De plus en plus d'Algériens ont recours aux plantes médicinales pour se soigner et lutter contre les maladies... Considérées comme des produits de santé, ces plantes sont encore fortement sollicitées pour des traitements... Pourquoi cet intérêt pour la médication à base de plantes? Peut-on tout soigner avec les plantes ? Le Dr Mohamed Mihoubi répond à nos questions. Le Soir d'Algérie : Merci docteur d'avoir accepté cette première interview. Commençons par une petite présentation : qui êtes-vous ? Dr Mohamed Mihoubi : Je m'appelle Mohamed Mihoubi et j'exerce depuis 35 ans en cabinet mon activité́ de médecin généraliste et je m'intéresse à la phytothérapie. Grand sportif, puisque j'ai été footballeur de la ville de Draâ-el-Mizan où j'ai débuté en tant que médecin, et athlète de fond (10 000 m) et semi-marathonien depuis le lycée. Comment en êtes-vous arrivé à vous intéresser aux médecines naturelles ? Mon intérêt pour la médecine naturelle a débuté dès mon enfance (10-15 ans) lorsque je regardais ma grand-mère soigner des personnes qui venaient la solliciter pour plusieurs problèmes de santé. Bien plus tard, devenu médecin, ma curiosité a évolué et j'ai pu donc me plonger dans des livres de médecine chinoise, égyptienne et grecque, donc de médecine naturelle, dont l'historique remonte à 3 000 ans avant l'ère chrétienne. Les plantes médicinales séduisent de nombreux Algérien(ne)s à la recherche de traitements plus naturels. Qu'en pensez-vous ? Beaucoup de gens vont vers la phytothérapie pour se soigner afin d'éviter les effets secondaires, parfois importants, des médicaments chimiques de synthèse ainsi que leurs interactions néfastes surtout lors de polymédication (lorsque plus de 5 produits sont prescrits, en particulier dans les maladies chroniques chez le sujet âgé). A titre d'exemple, le paracétamol consommé sans modération est responsable de troubles hépatiques graves (hépatite iatrogène). Cependant, cette thérapie a évolué énormément dans le monde en général et en Algérie en particulier, grâce à l'émergence de laboratoires pharmaceutiques qui fabriquent des médicaments phyto-pharmacologiques après contrôle du principe actif à dose efficace tout en éliminant ce qui est nuisible. Ces produits sont soumis à l'AMM (Autorisation de mise sur le marché) et accompagnés d'une notice explicative. Au quotidien, comment la phytothérapie intervient-elle dans votre pratique ? En ce qui me concerne, et dans ma pratique quotidienne, je prescris ces produits selon les cas qui se présentent. Après les 48 heures, si l'état du malade ne s'améliore pas, je prescris un traitement chimique. Les patients qui viennent en consultation ont-ils cette demande précise ? Généralement, le malade est conseillé par un médecin ou un pharmacien. Mais certains cas arrivent au cabinet avec, déjà, un traitement phytothérapie commencé à la maison, c'est-à-dire «une recette de grand-mère». Peut-on préconiser des plantes pour tous les types de maladies ? Non, la phytothérapie ne doit pas être préconisée dans tous les types de maladies, telles que la tuberculose ou certaines psychoses graves (schizophrénie, par exemple) et beaucoup d'autres maladies où la chimiothérapie s'impose. L'usage des plantes médicinales est particulièrement déconseillé dans ces cas-là... Certaines vitamines, sels minéraux et protéines peuvent être prescrits comme adjuvants au traitement chimique. Il est malheureux et scandaleux de voir, de nos jours, des herboristes proposer des plantes à des cancéreux au stade avancé de leur maladie et à même des diabétiques, qui finissent aux urgences à des stades très compliqués. La recherche contre le cancer et la recherche contre la maladie d'Alzheimer s'intéressent aujourd'hui de très près au curcuma... Effectivement, le curcuma possède des vertus antioxydantes, cause pour laquelle certaines recherches actuelles s'intéressent à cette plante car le stress oxydatif, provoqué par des molécules très actives appelées radicaux libres, est responsable du vieillissement et de beaucoup de maladies chroniques telles que le cancer, l'Alzheimer, la cataracte, la maladie de Parkinson, etc. Et les antioxydants, tels que le curcuma, peuvent neutraliser ces radicaux libres oxydatifs en excès. Avez-vous déjà utilisé la phytothérapie pour vous soigner ? Il m'est arrivé de me soigner par la phytopharmacologie et même parfois, à titre préventif, par des plantes... Durant le mois sacré de Ramadhan, je consomme régulièrement une boisson d'armoise blanche (chih) au lieu d'un soda.