Ils sont profs, sans mettre un pied dans une salle de classe, ils parviennent à transmettre leur savoir. Ils enseignent à des centaines de milliers d'élèves à distance. On ne les appelle pas «Monsieur» ou «Madame», mais des enseignants «youtubeurs». Des compagnons virtuels à la disposition des candidats au bac pour les aider à faire une excellente préparation par vidéo et supports écrits multimédia sur youtube. Leur originalité est qu'ils sont bien loin des vieilles photocopies des manuels et des cahiers de cours. Loin des enseignants qui parlent avec un ton parfois ennuyeux entre deux à trois «chut !». C'est carrément une autre pédagogie, une autre méthode d'enseignement. En effet, que ce soit pour donner des cours de physique, d'histoire, de philosophie ou de mathématiques, ces vidéastes ont tous quelque chose en commun : un ton plus fluide, moins rigide, usant parfois d'un vocabulaire plus réceptif chez les ados, et un humour omniprésent. Les élèves s'y sont adaptés. Ils sont des centaines à adopter cette nouvelle formule de tutorat en ligne. Quelques-uns sont abonnés aux chaînes pour suivre continuellement et tout au long de l'année scolaire leurs leçons. Moulay Amer, professeur de physique, a, à lui seul, plus de 41 937 abonnés et près de 70 000 vues pour chaque vidéo (leçon). L'autre prof-star des ados est Noreddine. Les élèves en sont «fans». Ils se partagent entre eux, sur leur compte facebook, ou téléchargent directement ses vidéos sur leurs smartphones. Certaines de ses podcasts ont atteint les 100 000 «vu». «J'ai obtenu un 16/20 en mathématiques à l'examen du bac sciences 2015 en suivant ses cours», témoigne Massilia qui a fait l'expérience de l'école virtuelle l'année dernière avec ce «youtubeur». Comme elle, d'autres élèves ont été séduits par ses méthodes «très faciles pour assimiler les cours les plus compliqués». Mieux encore, lorsqu'il y a grève ou absentéisme, les élèves ont trouvé leur plan B : youtube. Pour beaucoup, c'est même un plan A, notamment pour ceux qui n'ont pas les moyens de se payer des cours de soutien à plus de 2000 DA/h. «C'est une méthode simple et efficace. Il suffit d'avoir un ordinateur ou un smartphone et être branché à internet», s'est réjoui un parent d'élève qui a lui-même suggéré l'astuce youtube à ses enfants. Simple, parce que le lycéen peut se permettre des pauses à tout moment, arrêter et revenir en arrière s'il n'a pas saisi un détail, et surtout choisir la leçon où il veut améliorer son niveau. Inspirée des Américains En somme, il est clair que l'initiative des enseignants «youtubeurs» est louable à plus d'un titre. Ils ont compris au fait que la nouvelle génération, celle qui a grandi avec internet, est plus captivée par la vidéo et l'image. Ils l'ont compris et ont aussitôt mis en application cette méthode qui vient tout droit des Etats-Unis. En 2000, effectivement, des professeurs de sciences ont mis en ligne les premières vidéos de leurs cours. Ils ont connu un franc succès dès les premiers postes. Dans un sondage réalisé par le réseau américain, Filipped Learning Network, pour démontrer l'efficacité de la méthode du tutorat en ligne, sur 450 enseignants, 88% d'entre eux avouent être plus efficaces et heureux avec cette méthode de travail. Côté élèves, 67% des sondés ont dit avoir eu de meilleures notes. En Algérie, cette initiative prise par des enseignants «soucieux du devenir des élèves» n'a pas encore attiré l'attention du ministère de l'Education nationale. Il en a tout intérêt…