Depuis un peu plus de deux ans, après la proclamation en Kabylie de l'allégeance du premier groupe terroriste algérien à l'Etat islamique, la lutte contre les groupuscules, résidus des années de feu, fidèles à Al-Qaïda, et les convertis au djihadisme version Daesh, a pris une tournure majeure, qui allait s'amplifier avec la nouvelle donne sécuritaire à nos frontières au Sud et à l'Est. Bien qu'il y ait eu matière à interrogations sur la teneur du discours politique, quant à l'appréciation de la situation sécuritaire, distillé en certaines occasions, il ne fait pas de doute, toutefois, que sur le terrain des opérations, et à l'instar de l'année dernière, l'ANP a réussi à imposer sa loi aux groupes terroristes au nord du pays d'abord où les groupes localisés à l'Est de la capitale, sur le territoire montagneux du triangle constitué des wilayas de Boumerdès, Bouira et Tizi-Ouzou où de marquantes opérations ont eu lieu cette année. Des sorties de l'ANP qui ont permis, entre autres, l'élimination de quelques-uns parmi les derniers terroristes des deux groupes Al-Arqam et El-Farouk aujourd'hui décimés, pour ne pas dire intégralement anéantis. Dans cette région bastion du terrorisme dans les années 1990 et de ses meurtriers résidus de la première décade des années 2000, l'ANP a enregistré de hauts faits telle l'élimination, en mai dernier, de B. Abdenour, connu sous le pseudonyme de Abou Chouaïb, responsable au sein de ce qui subsiste de Katibat Al-Farouk, localisé sur les monts de Sidi-Ali-Bounab qui surplombent la ville de Tadmaït, une quinzaine de kilomètres à l'ouest de Tizi-Ouzou, où sa longue cavale s'est achevée, tout comme celle de B. Mouloud, alias Abou El-Moundhir, l'«émir» abattu, lui, à l'ouest de la capitale, à Gouraya dans la wilaya de Tipasa, deux mois plus tôt. Selon plusieurs sources, ce dernier figurait au rang de plus ancien terroriste ayant activé dans les rangs de l'ex-Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) à l'ouest d'Alger. Mais, de la multitude d'opérations menées par l'ANP durant cette année, celle qui aura sans nul doute marqué les esprits a été dirigée contre un groupe localisé puis pourchassé plusieurs jours durant dans les bois du lieudit Rouakeche, à une soixantaine de kilomètres au nord de la wilaya de Médéa, durant le mois de Ramadhan. Quatorze membres du groupe terroriste ont été abattus et quatre autres arrêtés. Une sortie de l'ANP qui a eu un retentissement d'une même ampleur que celle qui avait permis, quelques semaines plus tôt, aux portes de la ville de Bouira, la mise hors d'état de nuire de 11 terroristes et l'arrestation d'un autre. Ceci, après cette opération-éclair menée par des éléments des troupes d'élite de l'armée, dans la nuit du 31 mai au 1er juin à El-Eulma, contre un véhicule utilitaire à bord duquel avaient pris place les huit membres d'un groupe terroriste. Cette guerre sans répit qu'ont endurée les groupes terroristes au nord du pays allaient induire une limitation des mouvements de ces mêmes groupes dans une proportion jamais aussi limitée dans le temps et l'espace, confirmant ainsi les résultats de la lutte anti-terroriste de l'année 2015. Une année qui avait déjà donné lieu à «des résultats sans précédent», comme le soulignait le ministère de la Défense nationale dans son bilan de l'année 2015, avec l'élimination de 157 terroristes dont une dizaine d'«émirs». Ces douze derniers mois, l'ANP a surtout réussi, si l'on doit se fier à ses innombrables communiqués, à couper l'herbe des groupes qui, tout comme l'année dernière, à prendre le relais de Jund-Al-Khilafa, la branche algérienne de l'Etat islamique. Tout le monde, en effet, doit avoir encore en mémoire cette sortie à Oued Zehour, dans la wilaya de Skikda, lorsqu'en octobre dernier un détachement de l'ANP avait éliminé deux terroristes dont un s'est révélé être Sadek Hebbache, connu sous le pseudonyme d'Abou Doujana, et est en fait une des têtes pensantes d'un groupe activant à l'Est du pays, identifié comme étant katibat Al-Ghoraba et mis sous l'autorité d'un certain Abou Hammam, celui-là même qui s'est proclamé chef du nouveau groupuscule Jund-Al-Khilafa, la filiale algérienne de Daesh. Un groupuscule mis sous très forte pression depuis que, du nord de la ville de Constantine, à Djebel Ouahche, une grande opération a été déclenchée par l'ANP avec des prolongements jusqu'au massif de Béni Oulbane, dans la wilaya de Skikda, pas très loin du lieu où Abou Doujana a été éliminé. L'assassinat d'un policier, fin octobre dernier, dans un restaurant de Constantine n'a fait que renforcer la conviction qu'une importante partie de la lutte anti-terroriste, et contre le noyau de Daesh en Algérie, est en train de se jouer dans la grande ville de l'Est du pays. Contraints donc de limiter comme jamais leurs mouvements au Nord du pays, les groupes terroristes ne sont pas moins mis sous très forte pression à travers le Grand Sud comme l'illustre le bilan de cette année finissante. Les conséquences et les développements des révolutions libyenne et tunisienne, gangrenées par l'expansionnisme du djihadisme né en Irak et au Levant, et les troubles qui secouent le Sahel aux portes des frontières sud du pays font de l'Algérie une potentielle, voire unique, échappatoire de centaines de djihadistes fuyant la chasse qui leur est menée depuis des mois un peu partout en Syrie, en Libye et à un degré moindre en Tunisie. C'est dans cette optique, une autre guerre en réalité, qu'un dispositif, constitué d'une quinzaine de milliers d'hommes et une impressionnante logistique, a été déployé sur une bande frontalière pas évidente à couvrir, mais qui a tout de même montré son à-propos, comme l'illustre le bilan des opérations, parfois impressionnantes, des troupes de l'ANP à travers le Grand Sahara comme lorsque, début octobre, un détachement du secteur opérationnel d'In Amenas a tendu une embuscade, près des frontières avec la Libye, à des hommes armés qui se sont engouffrés sur le territoire national à bord de trois véhicules tout-terrain. Cinq individus s'étaient répartis sur les trois véhicules et étaient en possession d'une kalachnikov, un fusil de chasse et deux paires de jumelles, selon la même source. Un peu plus tôt dans la même journée, un communiqué du ministère de la Défense faisait état de la découverte, dans la même région, de trois kalachnikovs, un fusil à lunette, un fusil de chasse, un pistolet automatique, dix chargeurs et près de 500 balles de différents calibres. Ceci, sans parler de ces désormais fameuses opérations entamées en mars dernier, lorsque tout juste après que Daesh ait tenté de faire de la localité de Ben Guerdane, au sud-est de la Tunisie, une enclave sous son autorité, les militaires de l'ANP ont déjoué une tentative d'incursion à une quinzaine de kilomètres au nord-ouest de la ville d'El-Oued. Trois terroristes avaient été neutralisés et, surtout, un impressionnant arsenal récupéré, constitué entre autres de 6 Stinger, missiles anti-aériens, une vingtaine de kalachnikov, des lance-roquettes RPG-7, des fusils mitrailleurs RPK, des fusils à lunette, des pistolets automatiques, des roquettes pour RPG-7, des grenades et des ceintures explosives. A se fier à un bilan établi la semaine dernière par la revue El Djeich, l'organe officiel de l'armée, sur les 350 terroristes neutralisés durant cette année, 125 terroristes ont été éliminés. Une ahurissante quantité d'armes a été récupérée, constituée entre autres de près de 700 kalachnikovs, les fameux six missiles anti-aériens, des lance-missiles, des roquettes, des mitrailleuses lourdes et des centaines d'autres pièces d'un arsenal permettant de mener une guerre.