On s'y attendait un peu car on savait le football atteint du mal de la tricherie et de la corruption. Voilà que le scandale éclate au grand jour. L'Office européen de police, Europol, a révélé, hier matin, avoir démantelé le plus grand réseau de matches truqués dans le football au monde. Cette annonce a eu l'effet d'un séisme, un de plus près d'une semaine après que l'hebdomadaire français, France Football eut publié une enquête portant sur l'attribution de la Coupe du monde 2022 pour laquelle celui qui en a hérité, le Qatar, aurait versé de très gros pots-de-vin à ceux qui étaient concernés par ce vote. Chaque semaine apporte ainsi son lot d'affaires plus louches les unes que les autres, qui font le quotidien du sport le plus prisé au monde. Un sport d'une audience planétaire et qui génère de mirobolants bénéfices en termes d'argent. Les grands dirigeants de ce football étant eux-mêmes pris dans l'engrenage du gain facile et de la corruption, comment veut-on obtenir des joueurs, des entraîneurs, des arbitres et des responsables de clubs qu'ils soient clean à 100% ? Le football, c'est une immense corne d'abondance dans laquelle ceux qui sont censés le servir peuvent y puiser, le plus souvent d'une manière frauduleuse. 15 pays concernés Le scandale qu'Europol vient de révéler touche plus de 380 matches qui auraient fait l'objet de magouilles et de tricherie. Le coupable est un réseau mafieux transnational spécialisé dans ce genre de trafic. Les matches dont il est question s'étalent de la période 2008 à celle de 2011 et concernent la Ligue des champions européenne et la qualification à la Coupe du monde. Ils toucheraient, au moins, 15 pays. Les responsables d'Europol n'ont pas énuméré dans le détail les rencontres concernées, mais ils ont parlé pour donner l'exemple d'une confrontation pour la qualification aux Jeux olympiques entre l'équipe nationale espoirs de l'Argentine et son homologue de Bolivie. L'arbitre de ce match, un Hongrois du nom de Lengyel Kolos, l'avait prolongé de 12 minutes au-delà du temps réglementaire, une période durant laquelle il avait accordé un penalty aux Argentins, finalement vainqueurs sur le score de 1 but à 0, (M. Kolos avait sifflé le coup de sifflet final juste après la transformation du penalty en question). Au moins 425 joueurs, dirigeants de clubs et arbitres impliqués «Il nous semble clair qu'il s'agit de la plus grande enquête de tous les temps sur des matches truqués présumés», a déclaré Rob Wainwright, directeur d'Europol. L'agence basée aux Pays-Bas certifie, par ailleurs, qu'au moins 425 joueurs, dirigeants de clubs et arbitres, sont impliqués dans cette affaire. La Turquie, l'Allemagne et la Suisse seraient les pays les plus touchés. Selon Wainwright, le réseau mis à jour «est le travail d'un syndicat du crime basé en Asie et qui opérait avec des réseaux criminels à travers l'Europe». Une cinquantaine de personnes auraient déjà été arrêtées. Les gains réalisés à la suite de ces paris truqués s'élèveraient apparemment à 8 millions d'euros. Pour le patron d'Europol, cette affaire est «seulement la partie émergée de l'iceberg», ce qui sous-entend qu'elle pourrait déboucher sur de plus graves révélations si on poussait plus loin l'enquête. Ce qui est sûr, c'est que le trafic qui vient d'être démantelé risque de provoquer de très gros remous dans le football international même si la Fifa n'avait, dans l'après-midi d'hier, toujours pas réagi à ces révélations. Il faut dire que ce n'est pas la première fois que l'on parle de truquages de matches de football. Un pays comme l'Italie a, par deux fois, été ébranlé par des histoires de ce genre. L'Allemagne, avec son scandale d'arbitres achetés, la Turquie, le Portugal ont également été touchés. Ces affaires semblent moins importantes que celle dont vient de parler Europol avec des matches dont le plus gros concerne les championnats allemands, turcs et suisses. En janvier, Interpol, la police internationale, avait mis en garde le monde du football sur le fait que la corruption en son sein aide à financer d'autres activités criminelles comme la prostitution ou le trafic de drogues. Chez nous, la tricherie et les matches arrangés ont de tout temps alimenté les discussions sur le football. Le problème est qu'en Algérie, contrairement à ce qui s'est fait dans d'autres pays où on n'a pas hésité à envoyer des gens en prison, à rétrograder des clubs et à suspendre joueurs, entraîneurs et dirigeants, on se montre frileux dès qu'il s'agit d'histoires de ce genre. En tout cas, on n'a jamais entendu parler de sanctions dans le cadre de la lutte contre la corruption alors que les accusations de ce type font les choux gras de la presse spécialisée.