La 41e Conférence des Comités de soutien européens au peuple sahraoui (Eucoco) a clos ses travaux, samedi soir, à l'auditorium de Vilanova à Barcelone, après deux jours de travail et de débats aussi émouvants que passionnants. La déclaration finale ne manque pas de causticité. Et comme il fallait s y attendre, l'Eucoco a tenu à «répondre» à la Justice espagnole, qui a tenté de chahuter l'événement en exhumant une sombre plainte, d'une tout aussi ténébreuse association sahraouie des droits de l'homme contre le président Brahim Ghali, l'accusant de «génocide». L'Eucoco adresse «…un vibrant message de soutien au nouveau président de la Rasd, Secrétaire général du Polisario, Brahim Ghali, qui a été visé par des manœuvres judiciaires instrumentalisées par la propagande marocaine», lit-on dans la déclaration finale. Pour les quelques 300 participants, venus de Hongrie, France, Italie, Allemagne, égypte, Portugal et du Swaziland entre autres, cette plainte s'inscrit dans la «lignée des actes de répressions adoptées par toutes les puissances coloniales à l'encontre des leaders des mouvements de libération». Et à l'Eucoco de rappeler que même le mythique Nelson Mandela était estampillé «terroriste» et était interdit d'entrée aux états-Unis. Il constate que le Maroc est entré dans un «cycle de provocation» vis-à-vis de l'ONU, en décidant, notamment, d'expulser la composante civile de la Minurso, le refus d'accès aux territoires occupés pour le SG de l'ONU et de dresser des «obstacles» à son envoyé spécial, Christopher Ross, pour l'accomplissement des sa mission. Plus grave encore, l'Eucoco souligne la rupture inédite, en août 2016, de l'accord de cessez-le-feu signé en 1991 sous l'égide de l'ONU et de l'OUA. Mais face à cette escalade de transgressions et de provocations, la conférence salue la «maturité» et ses représentants qui maintiennent l'exigence d'une «intervention pacifique» conforme au droit international et aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité. Pour autant, l'Eucoco n'a pas manqué d'appeler l'Union européenne, premier pourvoyeur économique et financier du Maroc, à «assumer d'urgence» ses responsabilités pour la décolonisation du Sahara Occidental et mettre fin à «40 ans de complicité». Dans le même ordre d'idées, l'Eucoco exhorte l'UE à prendre ses distances clairement avec les «agissements marocains qui cherchent à impliquer des pays membres dans des opérations de brigandage international que constitue le pillage éhonté des ressources naturelles, environnementales et culturelles du Sahara Occidental». De la même manière, le comité européen de soutien au peuple sahraoui appelle l'UE «à joindre sa voix à celles des Nations unies et de l'Union africaine» pour exiger du Maroc le respect des droits de l'homme. Il lui rappelle, également, ses obligations d'aide humanitaire, «en quantité et en qualité», aux réfugiés des camps de Tindouf, à travers l'office d'aide humanitaire et protection civile de l'Union européenne (Echo). Au plan international, l'Eucoco réclame du nouveau Secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, à conduire, «à terme, sans délai, la décolonisation du Sahara Occidental, en permettant au peuple sahraoui d'exercer librement son droit à l'autodétermination, mettre fin à la colonisation, au pillage de ses richesses, à la répression et aux emprisonnements». Pour ce faire, l'Eucoco exige urgemment le «retour complet de la composante civile de la Minurso et son rétablissement dans ses fonctions». L'occasion pour la conférence de «saluer la résistance des populations civiles, qui affrontent courageusement la répression toujours aussi violente de l'occupant marocain», et réitérer la demande d'étendre le mandat de la Minurso à la protection des droits de l'homme. Manœuvres marocaines Une occupation verte reste… une occupation aux grandes puissances - dont la France - qui veulent requinquer cette image, pas très glamour, du royaume à l'international, l'Eucoco réplique, sentencieuse qu'«Une occupation verte reste une occupation». Une allusion décapante à la COP22, que la France à sous-traitée au Maroc pour permettre à son roi M6, de jouer dans la cour des grands, le maître de cérémonie à Marrakech. La conférence, dirigée par Pierre Galland, a enfin dénoncé les «manœuvres marocaines», visant à «parasiter» l'Union africaine, par son projet d'intégration, alors même que la Rasd y est membre à part entière. Voilà une déclaration finale de la 41e Eucoco, qui aura tenu toutes ses promesses en dépit du coup bas de la Justice espagnole contre le président Ghali. Ce fut, au bout du compte, un coup d'épée dans l'eau, puisque la conférence a été un grand succès dans cette charmante et accueillante ville côtière de la Catalogne, où la cause sahraouie est portée à bras le corps. Pour la 42e édition, les organisateurs ont promis de déplacer le débat à Paris, où le Maroc est pratiquement chez lui et évoluera, donc, à domicile… Une ONG britannique dénonce le Maroc L'ONG britannique War On Want, qui milite pour les droits de l'homme, a déclaré que le Maroc, puissance occupante du Sahara Occidental, «cache la réalité du déni des droits des Sahraouis à l'autodétermination». «Elles (les autorités marocaines) cachent la réalité de l'occupation, elles cachent la réalité de la répression, elles cachent la réalité du déni des droits des Sahraouis à l'autodétermination», a déclaré Hamza Hamouchene, le responsable principal des programmes de War On Want pour la région de l'Afrique du Nord et de l'Asie de l'Ouest, dans un entretien, vendredi, au quotidien américain Democracy Now. M. Hamouchene, qui a participé à des événements à Marrakech (Maroc), en solidarité avec le peuple sahraoui, a été empêché par les autorités marocaines d'entrer à Laâyoune occupée. Le militant a été informé par la suite que «des instructions spécifiques ont été données en haut lieu» pour l'empêcher d'y accéder. Il a été ensuite conduit de force vers Agadir et avait été soumis, à plusieurs reprises, à un contrôle de police pendant le trajet par taxi. «Cet épisode n'est qu'un exemple de la façon dont la monarchie du Maroc, le Makhzen, le roi et le groupe qui l'entoure, cachent l'occupation du Sahara Occidental aux personnalités internationales participant à la COP22», a-t-il expliqué au quotidien américain. La COP22, qui a pris fin, vendredi en fin de journée, à Marrakech, «a constitué l'occasion pour les autorités marocaines de dissimuler leurs crimes, leur répression et leur autoritarisme», a-t-il dit. «Alors qu'il se présente comme le champion des énergies renouvelables», le Maroc est en train de commettre des crimes environnementaux à travers des politiques industrielles, qui ont eu un impact négatif sur l'environnement», a souligné Hamouchene. Le militant de cette ONG a souligné que «les Sahraouis sont, aujourd'hui, affectés par l'injustice environnementale et par les politiques néolibérales de la monarchie du Maroc, appelant à ce titre le dernier rapport de l'observatoire des ressources naturelles du Sahara Occidental, qui a révélé comment l'énergie verte, produite par le Maroc dans les territoires occupés, est utilisée dans le pillage des minerais sahraouis». En décriant le soutien diplomatique apporté par certains pays, comme la France à l'occupant marocain, le responsable de War On Want a estimé qu'il était essentiel d'exercer des pressions sur les bailleurs de fonds et les multinationales responsables de ce pillage pour arrêter l'exploitation illégale des ressources naturelles du Sahara Occidental. De notre envoyé spécial à Vilanova (Barcelone)