Les grands transferts hydrauliques, initiés dans la wilaya de Sétif pour satisfaire les besoins en eau potable et apporter un surcroît de ressources pour l'irrigation, constituent l'opération structurante la plus prometteuse pour une région qui entend bien faire refleurir ‘‘Mohamed El Bachir'‘. ‘Mohamed El Bachir'‘, ce blé dur de très haute qualité qui attira comme des mouches, dès les premières années de l'occupation française en Algérie, de nombreux colons parmi lesquels François Audureau, délégué colon à Sétif de 1904 à 1920, minotier, fabriquant de pâtes alimentaires, l'un des plus gros céréaliculteurs de la région durant la période coloniale avec Salomon Lévy et Achille Sèbe. La wilaya de Sétif, connue pour son terreau noir particulièrement généreux, qui donna son nom à la capitale des Hautes plaines (le nom de Sétif provient du terme Azdif, ou ‘‘terre noire'‘ en berbère), peut légitimement aujourd'hui, grâce aux moyens colossaux mis en place par l'Etat pour réaliser les grands transferts, envisager de retrouver son statut de ‘‘grenier de l'Algérie'‘. Qualifié de projet du siècle au regard de son impact sur le devenir des Hautes plaines sétifiennes (plus de 40.000 hectares supplémentaires seront irrigués) et de son coût (plus de 160 milliards de dinars en comptant les raccordements de 34 communes sur les 60 de cette wilaya), ce mégaprojet, lancé en 2010, aura atteint, durant l'année qui s'achève, une phase décisive avec l'achèvement et la réception de deux nouveaux barrages, à Mahouane, tout près de Sétif, et à Draâ Eddis, non loin d'El Eulma. Ce projet regroupe deux aménagements distincts. Le premier, dit ‘‘transfert Est'‘, acheminera annuellement près de 190 millions de m3 depuis le barrage de Tabellout (Jijel) vers le nouvel ouvrage de Draâ Eddis (137 millions de m3), via 42 km de conduites, cinq stations de pompage et un tunnel de 13 km. Le second aménagement, appelé ‘‘transfert ouest'‘, déversera quelque 119 millions de m3 par an dans le nouveau barrage, également réceptionné, de Mahouane (7 km au Nord-ouest de Sétif), d'une capacité de retenue de 148 millions de m3, en provenance de l'ouvrage d'Ighil Emda (Bejaia), à travers 22 km de conduites et trois stations de pompage. Le système de transfert ouest (Ighil Emda-Mahouane) sera entièrement opérationnel ‘‘courant 2014'‘, affirme le directeur de wilaya des Ressources en eau, Charef Menad, tandis que le second (Tabellout-Draâ Eddis) le sera au premier semestre de 2015. Le retard accusé par ce dernier transfert est dû à un impondérable lié à un phénomène d'effondrement et de dégradation des voussoirs, causé par la nature du sol, survenu sur le point métrique (PM) 1.575, et qui a nécessité un traitement de plus de quatre mois par le groupement d'entreprises franco-italien (Ravel et CMC Ravena) chargé de la réalisation du tunnel. En termes d'impact, ces grands transferts qui achemineront annuellement plus de 320 millions de m3, permettront, outre l'alimentation en eau potable de 34 communes où vivent 80 % de la population de la wilaya, d'irriguer 20.000 hectares dans la région d'El Eulma, connue pour les terres particulièrement fécondes de Bazer-Sakra, et 16.000 hectares du périmètre des Hautes plaines sétifiennes. Cet acquis considérable constitué, en plus des deux nouveaux barrages, d'un important système de conduites et de tunnels, de galeries, de canaux de liaison et de stations de pompage, permettra, au plan agricole, de quintupler la production agricole dans la wilaya de Sétif, tout en réduisant la jachère, et d'augmenter la production nationale de l'ordre de 20 %. De plus, ce qui ne gâte rien, 100.000 postes de travail dans l'agriculture seront créés dans le sillage de ce projet qui donnera une nouvelle vie - les Sétifiens en restent convaincus - à Mohamed El Bachir.