Les menaces que font peser les islamistes extrémistes sur l'issue des bouleversements en cours dans plusieurs pays du Moyen-Orient et du Maghreb se précisent. En effet, le nouveau numéro 1 d'Al-Qaïda, l'Egyptien Ayman al-Zawahiri, appelle à la fois les Libyens à fonder le nouveau régime sur la chari'a et les Algériens à se révolter à leur tour, à l'instar des Tunisiens, des Egyptiens, des Syriens, des Libyens et des Yéménites. Cet appel a été lancé à travers une vidéo diffusée mardi dernier et authentifiée par le centre américain de surveillance des sites islamistes (Site). Dans cette vidéo d'un peu plus de 13 minutes, enregistrée en août ou septembre, d'après le Site, il félicite le «peuple en Libye pour sa victoire contre le tyran» Mouammar El Gueddafi. En tenue blanche, assis sur un fauteuil couvert d'un drap, Zawahiri, dont la tête est mise à prix par les Américains (25 millions de dollars), qualifie l'organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN) de «gang occidental» dont le but premier serait de forcer les libyens à «abandonner l'islam», et les presse d'adopter la chari'a comme base du régime post-El Gueddafi. «Faites attention aux complots de l'Occident et de ses sbires au moment où vous bâtissez votre nouvel Etat. Ne leur permettez pas de vous tromper et de vous priver du résultat des sacrifices et des souffrances endurés», lance-t-il. Le successeur d'Oussama Ben Laden à la tête d'Al-Qaïda appelle également «le peuple d'Algérie à suivre» l'exemple libyen. «Vos frères en Tunisie puis en Libye ayant jeté leurs tyrans aux poubelles de l'Histoire, pourquoi ne vous révoltez-vous pas contre votre tyran ? dit-t-il aux Algériens. Ces déclarations interviennent alors que l'Algérie fait face depuis plusieurs mois à une multiplication des attaques terroristes revendiquées par la branche d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). Le 26 août dernier, un attentat kamikaze qui avait pris pour cible l'académie interarmées de Cherchell, dans la wilaya côtière de Tipaza, a fait 18 morts parmi les élèves officiers et les voisins de la caserne. C'est l'attaque la plus meurtrière de ces dernières années. Le 24 septembre, l'aérodrome Ferhat-Abbas de Jijel a été ciblé par un tir de roquette avec un lanceur type RPG7, sans heureusement faire de victime ou de dégâts matériels importants. La semaine passée, plus exactement le jeudi 6 octobre, deux soldats de la marine ont été tués dans un attentat à la bombe survenu à Azeffoun, dans la wilaya de Tizi Ouzou. La recrudescence des actes terroristes à de quoi inquiéter. Aussi, depuis la chute de Tripoli, fin août, Alger a publiquement fait part de ses vives inquiétudes quant à la possible déstabilisation de la région par Aqmi, notamment à cause de l'important stock d'armes laissé à disposition par l'ancien régime libyen. Entre 5000 et 10 000 missiles sol-air, selon les estimations des nouvelles autorités libyennes et de l'OTAN, ont disparu en Libye, et des rumeurs persistantes arguent qu'elles seraient tombées entre les mains des djihadiste. Selon un document du Centre d'études stratégiques et internationales de Washington, daté de septembre, Aqmi «a manœuvré discrètement pour avoir un plus grand rôle stratégique dans le Sahel et, en profitant du chaos dans la région, étendre son influence au-delà de sa base algérienne».