuré l'illégalité pour cela mais là, si ça continue, nous allons avoir recours à des sanctions.» L'Espagnol insiste de son côté sur «les problèmes» mais se verra coupé sèchement par Sellal : «ça, c'est votre problème, pas le mien. Moi, je veux le stade en septembre 2014.» «Un décret pour légaliser 300 prénoms amazighs» Autre problème spécifique à la région, celui des prénoms amazighs, source d'éternels conflits entre la population et l'administration qui ne les reconnaît que rarement. Cette question d'ordre culturel et, bien sûr, éminemment politique, a toujours constitué une revendication centrale de la population de Kabylie et des Aurès notamment. «Nous avons établi une liste de 300 prénoms amazighs, sur la base du recensement fait par le Haut Commissariat à l'amazighité. A la prochaine réunion du gouvernement, mercredi prochain (le 23 juillet), nous allons prendre un décret exécutif pour légaliser officiellement ces prénoms auprès de l'état civil», annoncera Sellal. Comme quoi, il suffit parfois de gestes simples pour régler des problèmes complexes et inutiles.