Le Tour de France s'est mis à l'heure africaine, jeudi à Montpellier, où Daryl Impey est devenu le premier coureur du continent à revêtir le maillot jaune. Treizième d'un sprint gagné par le "Gorille" allemand Andre Greipel, le coureur sud-africain s'est empressé de remercier son coéquipier, l'Australien Simon Gerrans, pour ce cadeau de choix. "Oui, c'est un cadeau", a confirmé ensuite Impey, qui était à égalité de temps au départ d'Aix-en-Provence avec Gerrans. Les deux hommes avaient été départagés jusque-là par l'addition de leurs places à l'arrivée. Cette fois, une "cassure" dans le peloton a permis à un premier groupe de 16 coureurs de précéder le gros de la troupe de 5 secondes à l'arrivée jugée devant le stade Yves-du-Manoir, tout près de la rue des... Springboks, le nom de l'équipe de rugby d'Afrique du Sud. "Simon (Gerrans) m'a emmené pour le sprint", a souligné le nouveau maillot jaune en relevant que Montpellier était décidément la ville des "premières" pour le cyclisme sud-africain. En 2007, la ville languedocienne avait été le théâtre du succès de Rob Hunter, le premier coureur du pays de Mandela vainqueur d'étape dans le Tour. "C'était l'idée de Simon" "C'était l'idée de Simon. Ils sont amis avec Daryl", a raconté Matt White, le directeur sportif de l'équipe Orica. "Simon est venu me voir après l'étape d'hier (mercredi). Il m'a demandé si nous étions d'accord pour donner le maillot jaune à Daryl. C'était risqué comme tactique. Il fallait faire attention". Gerrans a expliqué son geste par la reconnaissance: "Après tout ce qu'il a fait pour moi dans les deux premières étapes du Tour..." Ce dénouement original a conclu une étape de 176,5 kilomètres privée -fait très rare dans le Tour- d'une véritable échappée si l'on considère que la tentative de l'Espagnol Luis Angel Maté, dès le départ d'Aix-en-Provence, a pris fin de façon inattendue. Nanti de plus de cinq minutes d'avance (Km 26), le "lynx andalou" de l'équipe Cofidis a suffisamment ralenti son allure pour être repris après 44 kilomètres. Sans doute le coureur espagnol et son encadrement ont-ils considéré qu'un effort soutenu était inutile. Les sprinteurs tenaient à se disputer la victoire à Montpellier et les coureurs du classement général se méfiaient trop des possibles bordures dans la traversée de la plaine du Languedoc. A l'exemple d'Alberto Contador, dont les équipiers sont restés placés à l'avant durant de longues minutes. L'Espagnol avait encore en mémoire la mésaventure survenue dans les parages, en 2009, à l'approche de la Grande-Motte. Existe-t-il une hiérarchie des sprinteurs dans ce Tour? Greipel s'est imposé aussi nettement à Montpellier que son ancien coéquipier et grand rival, le Britannique Mark Cavendish, la veille à Marseille. Cette fois, le puissant Allemand a été lancé dans les meilleures conditions par ses coéquipiers qui ont attendu les 1500 derniers mètres pour se placer à l'avant du peloton. A Marseille, Greipel n'avait pu garder la roue du Néo-Zélandais Greg Henderson, chargé de le piloter. "Les meilleurs sprinteurs du monde sont présents. Alors, la moindre erreur ne pardonne pas", a rappelé le vainqueur du jour. Si Cavendish, du haut de son palmarès inégalé parmi ses contemporains, reste l'incontestable référence, il doit tenir compte d'une opposition consistante. Outre Greipel, qui a gagné trois étapes l'an passé et une autre lors de ses débuts en 2011), l'Allemand Marcel Kittel et le Slovaque Peter Sagan, voire le Norvégien Alexander Kristoff, sont mieux que des faire-valoir. A l'entrée dans le département de l'Hérault, "Cav" a joué de malchance. Il a été pris dans l'une des chutes qui ont émaillé la dernière heure (Joaquim Rodriguez s'est lui aussi retrouvé à terre) et a dû se contenter de la quatrième place de l'étape, derrière Greipel, Sagan et Kittel. Avant de hurler sa rage dans le bus de son équipe en répétant: "P... de vélo !" Sagan, deuxième pour la troisième fois depuis le départ, a fait contre mauvaise fortune bon cœur. "Il n'est pas encore à 100 pour cent de sa condition après sa chute du premier jour, a estimé son directeur sportif Stefano Zanatta. Il lui manque encore quelque chose pour battre les meilleurs". Le "Hulk" venu de Slovaquie a gardé le maillot vert. Mais le "Gorille", le surnom de Greipel, s'est rapproché à 29 points.