En plus d'absence de débouchés rares durant leurs activités, ils ne sont régis par aucune réglementation qui puisse les protéger des aléas de la vie. Même si certains ont réussi dans leur art, la vie leur a joué des tours. C'est le cas du grand chanteur Ahmed Wahby, dont les chansons Fet Elli fat, Yamna, Wahran Wahran, sont reprises par des jeunes. Ahmed Wahbi, qui avait fondé la troupe musicale du FLN, est mort à Alger le 29 octobre 1993 dans une quasi-indifférence. Rezkellah Djilali, dit Djilali de Raina Rai, connu essentiellement par les chansons Ya Zina Diri Latay, Hagda, Lala Fatima ou encore Raïna Hak, avait souffert en silence durant plusieurs mois d'un cancer. Il n'avait pas l'argent nécessaire ni les relations qu'il fallait pour se soigner ou bénéficier d'une prise en charge à l'étranger. Il a eu comme seul soutien celui de ses fans et de ses amis artistes algériens qui ont mené une campagne sur le net en sa faveur et lancé une collecte d'argent afin de lui payer les médicaments et aider sa famille. Il est décédé le 6 novembre 2010 dans l'indifférence. C'est également le cas de la chanteuse Zoulikha, qui a beaucoup souffert de la même maladie avant de nous quitter. Mohamed Lazreg, cet artiste peintre avait réalisé, en 1956 au camp de concentration d'Aflou, le sigle de l'UGTA. Il avait connu plusieurs personnalités dont Bachir Boumaza, Youcef Briki, Démène Debbih Abdallah, Omar Aïssani, Amar Ghzalli, Mahieddine Harcha. Il nous avait déclaré : «On parlait de l'avenir du pays, du syndicat... cela m'a inspiré pour réaliser le sigle qui existe jusqu'à présent.» Ceci avait commencé par une sandale qui ne tenait plus à son pied, alors l'idée lui est venue de graver ce dessin du sigle sur la semelle, et c'est parti ! Il confectionna alors un cachet à l'aide d'une lame de rasoir. Artistes en prison La soif d'apprendre ou la soif tout court ! «Lorsque quelqu'un parle beaucoup de révolution, c'est qu'il ne l'a pas faite. La même chose aussi pour la peinture… Celui qui est rassasié de quelque chose n'a pas besoin de le démontrer. On joue aussi le chef lorsqu'on ne l'est pas... et moi, ma soif, c'était la Révolution et l'art pictural qui collaient à ma peau». C'est en prison que Mohamed Lazreg s'est perfectionné dans la peinture. Ses thèmes favoris étaient le quotidien de la vie en prison et les traditions algériennes. Il est mort dans l'anonymat comme beaucoup d'autres artistes.