Plus de deux millions de fidèles sont attendus à Rome dans les jours à venir pour les funérailles du souverain pontife. Une véritable marée humaine, 100 000 à 200 000 personnes, selon la police romaine, convergeait hier matin vers le Vatican. Jean-Paul II sera inhumé dans un délai de quatre à six jours, dans la basilique Saint-Pierre sauf dispositions testamentaires contraires. Dans les quinze à vingt jours à venir, le collège des cardinaux se réunira pour lui désigner un successeur. Chef spirituel de plus d'un milliard de fidèles, Karol Wojtyla aurait eu 85 ans le 18 mai prochain, mais la maladie a transformé en calvaire la fin de ses 26 années à la tête de l'Eglise catholique, pendant lesquelles il aura marqué le monde par son charisme et sa ténacité. “Le Saint-Père est mort à 21h37 (19h37 GMT) dans son appartement privé”, avait annoncé samedi soir le porte-parole du Vatican Joaquin Navarro-Valls, ajoutant que toutes les dispositions prévues dans la Constitution apostolique promulguée par Jean-Paul II, le 22 février, 1996 étaient “entrées en vigueur”. Ce texte édicte les règles à suivre pour la vacance du trône de Saint-Pierre, les obsèques du pape décédé ainsi que la convocation du conclave et les règles pour l'élection de son successeur. Le Vatican a annoncé que la dépouille mortelle de Jean-Paul II serait exposée à partir d'aujourd'hui à la basilique Saint-Pierre. La première congrégation des cardinaux, qui doit décider de la date des funérailles, aura lieu le même jour. Le pape s'est éteint en tenant la main de son secrétaire particulier, l'archevêque polonais Stanislaw Dziwisz, pendant que la foule des fidèles rassemblée sur la place Saint-Pierre priait et chantait pour lui. Selon la presse italienne, son dernier mot aurait été “amen” (ainsi soit-il). L'Italie, imitée par Cuba et la Bolivie, a déclaré trois jours de deuil national. En Pologne, celui-ci durera jusqu'à l'enterrement du pape. À Wadowice, la ville natale de Jean-Paul II, près de Cracovie, et dans tout le reste de la Pologne, des dizaines de milliers de fidèles se sont massés dans les églises dans la nuit de samedi à dimanche afin de prier pour le repos de leur pape. Les condoléances et les hommages sont venus du monde entier. Du secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, au président français, Jacques Chirac, de la reine Elizabeth II d'Angleterre au président américain Georges W. Bush, en passant par son homologue russe Vladimir Poutine. L'Eglise orthodoxe russe, qui a entretenu des relations difficiles avec le pape, a salué hier la mémoire de Jean-Paul II, tandis que l'Eglise catholique officielle chinoise, qui n'entretient pas de relations avec le Vatican, a présenté ses “profondes condoléances”. Après deux hospitalisations successives et une trachéotomie en février, l'état de santé de Jean-Paul II s'était brusquement aggravé jeudi, à la suite d'une infection urinaire, d'une septicémie et d'une défaillance cardiaque. Il avait souhaité ne pas être hospitalisé une nouvelle fois, pour mourir dans ses appartements. Privé de la parole depuis sa trachéotomie, le pape s'était néanmoins montré à quelques reprises à la fenêtre de sa chambre d'hôpital, parvenant seulement à prononcer quelques mots en public le 13 mars, avant son retour au Vatican. Premier pape slave de l'histoire de la chrétienté, premier pape non italien depuis 455 ans, Karol Wojtyla, élu chef de l'Eglise à 58 ans, le 16 octobre 1978, s'était imposé comme un chef spirituel doublé d'un homme d'action. Polyglotte et inlassable pèlerin, il aura attiré des foules considérables à chacun de ses déplacements (104 voyages à l'étranger et 129 pays visités). Mais ce pontificat aura aussi été marqué par les multiples problèmes de santé de cet homme, autrefois grand sportif, affaibli par la maladie de Parkinson et par les séquelles des blessures reçues lors de l'attentat de l'extrémiste turc Mehmet Ali Agca, le 13 mai 1981 sur la place Saint-Pierre, d'un cancer à l'intestin et de deux fractures, une à l'épaule et une au fémur. K. A./ Agences