Pour son premier test aux commandes du Maroc, Eric Gerets prend ses responsabilités. Le sélectionneur belge assume la carte blanche accordée par la fédération pour asseoir ses décisions. Comme celle de laisser en France Abdelhamid El Kaoutari et Karim Aït Fana et de se passer de Mounir El Hamdaoui. Mais pour le choc du 27 mars face aux rivaux maghrébins, Gerets compte également sur sa nouvelle génération. Le déplacement à Annaba en qualifications pour la CAN 2012 constitue plus qu'un simple révélateur pour les nouveaux Lions de l'Atlas de Gerets qui, pour ce combat, fait confiance à une nouvelle génération offensive symbolisée notamment par Younès Belhanda, attaquant de Montpellier. Appelé pour la première fois en novembre 2010, en Irlande du Nord, un mois après son «choix du cœur», le prodige franco-marocain a alors impressionné le Lion de Rekem. «On aurait dit que cela faisait déjà des années qu'il était en sélection», avait lâché l'ancien entraîneur de Marseille. A 21 ans, il confirme cette saison une réputation née en mai 2009 en finale de Coupe Gambardella, remportée 2-0 par son club formateur face au FC Nantes. «Par son volume de jeu, sa maturité et sa technique, il a le bagage pour évoluer au milieu comme sur l'aile. Il me fait penser à Robert Pires», avait osé comparer René Girard, l'entraîneur du MHSC. Deux ans plus tard, Belhanda assume et permet même à Gerets d'envisager un nouveau dispositif. Les patrons du milieu Reconverti face au Niger en février dernier à un poste inhabituel de demi défensif, le Montpelliérain a plané sur le match amical de préparation. Entreprenant, technique, intelligent dans ses choix, il permet à l'entraîneur belge de repositionner Houssine Kharja en milieu offensif, son poste de prédilection, en associant Belhanda à Adil Hermach à la récupération. La formule est séduisante. «C'est clair que j'aime bien être un milieu de terrain un peu libre, j'aime bien apporter un apport offensif», confirme la nouvelle valeur sûre de l'Inter Milan, arrivé du Genoa en Lombardie en janvier, et reconverti milieu défensif pour la bonne cause en sélection, «car on a beaucoup de bons joueurs offensifs». Au rayon de l'animation offensive, la victoire face au Niger (3-0) a également apporté d'autres tendances. Sous l'ère Gerets, Mbark Boussoufa s'impose comme un patron. Longtemps mal à l'aise en sélection, l'ancien Soulier d'Or belge sous le maillot d'Anderlecht a justifié la confiance placée en lui par son sélectionneur. Auteur d'un doublé, la nouvelle recrue du FC Anzhi Makhachkala, en première division russe, devient incontournable et son association avec Adel Taarabt peut rapidement permettre aux Lions de l'Atlas de «redorer le blason du football marocain», comme l'espère Hermach. Fraîchement élu joueur de l'année en D2 anglaise avec les Queen's Park Rangers, Taarabt, ex-pensionnaire du centre de formation du RC Lens revit sous les couleurs des Hoops. Avec 15 buts et autant de passes décisives en 37 matches de Championship, il a confirmé face au Niger la nouvelle dimension acquise en Angleterre Encore inconstant et abusant des dribbles, l'ancien remplaçant de Tottenham, 21 ans seulement, est une arme de percussion massive à manier avec science. «Il pourrait gagner n'importe quel match dans n'importe quel championnat au monde, mais peut également en faire perdre si vous ne savez pas comment l'utiliser», explique son entraîneur en club Neil Warnock. Le Zizou de l'Atlas Ancien international français U21 de futsal, renvoyé du centre de formation du SM Caen avant d'y revenir en réserve puis chez les professionnels après une rédemption réussie de trois ans en CFA, Youssef El Arabi est une autre munition précieuse pour Gerets, amateurs d'artistes imprévisibles. Le buteur normand, auteur de 14 réalisations en Ligue 1, a choisi de défendre les couleurs marocaines parce que «le nouveau projet avec le nouveau coach m'a plu», selon ses propres termes. Il apporte à sa sélection des atouts nés lors de sa formation sur les parquets. «Devant les cages, Youssef retrouve l'aisance du football en salle, où il faut très vite réagir car l'adversaire est tout de suite sur vous», analyse Henri Emile, actuel intendant de l'équipe de France, qui a connu le phénomène lors des années Futsal. «Il a gardé cette maîtrise de l'espace. Quand je le vois, il me fait penser à Zinedine Zidane mais aussi aux Brésiliens par sa façon d'utiliser la semelle pour contrôler le ballon ou de se servir de son corps pour feinter.» Comme Mehdi Carcela (21 ans), génial technicien du Standard de Liège, et l'ailier d'Herenveen Oussama Assaidi (22 ans) sont déjà bien intégrés, Gerets doit avant tout se soucier de rechercher le bon équilibre et la hiérarchie adéquate dans cette nasse de talents. La matière première est de bonne qualité, reste à concevoir un produit fini compétitif.