Des combats meurtriers ont opposé lundi soldats et rebelles en Syrie malgré la détermination affichée par le président Bachar al-Assad de mettre fin "à n'importe quel prix" à la crise, qui a été au menu d'un sommet entre la Russie, son principal allié, et l'Union européenne. Lors de ce sommet organisé à Saint-Pétersbourg, le président de l'UE Herman Van Rompuy a pressé le président russe Vladimir Poutine de surmonter les divergences afin d'éviter une guerre civile en Syrie. Il a souligné qu'il fallait saisir l'opportunité représentée par le plan de sortie de crise de l'émissaire de la Ligue arabe et de l'ONU Kofi Annan, resté jusqu'ici lettre morte. "L'Union européenne et la Russie ont des approches différentes mais nous sommes pleinement d'accord pour considérer que le plan Annan offre la meilleure chance de stopper le cycle de la violence en Syrie, d'éviter la guerre civile et de trouver une solution pacifique et durable", a-t-il déclaré. "Nous devons œuvrer à l'arrêt immédiat de toute forme de violence en Syrie et à un processus de transition politique", a ajouté M. Van Rompuy. M. Poutine, qui écarte toute sanction de l'ONU contre le régime de Damas, de même que le départ de M. Assad, n'a pas réagi à l'évocation de cette "transition politique". Fort de cet appui russe jusqu'à présent indéfectible, Bachar al-Assad a réaffirmé dimanche dans son premier discours depuis janvier sa détermination à écraser la révolte populaire ayant éclaté en mars 2011. Ne reconnaissant pas l'ampleur de la contestation, il a prévenu qu'"il n'y aurait pas de compromis dans la lutte contre le terrorisme", que la sécurité du pays était "une ligne rouge" et qu'il défendrait la Syrie "à n'importe quel prix". Il a par ailleurs nié tout lien avec le massacre de Houla (centre) dans lequel 108 personnes dont 49 enfants ont péri le 25 mai, soulignant que ses auteurs étaient des "monstres". Mais lundi le porte-parole de la Maison Blanche Jay Carney l'a accusé de mentir. Lundi, sur le terrain, les violences ne faiblissaient pas, faisant encore au moins 35 morts -- 17 civils, 16 soldats et deux rebelles --, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH). La veille, 46 personnes avaient péri. A l'aube, des combats ont éclaté entre armée et insurgés dans la province d'Idleb (nord-ouest), dans le district de Jabal al-Zawiya, un bastion de la rébellion qui a connu des affrontements parmi les plus violents depuis la militarisation de la révolte. Plusieurs localités d'Idleb ont aussi été bombardées dans la nuit par des chars, lance-roquettes et canons, a indiqué le Conseil national syrien (CNS), principale coalition de l'opposition. Des combats ont également fait rage dans la région de Deraa (sud), tandis que des civils étaient victimes de tirs des forces gouvernementales dans les régions de Damas, d'Alep (nord), de Homs et de Hama (centre) notamment. Ces violences meurtrières se déroulent malgré la présence de près de 300 observateurs de l'ONU censés surveiller un cessez-le-feu proclamé le 12 avril en vertu du plan Annan, mais constamment violé. M. Assad est resté en effet sourd aux multiples appels à cesser les violences, réitérant la thèse de complot fomenté par les opposants avec l'aide de l'étranger. Le CNS --qui doit désigner à Istanbul les 9 et 10 juin un nouveau chef pour remplacer Burhan Ghalioun, démissionnaire, selon des responsables de cette coalition-- a vu dans son discours sa volonté de poursuivre la répression "dans le sang". Plus de 13.400 personnes ont été tuées depuis le 15 mars 2011, en majorité des civils, d'après l'OSDH. Selon diplomates et experts, M. Annan qui commence à entrevoir l'échec de son plan, souhaite que la communauté internationale pèse de tout son poids pour faire respecter son plan ou qu'elle trouve un "plan B" pour résoudre la crise. M. Annan, qui s'adressera jeudi à New York au Conseil de sécurité et à l'Assemblée générale de l'ONU, avait laissé entendre dès samedi que sa médiation avait atteint ses limites en réclamant un "réexamen en profondeur" de la stratégie de sortie de crise. Selon le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius, le régime syrien "finira par tomber sous le poids de ses crimes". Son homologue allemand Guido Westerwelle, a de son côté souligné la nécessité d'"éviter un embrasement qui pourrait mettre le feu à toute la région", quelques heures avant le début d'une tournée qui l'emmènera notamment au Liban, où la révolte syrienne attise les tensions. Lundi, des commerces appartenant à des Alaouites ont été incendiés à Tripoli, dans le nord du pays, deux jours après des affrontements entre pro et anti-Assad ayant fait 14 morts, selon une source de sécurité.