La Tunisie refroidit dans l'incertitude, pendant que l'Afrique du Nord et un peu moins les pays arabes du Moyen-Orient s'enflamment sur… sur le net. Les raccourcis «analogiques», qu'ils tiennent de l'espoir ou du phantasme, ont ceci de commode : ils viennent à bout de toute retenue. En Algérie, où les événements de Tunisie et surtout leur issue ont été suivis avec une attention particulière, la toile électronique est en folie. Pour plein de raisons, jamais les Algériens n'ont parlé autant de leurs voisins de l'est en dehors des confrontations sportives qui ont eu à réunir les deux pays. Premier constat, il y a presque autant de voix qui se sont exprimées pour conjurer le sort que pour redouter un même scénario pour les deux pays. Les premiers tiennent leurs appréhensions de l'«expérience algérienne» d'octobre, de ses prolongements politiques et surtout de la tragédie qui en a suivi. S'ils conviennent que la trajectoire empruntée par le pays depuis a été plus qu'une désillusion en raison des drames incommensurables qui en ont résulté, ils ne sont pas pour autant enthousiasmés par son renouvellement dans les conditions d'il y a vingt deux ans qui ressemblent quand même un peu à celles de la Tunisie d'aujourd'hui. Même si ça ne se voit pas beaucoup, tout cela bat en brèche la comparaison faite aujourd'hui dans la foulée de la contestation sociale survenue simultanément dans les deux pays : la Tunisie qui a renversé Zine El Abidine Ben Ali ressemble plus à l'Algérie qui a destitué Chadli Bendjedid qu'à celle d'aujourd'hui. Second constat, les conditions pour le moins confuses et, il faut bien le dire, la précipitation des événements n'a paradoxalement pas soulevé beaucoup d'interrogations au sein de l'opinion. La protestation, quoi qu'on dise, n'a pas atteint l'ampleur qui pouvait présager un tel aboutissement, l'encadrement politique des manifestations était quasiment inexistant et l'armée n'a, officiellement du moins, n'a pas poussé le président tunisien vers la porte de sortie. Sans doute que la rue tunisienne, sans doute trop «agréablement» surprise par la rapidité du «dénouement», n'a pas inspiré de doute à ceux qui l'observent de l'extérieur. On ne va quand même pas, à partir d'Alger et des autres villes d'Algérie, jouer aux rabat-joie avec des voisins survoltés par la victoire. Dernier constat enfin, les Algériens ont relevé avec un certain bonheur que les islamistes, s'ils étaient totalement absents de la révolte, ne sont pas définitivement écartés des perspectives de reconstruction. Ils mettent alors en garde leurs voisins contre le péril. En oubliant tout de même de dire que ce n'est pas le moindre des mérites de… Ben Ali. On ne joue toujours pas aux rabat-joie. Cet e-mail est protégé contre les robots collecteurs de mails, votre navigateur doit accepter le Javascript pour le voir