Le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, n'a pas manqué l'occasion que lui offre la célébration, aujourd'hui, de la double fête nationale de l'Indépendance et de la jeunesse, de charger la France coloniale. Dans un long discours parsemé de rappels historiques, le chef de l'Etat a été particulièrement caustique à l'égard de la France coupable de «massacres, de tentatives d'extermination de nos ancêtres, de spoliation de leurs terres et d'une tentative d'éradiquer notre culture et notre identité…» Il y a invité la jeunesse algérienne à jeter un regard «rétrospectif» sur le passé de leur pays pour y puiser une stratégie d'avenir, parce que, écrit le Président, cet exercice «est d'abord un devoir de mémoire à cultiver pour que notre peuple se souvienne au fil de ses générations qui se succèdent, du prix de son indépendance et de sa liberté». Tout au long de son message, le Président a pris le soin de connecter la jeunesse algérienne à l'histoire douloureuse de son pays sous domination française, en y mettant les mots sur les maux. «Nous devons aussi faire connaître à nos enfants les répressions barbares qui ont frappé leurs ancêtres, chaque fois qu'ils ont tenté de briser le joug colonial, allant jusqu'aux déportations de milliers d'Algériens au-delà des océans», souligne Abdelaziz Bouteflika. Avant d'asséner que les «générations montantes doivent connaître également l'embrigadement forcé de nos compatriotes dans les troupes du colonisateur, au fil des guerres que celui-ci a livrées ou qu'il a subies, les dizaines de milliers d'Algériens tombés en Europe, notamment pour la défaite du nazisme, mais aussi les massacres de leurs parents, ici en Algérie, en mai 1945, alors que le monde fêtait la victoire sur le nazisme». Le chef de l'Etat a noté le caractère «exceptionnel» de la Révolution de Novembre par le «lourd tribut que notre vaillant peuple a versé, avec un million et demi de martyrs». Pis encore, le président Bouteflika a usé d'un terme peu commun dans ses discours en évoquant des «camps de concentration» où la France coloniale a parqué des millions d'Algériens. Camps de concentration Il s'est fait fort de décrire ce que fut la longue nuit coloniale dans toute sa cruauté, histoire de secouer une jeunesse qui pourrait être tentée de passer l'éponge. C'est pourquoi le président Bouteflika appelle «les responsables du système national d'enseignement, les chercheurs, ainsi que les hommes et les femmes de lettres et de culture, à redoubler d'efforts pour enseigner et faire connaître davantage notre Histoire et notamment celle du recouvrement de notre indépendance, car l'Histoire est une source de fierté et d'unité nationales, et un puissant levier mobilisateur pour toutes les nobles causes, dont celle du développement national». Et comme pour clore le réquisitoire contre la France coloniale et réitérer la ligne de défense de l'Etat algérien, le Président a opportunément rappelé que l'Algérie «prit des mesures légitimes en vue d'intégrer au domaine de l'Etat les biens individuels et collectifs demeurés vacants au lendemain de l'Indépendance». Il explique que cette démarche «a une relation avec ce que fit le colonisateur, au cours des années quarante du siècle dernier, des biens des populations de notre pays, elle a induit une mesure irréversible qui fait désormais partie intégrante de notre législation contemporaine». Et dans sa volonté d'instiller «l'esprit novembriste» aux jeunes Algériens grâce à ces rappels historiques, le chef de l'Etat ne s'est pas empêché de lancer un appel à cette catégorie de réaliser «un sursaut pacifique et généreux pour gagner la bataille du développement». Abdelaziz Bouteflika précise dans son message que cette «bataille est au-dessus de tous les clivages politiques, idéologiques ou de quelque autre nature qu'ils soient, car c'est tout simplement la bataille de votre propre avenir, jeunes de mon pays, la bataille du devenir de l'Algérie». Tout comme il prend soin de souligner que son appel à la mobilisation de la jeunesse «est dénué de tout paternalisme» et qu'il est celui «d'un de vos aînés qui a consacré sa jeunesse et toute sa vie au service de la patrie».