S�tif, la capitale des Hauts-Plateaux, est devenue le sanctuaire des malfaiteurs qui �cument les quartiers � la recherche du gain facile. Braquages, vols, agressions et cambriolages sont devenus le lot quotidien des paisibles citoyens. La criminalit� et la violence urbaines ont augment� de mani�re sensible. La plupart des crimes visent les biens plut�t que les personnes, autrement dit, le nombre de vols et de cambriolages d�passe de loin le nombre d�agressions et de meurtres. Les changements intervenus dans la soci�t� alg�rienne depuis une dizaine d�ann�es ont contribu� � favoriser la croissance de la criminalit�. L��clatement de la famille, la crise de l��cole et l�accroissement des difficult�s �conomiques sont les vecteurs de l��mergence d�une nouvelle criminalit� face � laquelle la police semble aujourd�hui d�sarm�e. L�implication de plus en plus fr�quente des jeunes dans des affaires criminelles illustre ces bouleversements sociaux. Le mal de vivre d�une jeunesse d�boussol�e se traduit par le recours � la violence et � l�usage de stup�fiants �galement en hausse constante. Il faut noter que ces actes sont fr�quents dans la ville. Ce qui est incompr�hensible pour les victimes, c�est l�impuissance des agents charg�s d�assurer la s�curit� des personnes et des biens. Le plus souvent, la police ne r�ussit pas � mettre la main sur ces bandits. Face � cela, certaines victimes n�h�sitent pas � d�noncer l�indiff�rence des responsables de la s�curit� et ne croient m�me plus � l�existence d�une quelconque police au service des citoyens. Une recrudescence de d�linquance est constat�e dans diff�rents quartiers de la ville de S�tif. Exasp�r�es, trois victimes de cambriolage t�moignagent et interpellent la police et la justice. Elles se revendiquent porte-parole d�autres victimes qui n�ont pas souhait� s�exprimer publiquement. Elles font part de leur sentiment d�abandon et de m�fiance face � une police qu�elles jugent aussi impuissante que d�motiv�e. �Impuissance et lassitude visible des fonctionnaires, enqu�tes l�g�res, classements sans suite�, diront-elles. �A un endroit, sur six appartements, cinq ont �t� cambriol�s�, explique Mohamed B., qui habite la cit� des 1 014-Logements. Il a �t� victime d�un cambriolage � la mi-juillet. En quelques minutes. Alors qu�il profitait avec sa famille de quelques jours de vacances au bord de la mer, des individus ont pill� sa maison. �Ils ont op�r� un v�ritable d�m�nagement�, dira-t-il. �C�est une situation qui me r�volte !� d�nonce Mohamed. �Cela dure depuis des mois alors que c��tait un quartier tr�s agr�able ! Pourquoi la police n�est-elle pas plus pr�sente dans le secteur ? Pourquoi les jeunes qu�ils interpellent sont-ils rel�ch�s ? Pourquoi classent-ils syst�matiquement sans suite les cambriolages ? Je ne vois pas � quoi cela sert que nous portions plainte !� Mohamed, Abdelaziz et Bachir ont, en effet, port� plainte apr�s avoir �t� victimes d�un cambriolage ultra-rapide durant �une journ�e comme les autres�. La propension des victimes � d�poser plainte est plus consistante mais elles n�obtiennent g�n�ralement pas de r�ponse... parce que la personne vol�e est incapable d�identifier son voleur et que la police a progressivement renonc� � tenter de traiter ce contentieux ingrat. Sans illusion sur les r�sultats de l�enqu�te, les victimes contestent les m�thodes des enqu�teurs. �Franchement, je les ai trouv�s tr�s l�gers... d�autant plus qu�il a fallu les attendre une heure et demie�, affirme Bachir. Et d�ass�ner aux fonctionnaires reproche sur reproche et surtout, l�absence de relev�s d�empreintes. �Je ne suis pas s�r qu�ils utilisent toutes les possibilit�s que leur offre la technologie... Ils paraissent d�courag�s.� �Moi, je n�en veux pas aux policiers�, interrompt Abdelaziz, victime �galement d�un cambriolage au mois de mai. �Ils sont d�courag�s. Je sais qu�ils n�ont pas de moyens et qu�ils en ont marre aussi. J�en veux � ceux qui sont plus haut, � ceux qui rel�chent les auteurs de vols, � ceux qui classent sans suite nos cambriolages !� Faute de moyens et d�une justice puissante face � la d�linquance, les policiers � S�tif en sont r�duits � encaisser les coups. Pourtant, ils veulent prot�ger, rassurer et secourir. Le policier est m� par ce d�sir de garantir l�exercice des libert�s fondamentales et d�emp�cher la violence. Or, les policiers ne peuvent plus r�aliser cette mission. Assurer la s�curit�, garantir les libert�s, emp�cher la commission de d�lits et de crimes, tout cela est devenu tr�s difficile � assumer. Des zones existent o� les policiers ne peuvent ou ne veulent m�me pas entrer et intervenir (cit� des 500-Logements, 1 014- Logements, march� Abacha-Amar...), surtout par manque de moyens. �Comment voulez-vous assurer durant la nuit la s�curit� d�une ville aussi grande que S�tif avec uniquement deux v�hicules ?� affirme un officier de police. �On verbalise les automobilistes pour manquement au code de la route ou autre, alors que nous policiers, nous sommes les premiers � enfreindre le code de la route, plusieurs v�hicules de police roulent la nuit d�pourvus de feux. Au IIIe mill�naire, la plupart des services de police de S�tif continuent de travailler avec un mat�riel obsol�te, des machines � �crire datant de dizaines d�ann�es, voire plus. On est oblig� de qu�mander le papier, les stylos ou tout autre mat�riel�, ajoute avec amertume ce fonctionnaire de police. Il y a quelques jours, une sc�ne assez insolite s�est d�roul�e au niveau du boulevard du 1er- Novembre, pr�s du si�ge de la wilaya : des policiers, dont un commissaire, poussaient leur v�hicule de service qui refusait de d�marrer sous le regard surpris des citoyens dont les commentaires allaient bon train.