Abdelaziz Bouteflika, qui postule à un quatrième mandat présidentiel d'affilée, en dépit de sa maladie et de sa longue convalescence, a-t-il la caution, comme autrefois, des puissances occidentales ? Hormis les Etats-Unis qui ont calculé d'envoyer à Alger leur secrétaire d'Etat, John Kerry, en pleine période préélectorale, le reste de l'Occident, l'Europe notamment, s'est gardé de manifester un quelconque enthousiasme pour l'élection du 17 avril. Sofiane Aït Iflis - Alger (Le Soir) Il est vrai qu'en pareille conjoncture, la diplomatie s'impose de la prudence. Mais à bien interpréter les quelques déclarations produites et attitudes adoptées vis-à-vis du scrutin présidentiel par des organisations, voire même des institutions, connexes aux canaux officiels, il est aisément remarquable que l'Occident reste sur une grande appréhension quant à la régularité de l'opération électorale. L'Union européenne et le NDI américain, qui ont eu déjà à diligenter des missions de surveillance des élections en Algérie, ont, cette fois, décliné l'invitation algérienne, justifiant que cette dernière ne leur a pas été signifiée à temps pour qu'ils puissent bien se préparer. L'argument, pesé, les dispense de davantage de justificatifs qui pourraient susciter des commentaires diffus et, conséquemment, donner prise à des réactions. L'on a vu d'ailleurs l'effet produit par la déclaration mal traduite du secrétaire d'Etat américain, John Kerry, auquel l'APS, reprenant un de ses interprètes, a fait dire qu'il se réjouissait de la transparence du scrutin. Le quiproquo a été vite happé par le commentaire médiatique et la réaction politique. Au point d'ailleurs que le département d'Etat américain d'abord, l'ambassade américaine à Alger ensuite se sentent l'obligation de préciser le véritable propos de Kerry qui, en vérité, a exprimé, dans une formule diplomatique soignée, une appréhension quant à la régularité du scrutin. Le chef de la diplomatie américaine a néanmoins affirmé clairement que son pays travaillera avec le président que le peuple élira au soir du 17 avril. S'il y a là l'expression publique d'une neutralité vis-à-vis d'un processus électoral, une attitude somme toute correcte, il n'en demeure pas mois que les Américains n'en restent pas indifférents. D'autant qu'ils sont engagés avec l'Etat algérien sur des perspectives de coopération tous azimuts, mais dont les plus fondamentales restent la coopération dans le domaine de la sécurité et de l'énergie. Ceci même si, dans le domaine de l'énergie, les Américains n'auraient pas apprécié que Bouteflika se soit ravisé et amendé la loi sur les hydrocarbures peaufinée par Chakib Khelil sur conseil d'un cabinet américain. John Kerry, qui a séjourné deux jours en Algérie, a dû faire le tour de la question énergétique avec ses homologues algériens. On ne sait ce qu'il a mis comme annotations dans son rapport de mission. Cependant, il n'y a pas eu en retour de chèque en blanc signé au profit de Bouteflika. Le refus du NDI de participer à la supervision du scrutin présidentiel est l'une des illustrations de l'attitude réservée des Américains. Pareillement pour l'Europe qui s'est confinée, elle aussi, dans une position de wait and see, laissant décoder quelques attitudes à travers les commentaires distillés par médias interposés. La presse française, et plus récemment celle espagnole, ne se sont pas gênées à ressasser la maladie de Bouteflika et la question autour de sa capacité à encore gouverner. Cette image négative de Bouteflika dans la presse occidentale ne pouvait être effacée par un déplacement d'un Premier ministre espagnol soucieux plutôt des approvisionnements de son pays en gaz algérien, notamment en ce moment de la crise de Crimée. De retour d'ailleurs à Madrid, El Mundo a évoqué l'artifice qui a rendu audible la voix de Bouteflika.