Darko-Daniel Jana�kovi�, presque la quarantaine, est serbe. C�est le d�sormais manager g�n�ral du club phare de la ville du Vieux rocher pour les deux ann�es � venir. Pour lui, le niveau du championnat alg�rien est forc�ment plus faible qu�en France malgr� les potentialit�s dont disposent les joueurs alg�riens, aussi talentueux soient-ils mais qui sont mal coach�s. En d�pit du fait d�avoir pris les commandes de la barre technique dans des conditions difficiles et en retard, il ne ressent aucune pression particuli�re � seulement un mois du coup d�envoi du championnat. Au contraire, il a d�j� d�nich�, selon ses dires, des joueurs qui ont un avenir prometteur et il a h�te de voir l��quipe �voluer, de remplir les stades, de gagner des matchs. Suivez son raisonnement� Le Soir d�Alg�rie : Monsieur Jana�kovi�, comment vous vous pr�sentez ? Daniel Jana�kovi� : Je suis un ancien joueur professionnel du club serbe FK Radni�ki et �galement des deux clubs portugais de Moreirense et Beira Mar. Un accident de voiture m�avait alors emp�ch� de continuer ma carri�re sans pour autant me contraindre � m��loigner des stades. J�avais 27 ans et je suis all� passer des dipl�mes d�entra�neur. J�ai fait des stages pratiques dans des centres de formation de plusieurs clubs europ�ens de renom, dont Arsenal, Real Sociedad, le Real Madrid. J�ai d�croch� mon premier contrat d�entra�neur professionnel au sein de mon club d�origine, le Partizan de Belgrade qui m�avait charg� de la formation des jeunes de moins de 18 ans. J�ai remport� le championnat de Yougoslavie en 2001 apr�s une ann�e seulement � la t�te de l��quipe. Juste apr�s, j�ai entra�n� les jeunes de l�OFK de Belgrade avant de me retrouver � Radni�ki qui �tait en 2e division o� j�avais r�ussi l�accession, ce que j�esp�re encore � Constantine. En 2003, je suis revenu en France. Je n�ai pas trouv� un club qui me convienne. J�ai dirig� la barre technique d�un club de 4e division, le club d�Avion en l�occurrence, du c�t� de Lens. J�ai travaill� avec un pr�parateur physique italien. Nous avions termin� 3es au classement, mais nous n�avions pas pu acc�der au palier sup�rieur. Pour diriger un club fran�ais de 1re et de 2e division, il faut un dipl�me fran�ais ou son �quivalent. Entre-temps, je suis revenu en Serbie pour r�pondre, en 2006-2007, � l�appel du FK Hajduk de Kula. C��tait pour moi une offre int�ressante, puisqu�il devait jouer une comp�tition europ�enne. Au d�part, j��tais l�entra�neur adjoint, mais apr�s que l�entra�neur en chef fut parti au golfe Persique, j�ai pris les r�nes de la barre technique et puis c��tait la grande aventure en 1re division qui a �t� sanctionn�e par une qualification au 2e tour de la coupe de l�UEFA. Depuis, je suis � nouveau retourn� en France. J�ai pu r�gler d�finitivement mon probl�me administratif avec la f�d�ration fran�aise, question d��quivalence des dipl�mes. J�ai travaill� l�ann�e derni�re comme recruteur au club de Metz. Ce n��tait pas motivant. C�est le terrain qui m�int�resse le plus. Enfin, des amis m�ont propos� de travailler en Afrique du Nord. J�ai re�u une premi�re offre de la part du pr�sident de l�Entente de S�tif. �a n�a pas march� pour des raisons connues, la presse en a fait �cho. Plusieurs offres m�ont �t� alors propos�es et j�ai donn� ma parole au pr�sident du CSC. �a me paraissait un challenge int�ressant d�autant que c�est un contrat de longue dur�e (2 ann�es renouvelable) et j�aurais le temps n�cessaire pour travailler. Le contrat pr�voit un prolongement si nous r�ussissons l�accession au bout de deux saisons et inclut une clause qui va dans ce sens, m�me si nous ne r�alisons pas cet objectif. Tout d�pendra du travail accompli. En tout cas, je ne resterais pas si je me sentais incapable de faire monter l��quipe en 1re division. Au CSC, je suis le manager g�n�ral. Je suis responsable du recrutement et je participe � l�organisation des matchs amicaux, la n�gociation des contrats de sponsoring� J�ai un projet dans ce sens. Malheureusement, je suis recrut� un peu tard. En Europe, la plupart des �quipes ont boucl� leur pr�paration et sont sur le point d�aborder la comp�tition, mais je promets aux supporters qu�ils auront des surprises agr�ables l�an prochain. Des �quipes �trang�res viendront jouer en amical � Constantine et �a va g�n�rer des rentr�es d�argent pour le club. Quelle id�e avez-vous sur le football alg�rien en g�n�ral et sur le niveau de la super DII en particulier ? Le niveau est forc�ment plus faible qu�en France. N�anmoins, je me suis rendu compte, d�s mon arriv�e, qu�il y a de bonnes individualit�s, des joueurs susceptibles de devenir plus forts. Mais, collectivement, ils sont tr�s faibles sur tous les plans : physique, tactique et mental. Le joueur alg�rien est un joueur d�instinct. Il joue comme il pense, avec ses qualit�s et ne suit pas, le plus souvent, les instructions de l�entra�neur. C�est l� o� r�side le gros probl�me. Il lui faut un peu plus de discipline, d�adaptation au plan de jeu pour pouvoir progresser. En ce qui concerne la super DII, j�ai regard� seulement deux matchs, le derby CSC-MOC en aller-retour de la saison �coul�e. Je trouve qu�il y a beaucoup de duels, beaucoup d�agressivit�, pas beaucoup de jeu technique, de passes courtes. J�ai constat� plut�t de longs ballons et peu de qualit�s dans ce sens. Un jeu physique, beaucoup plus agressif, trop de fautes, de d�chets techniques et d��carts de jeu. Ce n�est pas mon type de jeu � moi, mais je crois qu�il faut s�adapter au jeu des �quipes qui �voluent contre nous. Mais le jeu direct est le style propre au CSC, avec des joueurs peu techniques mais volontaires. La galerie joue un tr�s grand r�le, c�est l�esprit du club� Arsenal aussi joue le jeu direct, mais on ne passe pas le ballon comme �a, � l�aveuglette. On peut arriver de notre camp jusqu�� la surface adverse en cinq secondes, en une seconde si le ballon est pr�cis. Le gardien, � titre d�exemple, quand il d�gage le ballon, il manque sa passe en moyenne huit fois sur dix. �a ne sert � rien. Si l�on peut faire monter le ballon de mani�re directe, avec un minimum de d�chets, 2 ou 3 sur 10 ballons, pour pouvoir tirer, c�est mieux. Les Anglais savent bien le faire. A un mois du coup d�envoi du championnat, ressentez-vous une pression particuli�re par rapport � l��volution de l��quipe � partir du moment o� vous avez entam� votre mission un peu en retard et dans des conditions si difficiles. Comment appr�hendez-vous l�ambiance qui r�gne au club en ce moment crucial d�intersaison ? Aucune pression. J�ai l�impression que les supporters ont l�air d�appr�cier ma venue et me soutiennent pour l�instant. Pas de stress� Non. D�ailleurs, j�ai fait enr�ler mon ancien adjoint � Hajduk : Yovo Cu�kovi�. C�est un bon d�nicheur de joueurs et des jeunes talents. Il excelle dans la pr�paration aussi bien physique, technique que tactique. Nous avons pu d�j� d�nicher deux bons joueurs. Je ne vais pas d�voiler leurs noms avant que la liste des joueurs ne soit arr�t�e et �galement par respect aux autres joueurs. L�un d�eux peut m�me jouer en premi�re division sans aucun probl�me. Il a un avenir prometteur et je pense qu�il va faire mal d�ici deux ans. J�esp�re qu�il r�ussira une grande saison � mes c�t�s. Heureusement qu�on lui a fait signer un contrat de deux ans parce qu�on risque de le perdre d�ici peu au profit d�une �quipe de premi�re division. Il n�est pas au courant de ce que nous pensons de lui (rires) mais il a des aptitudes �normes. J�avais, au d�but, besoin de quelqu�un pour m�aider et le nom qu�on m�a conseill� �tait un coach. J�ai dit clairement au pr�sident qu�il ne devrait en aucun cas intervenir au coaching. Et puis, nous avions pris attache avec Yovo que je connais bien. J�ai opt� �galement pour Fay�al Denni, l�entra�neur des gardiens, qui est en m�me temps mon adjoint. Il parle l�arabe et me facilite certaines choses. Yovo a entra�n� des �quipes en Bosnie, en Serbie, au Kowe�t, en Libye et il conna�t bien la mentalit� arabe. C�est tr�s important. Il me compl�te tr�s bien. Je n�ai pas peur, au contraire, je suis dix fois plus fort qu�au d�but quand j��tais seul. Je trouve que notre couple est assez proche de celui de Laurent Blanc-Jean-louis Gasset � Bordeaux. Laurent applique des id�es propres � lui, impose sa personnalit� et Gasset, lui, donne les bons conseils, fait l�entra�nement� S�agissant des conditions de travail, le pr�sident du CSC m�a honn�tement expliqu� la situation et j�ai accept�, apr�s r�flexion, de travailler avec lui justement pour cette raison d�autant qu�il habite � Lyon et je peux lui faire confiance par rapport � �a. J��tais au courant de toutes les difficult�s : caisses vides, dettes pas de logistique� On veut bien avoir des stars mais comment peut-on les payer ? Ni le pr�sident, ni moim�me avons l�argent pour le faire. Nous comptons sur les recettes du stade, les aides �ventuelles, et c�est pour cela qu�on s�est donn� deux ans. On va essayer durant la premi�re ann�e de faire sortir le club du tunnel, de rendre positifs ses comptes et aussi de construire une �quipe pour l�ann�e prochaine. Et c�est � partir de l� que je devrais intervenir dans l��largissement des ressources financi�res du club et � m�me de recruter des joueurs qui �voluent ailleurs, en France par exemple. Pour le moment, j�essaie de recruter ici. Les salaires propos�s n�arrangent pas ces joueurs d�autant qu�ils ont une mauvaise image de la gestion des clubs alg�riens. Je ne peux pas les convaincre tout de suite. Peut-�tre que si nous r�ussissons une belle saison et qu�ils constatent que nous remplissons les stades, que nous avons de l�argent, que nous respectons les contrats, le payement des salaires�, ils accepte le pari dans un avenir proche. Comment �valuez-vous l�effectif dont vous disposiez jusqu�ici ? Il y a des joueurs talentueux mais malheureusement, ils n�ont pas re�u une formation de qualit�. Je trouve que l��cole de football en Alg�rie n�est pas assez performante. Je vais blesser certains entra�neurs qui ont travaill� avant moi sur la formation de ces joueurs mais, quand vous avez des joueurs de 20 ou 21 ans qui ne ma�trisent pas les gestes les plus simples, contr�le du ballon, jonglage, passes, ils sont tr�s faibles, �a vous renseigne qu�ils n�ont rien appris dans les classes des moins de 18 ans. J�essaie tout simplement de les corriger. Il est vrai que c�est difficile mais je n�ai pas le choix. C�est comme vous apprenez � un gars qui a l�habitude de manger avec sa main gauche � manger avec sa main droite. Il y a un gros travail � faire et la volont� du joueur, seule, ne suffit pas. Nous allons axer notre travail sur les volets technique et tactique et cultiver l�endurance et la r�sistance des joueurs par des exercices au ballon. Le temps presse et nous avons perdu deux semaines de travail sans ballon par rapport � ce qu�il devrait �tre effectu�. Ce sont pratiquement 50 % du travail. Mais, je constate, apr�s une semaine d�entra�nement, qu�il y a un l�ger mieux, surtout sur le plan technique. C�est encourageant. Il me manque encore un stoppeur, un milieu d�fensif et un attaquant. La liste de l�effectif sera boucl�e avant de partir en stage. Demain (samedi, Ndlr), le pr�sident nous confirmera notre destination, Alger, la Tunisie ou autre. Nous appliquerons trois s�ances d�entra�nement par jour sur deux semaines et nous jouerons 4 ou 5 cinq matchs amicaux. Pensez-vous que les jeunes retenus � l�issue des matchs d��valuation vont rapidement �voluer en DII ? Ces jeunes ont besoin encore de perfectionnement, ils ne savent pas se d�placer sur le terrain, ils courent partout. Il faut quand m�me les canaliser et leur imposer plus de rigueur tactique mais ils vont �voluer selon le syst�me que je pr�vois. Je ne peux pas en parler � l�avance parce que ne je sais pas encore qui sont les joueurs qui seront disponibles. Je vais leur laisser le temps d��voluer aux c�t�s des anciens, je sais qu�ils ont des qualit�s. En tout cas, j�adopterai un syst�me qui va avec les joueurs dont je dispose. Bref, c�est le meilleur qui va jouer. Il n�y aura pas de statut particulier, ni pour les anciens ni les autres, sauf exception pour ceux qui font des efforts �normes, qui se battent sur le terrain, qui font preuve d�amour pour ce club et que le public soutient. Personne ne peut �tre titulaire sans rien faire, sans aucun effort. Ils ne me connaissent pas, je suis un entra�neur juste. Justement, la quasi-totalit� des joueurs ne vous connaissent pas. Est-ce un inconv�nient ? Peut-�tre qu�ils ont l�habitude d��voluer aux c�t�s d�entra�neurs qu�ils connaissent mais, en fin de compte, il n�y avait pas de r�sultats. Je croix que conna�tre l�entra�neur ou pas n�est pas un crit�re de r�ussite. J�aimerais ne pas conna�tre un joueur qui serait le meilleur de mon �quipe. Dans le football, tout est possible. J�ai donn� la chance � plus d�une centaine de joueurs, j�ai gard� 20 dont trois gardiens. De jeunes talentueux et potentiellement bons mais qui n�ont pas �t� bien coach�s. C�est �norm�ment difficile pour moi de perdre beaucoup de temps actuellement � les perfectionner. Je vais quand m�me les faire participer mais, je ne peux pas garantir s�ils seront titulaires dans dix matchs ou plus. Quel style souhaitez-vous donner � votre �quipe ? �a sera offensif. Je ne suis pas un coach d�fensif sauf si nous devons jouer contre des �quipes dont l�effectif est plus fort que le n�tre. �a peut arriver en match de coupe contre la JSK ou l�ESS. Je ne vais pas trop m�aventurer. En tout cas, je vais tout faire pour gagner mais peut-�tre d�une fa�on diff�rente. Quelles sont vos ambitions ? Je veux voir les gens de Constantine contents quand ils vont au stade, qu�ils se pressent pour regarder les matchs disput�s par leur �quipe. Tant mieux pour moi si je r�ussi l�accession avec l�effectif que j�ai, qui n�est, d�ailleurs, pas tr�s performant. Je vous laisse conclure. Constantine est une ville agr�able et je me sens bien. Je suis tr�s content m�me. J�ai h�te de commencer pour voir l��quipe �voluer, j�ai h�te de remplir les stades, j�ai h�te de gagner des matchs. Le club a besoin d�argent pour progresser. Je veux d�velopper avec le pr�sident une strat�gie de marketing pour faire des rentr�es d�argent au club. Il faut intervenir imm�diatement pour le prot�ger et mettre fin aux commerces de rue qui exploitent son label. Tous les supporteurs sont ainsi appel�s � aider leur club. Et ils peuvent le faire en achetant le billet d�entr�e. Tant mieux s�ils ach�tent des maillots, des casquettes, des �charpes� Sur un autre plan, je vais imposer aux joueurs une sorte de charte qu�ils doivent imp�rativement respecter. Le joueur doit respecter son co�quipier, son coach, les dirigeants du club, les supporteurs, les couleurs du club, l�arbitre, l�adversaire. Il doit respecter aussi les horaires d�entra�nement. Il doit d�velopper un esprit collectif, un esprit d��quipe tout simplement.