Malmené par la crise économique et par des allégations de corruption au sein de son parti, le chef du gouvernement de droite espagnol, Mariano Rajoy, a tenté mercredi de reprendre l'initiative et affirmé, dans un discours devant les députés, que le "naufrage" du pays avait été évité. A l'ouverture du débat parlementaire sur l'état de la Nation, où l'opposition s'apprêtait à l'interpeller sur sa politique de la rigueur à outrance, Mariano Rajoy a défendu son action depuis son arrivée au pouvoir à la fin 2011, affirmant que les mesures prises avaient été "imposées par la ruine qui menaçait" l'Espagne. Répondant aux soupçons de corruption qui ébranlent son pouvoir et divisent au sein de son parti, le Parti populaire, le chef du gouvernement a tenté de se défendre: "Il n'est pas vrai que la corruption est généralisée en Espagne", a-t-il lancé. "Un discours décevant", a rétorqué Soraya Rodriguez, porte-parole du groupe parlementaire socialiste, soulignant que Mariano Rajoy n'avait parlé "ni des expulsions" de propriétaires surendettés, ni "de la santé publique", frappée par les coupes budgétaires. A l'origine d'un profond malaise dans l'opinion, la politique d'austérité destinée à redresser les comptes publics du pays est en effet très contestée pour ses retombées sociales, et perçue par nombre d'économistes comme un frein à la reprise. De nombreux collectifs professionnels, comme ceux de la santé ou de l'éducation, associations ou partis minoritaires appellent samedi à une "marée citoyenne" à Madrid et à travers l'Espagne, pour contester cette politique et réclamer une lutte accrue contre la pauvreté. Car l'Espagne, quatrième économie de la zone euro, plongée dans la crise depuis l'éclatement de la bulle immobilière en 2008, est entrée pour la deuxième fois en récession à la fin 2011, et affiche un chômage toujours en hausse, à 26,02% de la population active. Le déficit public, a annoncé Mariano Rajoy, devrait se situer en 2012 "à moins de 7%" du Produit intérieur brut, après 9,4% en 2011: un résultat en demi-teinte puisqu'il se situe au-dessus du seuil de 6,3% négocié avec Bruxelles, mais en-dessous des prévisions les plus pessimistes. Malgré des perspectives toujours sombres pour 2013, le chef du gouvernement a assuré que la politique menée depuis un an avait permis "de laisser en arrière l'imminence d'un désastre" et "d'éviter le naufrage" de l'Espagne. "Nous commençons à voir la voie de l'avenir", a-t-il affirmé, admettant pourtant que "le chemin à parcourir est encore long", et reconnaissant "une réalité sociale terriblement dure". Après le plan de rigueur qui doit permettre à l'Espagne d'économiser 150 milliards d'euros sur trois ans, Mariano Rajoy a annoncé "une seconde génération de réformes" afin de stimuler l'emploi et l'activité des petites entreprises. Ces réformes viseront en particulier à créer de l'emploi chez les jeunes, frappés par un chômage de plus de 55%. Pour cela, a annoncé Mariano Rajoy, le gouvernement incitera, par des mesures fiscales, les entreprises à employer des moins de 30 ans à temps partiel. Ces réformes comprennent également un assouplissement du régime de la TVA à partir de 2014, afin de relancer l'activité des petites entreprises, et des mesures destinées à faciliter l'accès des entreprises au financement à hauteur de 45 milliards d'euros. Des mesures qui font suite à un programme de rigueur sans précédent mené en 2012, comprenant des coupes budgétaires dans la fonction publique, une hausse de la TVA, une réduction des allocations chômage ou encore des coupes dans la santé et l'éducation. Pour 2013, le gouvernement prévoit une poursuite de la récession, avec un recul du PIB de 0,5%, un chiffre déjà largement dépassé par nombre de prévisions d'organisations internationales, avant un retour à la croissance en 2014. "Nous devons faire preuve de sérénité et de patience parce que le terrain sur lequel nous nous déplaçons est extraordinairement complexe", a affirmé Mariano Rajoy.