Les familles algériennes sont «la principale cible de la tentative de remise en cause de l'immigration familiale en France», selon Mme Muriel Cohen, chercheur au centre d'histoire sociale du XXe siècle de Paris. Elle affirme dans une tribune parue dans une revue du Groupe d'information et de soutien des immigrés (Gisti) que «les familles algériennes sont exclues de la procédure qui garantit le droit au regroupement familial et restent ainsi confinées dans un infra-droit qui les laisse à la merci de l'administration». Pour elle, le décret de 1976 relatif aux conditions d'entrée et de séjour des familles étrangères résidant régulièrement en France ne s'applique pas aux familles algériennes «qui, du fait de l'héritage colonial, bénéficient d'un régime dérogatoire censé les favoriser», a-t-elle souligné, faisant également allusion à l'ordonnance de 1945. «Préalablement favorable aux Algériens, cette ordonnance a fini par être appliquée par une partie de l'administration française, soumettant l'entrée sur le sol métropolitain à la possession de plusieurs documents. Les entrées sur le territoire et le droit au séjour restent régis par les circulaires du 27 février 1967 et du 31 janvier 1969, qui interdisent toute régularisation a posteriori», a fait remarquer l'universitaire, précisant que les familles algériennes, qui devraient «théoriquement» accéder librement au territoire français, sont «paradoxalement les plus contrôlées par le biais de circulaires». En effet, selon cette chercheur, ces circulaires imposent des dispositions jugées contraignantes. A titre d'exemple, elle cite l'installation en France qui doit au préalable faire l'objet d'une autorisation et d'un certificat de logement Elle estime que cette exigence qui découle des accords de 1968, a évolué en certificat de résidence. «Désormais, les familles qui n'ont pas obtenu l'autorisation de certificat de logement, n'ont pas le droit à un certificat de résidence et sont donc en théorie, expulsables», dénonce-t-elle, ajoutant que ces pratiques administratives ont des effets «très concrets» sur les arrivées de familles étrangères en France. «Alors qu'en 1971, quelque 22 000 familles portugaises et 5600 familles espagnoles s'installaient en France, les familles algériennes n'étaient que 4000 à pouvoir le faire, l'immigration restant limitée en raison des contrôles spécifiques dont elles faisaient l'objet», a-t-elle rappelé.