Au lieu d'attendre le texte constitutionnel pour ensuite «donner son avis», le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) a pris l'initiative en élaborant son propre projet constitutionnel. Il sera soumis vendredi prochain au conseil national du parti avant de le proposer aux débats. C'est du moins ce qu'a révélé, hier, le président du RCD Mohcine Belabès qui s'exprimait au Forum du quotidien Liberté. «Ces projets de Constitution qui, pour reprendre l'expression de 1963 de Ferhat Abbas, produisent ‘un provisoire qui dure' ne nous intéressent pas. Nous avons élaboré nous-mêmes un projet de Constitution qui sera soumis au conseil national ce 26 avril avant de faire l'objet de débats où seront associés des acteurs de la société civile», a indiqué Belabès dans son introduction. «Ce projet de Constitution est imprégné de la mémoire algérienne, il est inscrit dans l'universalité et il répond aux caractéristiques nationales sociologiques et aux référents culturels de notre nation qui n'ont rien à voir avec l'histoire française qui a aliéné l'esprit de la plupart des rédacteurs des textes constitutionnels algériens depuis 1962», a-t-il révélé, affirmant que «le mimétisme institutionnel français est l'une des causes essentielles de l'échec et de l'impasse algériens». Pour Mohcine Belabès, «la Constitution n'est pas une affaire du chef de l'Etat ou de partis. C'est l'affaire de tous les citoyens et il ne faut pas la laisser entre les mains du système», d'où la préférence du RCD pour une révision par voie référendaire. Quant au système de gouvernance (présidentiel, parlementaire…) qui fait aussi débat, le président du RCD estime que l'important est de «proposer» et il appartient aux constitutionnalistes de «qualifier» les systèmes qui en découleront. Il révélera que le projet de régionalisation qui lui est cher est «inclus» dans ce nouveau projet.Invité à s'exprimer sur l'élection présidentielle de 2014, le premier responsable du RCD dresse un tableau noir de la situation du pays dans divers secteurs. Tout en n'écartant pas la possibilité d'un candidat du parti «s'il y a des garanties d'une élection transparente». Il a affirmé, quant à la possible candidature de l'actuel chef de l'Etat, sur lequel doit être appliqué l'article 88 de la Constitution pour cause d'incapacité d'assumer ses fonctions (destitution), s'inscrire «en faux contre ceux qui veulent interdire à tel ou tel citoyen de se porter candidat par principe». Candidature de Bouteflika : «Tout citoyen a le droit de concourir» En un mot, le RCD n'est pas contre la candidature d'Abdelaziz Bouteflika à sa propre succession, mais il estime que «c'est l'expertise médicale qui doit être invitée» . «Tout citoyen respectant un cahier des charges républicain a le droit de concourir ; l'essentiel est que le vote soit transparent», commente Belabès. Dans la foulée, le RCD réclame «la restitution du sigle FLN au patrimoine historique national», mais aussi «la dissolution de la police politique», car aucun pays, selon le RCD, «ne peut continuer à vivre aujourd'hui avec un pouvoir occulte et omnipotent s'il veut assurer une bonne gouvernance et une alternance, objectifs et moyens de tout projet démocratique». Dans son exposé, le président du RCD a également évoqué l'absence de condition d'exercice politique, estimant que «l'expression publique continue d'être refusée à l'opposition dans les médias publics et que les activités de toute structure non clientélisée sont interdites ou perturbées». Pour Mohcine Belabès, il y a «chantage du pouvoir qui veut réduire la donne politique algérienne au champ clos des compétitions ou des affrontements de clans d'un même système qui se disputent le pays depuis l'Indépendance», d'où l'intérêt pour le RCD qui considère la crise actuelle comme «systémique» de «faire preuve d'imagination, d'inventivité et de vigilance pour déjouer et contrer la stratégie de pollution, de provocation ou, pour d'autres, de soumission imposée à la classe politique, si on veut éviter l'écueil de la violence dans laquelle le pouvoir veut entraîner, pour mieux l'enfermer, l'alternative démocratique». Les dernières agressions, «lancées par les nouveaux instruments audiovisuels, récemment légalisés par l'exécutif, contre quatre patriotes connus pour leur opposition au régime, sont une démonstration caricaturale du conflit originel que nous vivons depuis l'Indépendance», estime Belabès, allusion aux attaques contre Saïd Sadi et Hocine Aït Ahmed, notamment à travers les médias. Enfin, «sur la marche commune» à l'occasion du 20 avril avec le MAK de Ferhat Mhenni, Mohcine Belabès estime que lorsqu'il y a revendication commune (officialisation de tamazight dans ce cas), le RCD et prêt à s'associer y compris aux islamistes.