Il y a comme ça dans la vie de tous les jours, dans les juridictions, des justiciables qui se battent pour des bribes. Alors certains juges font avec et ne tombent jamais dans le piège de fortes et émouvantes déclarations où les larmes de crocodile font office de témoins oculaires. L'affaire du jour oppose à Sidi M'hamed, Alger, deux voisins qui ont des choses à dire et à entendre. La juge, elle, a entendu et décidé. Deux antagonistes sont à la barre devant Khadidja Khouaouana, la présidente de la section correctionnelle du tribunal de Sidi M'hamed, Alger. La victime, un pépé qui a l'âge de l'inculpée à la voix vive, inculpée de propos que la victime avait répétés devant la juge : «Elle m'a placé dans l'image de Satan et pour moi c'est pire qu'une injure», avait dit à haute voix lui aussi, l'homme qui n'a pas omis de signaler que cette dame ne veut pas comprendre que nous avons déjà une affaire en justice... - «De quelle nature ?», coupe la présidente qui apprendra alors qu'une affaire de référé est pendante en prenant le soin d'ajouter : «Dieu merci ! Nous avons une justice. Pourquoi a-t-elle peur de ses décisions ?», enchaîne le vieillard le cœur plein qui avait tant de choses à balancer dans une salle archicomble et où travailler est un supplice. Noureddine Sayeh, le jeune représentant du ministère public, met son grain de... poivre blanc en rappelant que tout propos désobligeant, insulte, injure sont punis par la loi. Il va sermonner durant sept minutes tout inculpé qui croit ignorer que «nul n'est censé ignorer la loi». Il se leurre car il se heurte aux termes de l'article 299 du code pénal qui stipule entre autres que «toute injure commise contre un ou plusieurs personnes est punie d'un emprisonnement d'un à trois mois et d'une amende de 10 000 à 25 000 DA. Le pardon de la victime met fin aux poursuites pénales. «Et cet article de loi ayant été reconduit par la loi n° 06-23 le 20 décembre 2006, avec une modification autour de la peine de prison auparavant (loi n° 882-04 du 13 février 1982) six jours à trois mois et de l'amende qui était fixée de cent cinquante dinars à mille cinq cents dinars. C'est dire la gravité du délit de l'injure. La présidente, réputée comme étant une machine à distribuer les peines, n'allait pas s'éterniser sur ce dossier surtout que l'inculpé, fort âgé, s'est vaillamment défendu et ce sera sa propre défense qui sera à la base de sa relaxe au bénéfice du doute, à l'issue d'une courte mise en examen. La victime ne s'étant pas présentée le jour de la lecture de la décision de la présidente n'avait pas eu le désespoir de voir le ravissement du vieux relaxé qui pavoisait.