Foules de fid�les en larmes, propos laudatifs de dirigeants politiques et de dignitaires religieux, toutes ob�diences confondues, journ�es de deuil national, y compris en Inde et au Liban, drapeaux en berne, la mort de Jean-Paul II a suscit� un v�ritable �lan de compassion. Plus de 100.000 personnes se sont mass�es dimanche sur la place Saint-Pierre pour assister � la premi�re messe dominicale depuis le d�c�s du pape polonais, samedi soir au Vatican. Le choc �tait �videmment tr�s grand en Pologne, o� des millions de catholiques priaient pour le repos de Jean-Paul II et o� le deuil, proclam� d�s samedi soir, durera jusqu'aux fun�railles, les drapeaux restant hiss�s � mi-m�t jusqu'au 9 avril. Illustration de l'�motion qui r�gne dans les pays dont la population est majoritairement chr�tienne, le Paraguay et le Gabon ont d�cr�t� cinq jours de deuil national, contre quatre au Costa Rica, trois en Italie, au Portugal, au Chili, en Bolivie, au Cap-Vert, aux Seychelles et au Timor- Leste, l'Espagne et le P�rou se limitant � la seule journ�e de lundi. Faits notables, Cuba, seul Etat communiste occidental, n'a pas h�sit� � opter pour un deuil officiel de trois jours et la Chine et le Vietnam ont officiellement pr�sent� leurs condol�ances. Non moins surprenant, en Inde, o� la communaut� chr�tienne ne repr�sente qu'un peu plus de 2% de la population, le gouvernement a d�cr�t�, � compter de dimanche, trois jours de deuil national, Jean-Paul II �tant cher au cœur des Indiens pour avoir b�atifi� en 2003 m�re Teresa, fondatrice de l'ordre des Missionnaires de la charit� de Calcutta. R�action comparable dans certains Etats musulmans, tels que l'Egypte, avec un deuil officiel de trois jours, et l'Albanie, qui observera lundi une journ�e de deuil, parce que le pape "a rendu aux Albanais la foi en Dieu et dans les institutions religieuses apr�s de longues ann�es de dictature communiste", a expliqu� le pr�sident, Alfred Moisiu. Quant � la Bosnie voisine, th��tre de 1992 � 1995 d'une guerre inter-ethnique entre Serbes orthodoxes, Musulmans et Croates catholiques, elle a d�cid� que les c�r�monies fun�raires donneraient lieu � un jour de deuil. De m�me, au Liban, dont environ 38% des 3,5 millions d'habitants sont chr�tiens, le Premier ministre d�sign�, Omar Karam�, a d�cr�t� trois jours de deuil � partir de dimanche, ainsi que pour les fun�railles. Dans d'autres pays, l'Allemagne et la France, par exemple, les drapeaux devaient �tre mis en berne. Par ailleurs, des milliers de fid�les ont accouru au sanctuaire portugais de Fatima pour assister � une messe c�l�br�e en plusieurs langues, tandis que Lourdes, autre haut-lieu du catholicisme, dans le sud-ouest de la France, s'est r�veill�e au son des 84 coups (l'�ge du pape) du glas de la basilique de l'Immacul�e Conception. Une nu�e de fid�les a �galement envahi la basilique Notre-Dame de Guadalupe, au Mexique, et les cloches ont retenti, dimanche, aux Philippines. Parall�lement, des responsables politiques et religieux de toutes origines ont solennellement salu� la m�moire de Jean-Paul II. Le secr�taire g�n�ral de l'ONU Kofi Annan l'a ainsi qualifi� d'"infatigable avocat de la paix", le secr�taire g�n�ral de l'Otan, Jaap de Hoop Scheffer, de "carillon de la paix", le Premier ministre canadien, Paul Martin, et le pr�sident sud-cor�en, Roh Moo-Hyun, pr�f�rant l'image d'"ap�tre de la paix". Le chef de la Maison-Blanche, George W. Bush, a insist� sur le r�le du d�funt pape dans la lutte contre le communisme, avant de consid�rer que "le monde a perdu un d�fenseur de la libert� humaine". Le pr�sident russe, Vladimir Poutine, pour sa part, a �voqu� "une figure exceptionnelle de notre temps", � l'instar de son homologue fran�ais, Jacques Chirac, qui a parl� d'un "souverain pontife exceptionnel" et du Premier ministre britannique, Tony Blair, qui a regrett� la disparition d'"un homme remarquable". "Le monde perd un grand pont spirituel entre toutes les nations", a rench�ri la pr�sidente philippine, Gloria Arroyo, le Sud-africain Thabo Mbeki affirmant que son enseignement continuerait � �tre source d'inspiration. Le Br�sil, quant � lui, se sentait "afflig�", selon son pr�sident, Luiz Inacio Lula da Silva. Une "immense perte" pour le monde, a relev�, de son c�t�, Susilo Bambang Yudhoyono, � la t�te de l'Indon�sie, plus grand pays musulman du monde. Un d�fenseur de "la v�rit�, de la justice et de la paix", a ajout� son homologue iranien, Mohammad Khatami, un pape qui "a rendu d'incroyables services � la paix", a poursuivi le chef de l'Etat pakistanais, Pervez Musharraf, le Premier ministre japonais disant son "grand respect pour les efforts du pape en faveur de la paix dans le monde". "Au nom du peuple d'Isra�l, je tiens � exprimer mes regrets et mes condol�ances pour le d�c�s du pape Jean-Paul II et � participer au deuil de millions de chr�tiens", a encore lanc� le chef du gouvernement isra�lien Ariel Sharon. R�actions de sympathie aussi chez des dignitaires des principales religions. Le pasteur Samuel Kobia, secr�taire g�n�ral du Conseil oecum�nique des Eglises, qui regroupe 347 Eglises repr�sentant pratiquement toutes les traditions chr�tiennes en dehors de l'Eglise catholique romaine, a estim� que l'influence du pape avait "largement d�pass� les limites de l'Eglise catholique romaine et de la communaut� chr�tienne mondiale". Et le chef spirituel de l'Eglise orthodoxe, le patriarche de Constantinople Bartolom�e 1er, a vu en lui un "visionnaire" ayant œuvr� � rapprocher les Eglises catholique et orthodoxe. L'Eglise orthodoxe russe affirmant, pour sa part, esp�rer que "le souvenir du d�funt" servirait � "cr�er de bonnes relations" avec l'Eglise catholique, jusqu'ici dans l'impasse. "La premi�re fois que nous nous sommes rencontr�s il m'a paru avoir le sens des r�alit�s et �tre ouvert, avec un grand jugement des probl�mes mondiaux", a reconnu, quant � lui, le dala� lama, chef spirituel en exil des bouddhistes tib�tains. Cependant que pour Edgar Bronfman, pr�sident du Congr�s juif mondial, il "a fondamentalement chang� 2.000 ans de relations entre l'Eglise et le peuple juif". "Sa disparition laisse un vide que son successeur, esp�rons-le, remplira pour poursuivre l'adoption des justes causes des peuples du monde", a comment� le dignitaire religieux saoudien cheikh Mohsen Al- Awaji, un islamiste mod�r�. Fait exceptionnel, les deux principales t�l�visions arabes Al-Jazira et Al-Arabiya ont assur� une couverture quasiment en continu de l'agonie et de la mort de Jean-Paul II, provoquant la col�re des islamistes les plus extr�mistes. Dans ce concert de louanges, le mouvement contestataire catholique "Wir sind Kirche" ("Nous sommes l'Eglise"), particuli�rement actif dans les pays de langue allemande, d�teignait en �voquant les "nombreuses d�cisions erron�es" du pape.