Les habitants du vieux ksar de Tiout, érigé à la fin du 14e siècle au cœur d'une vaste oasis dans le sud de Nâama, perpétuent des traditions et coutumes propres au mois de Ramadhan, tout préservant les valeurs d'hospitalité et de solidarité. Les préparatifs de cette occasion religieuse incluent des travaux de décoration, de nettoyage et de peinture des maisons traditionnelles, qui se parent de tapis et de meubles élégants pour accueillir les proches et voisins en ce mois sacré. De l'encens traditionnel est également utilisé afin de conférer une ambiance spirituelle aux veillées du mois de jeûne, selon les témoignages des habitants de la région. El Hadj Bachir Mohamed (72 ans), originaire du Ksar de Tiout, affirme que les habitants restent attachés à d'anciennes traditions durant le mois sacré, citant notamment la lecture collective et ininterrompue du Saint Coran dans l'ancienne mosquée du ksar, à l'exception des cinq prières obligatoires. Dès la veille du Ramadhan, des groupes de fidèles se relaient pour la récitation du Livre Saint, une pratique qui donne lieu à plusieurs lectures complètes du Coran. Ce site religieux, qui se distingue par son architecture remarquable, accueille également des cercles de "Dhikr" dans une atmosphère empreinte de spiritualité. Il demeure, encore aujourd'hui, un lieu de prière et d'enseignement pour les étudiants tout au long de l'année. En plus de l'apprentissage du Coran au sein de son école religieuse locale, appelée "Takhribicht", ce lieu joue encore un rôle majeur dans l'enseignement des préceptes de l'Islam, la médiation sociale, le règlement des héritages ainsi que l'organisation d'aides et de dons destinés aux nécessiteux, selon des spécialistes du patrimoine local. Parmi les coutumes sociales ancestrales qui caractérisent aussi ce mois béni, les collectes de fonds organisées par les habitants du ksar pour acheter des ovins afin de les sacrifier et partager la viande entre eux. Une partie est systématiquement réservée aux familles démunies, illustrant ainsi l'esprit de solidarité qui règne au sein de la communauté, selon les mêmes sources. Une ambiance familiale chaleureuse pendant le mois sacré Pour Safia, une mère de famille de Tiout, le mois de Ramadhan est une occasion de retrouvailles familiales dans une ambiance chaleureuse. Pour célébrer ces réjouissances, des plats traditionnels sont préparés, notamment la harira, confectionnée avec de la farine de blé locale appelée "Dchicha zanbou", ainsi que le pain traditionnel "Matloue" et le couscous achalandé de viande. L'un des traits marquants des habitants du ksar est leur attachement aux visites familiales et aux liens de parenté. Le partage des plats du F'tour entre voisins est l'autre habitude qui renforce la convivialité et la solidarité durant ce mois de miséricorde, ajoute Safia. La préparation du thé au feu de bois puis le servir lors des veillées familiales est également un des rituels en ce mois de Ramadhan qui ajoute de la convivialité à ces chaleureux moments. Dahbia, une grand-mère habitant le Ksar, raconte les festivités organisées à l'occasion du premier jeûne des enfants. Le jeune garçon qui observe pour la première fois le jeûne, est paré d'habits neufs qu'il porte à l'heure de la prière du Maghreb et du F'tour. Il célèbre ce moment avec ses camarades et sa famille. Quant aux jeunes filles, elles sont traditionnellement accueillies chez leur grand-mère, qui les habille avec soin et les pare de henné et de khôl. Un repas spécial est organisé en leur honneur, en présence de leurs proches. Pour le S'hour, moment précédant le début du jeûne, le "Zrezri" s'impose comme l'un des plats incontournables. Il est préparé à base de dattes dénoyautées, mélangées à des herbes aromatiques locales telles que le romarin (yazir), le genévrier (ar'ar), l'armoise (chih), la klila et du beurre traditionnel. A la mi-Ramadhan, les familles préparent un mets spécial appelé "Rogag". Servi dans des plats en céramique ou en terre cuite, il est composé de fines feuilles de pâte superposées et arrosées d'une sauce à base de viande d'agneau et de légumes épicés, lui conférant une saveur exquise. Malgré l'introduction de plats modernes dans les repas du Ramadhan, ces mets ancestraux conservent une place privilégiée sur la table du F'tour dans cette région des oasis de la région des monts de l'Atlas saharien, dans la wilaya de Naâma.