Elles ont choisi le «mont de piété» comme solution pour faire face à la frénésie des dépenses qui accompagnent le mois sacré du Ramadhan, l'Aïd et la rentrée scolaire. Bon gré mal gré, elles ont été poussées à bout pour brader leurs bijoux qui constituent leur petite «fortune», cumulée à coups de mille et un sacrifices. De plus en plus de familles recourent, aujourd'hui, à cette alternative qui remplace, il faut le dire, l'emprunt auprès des proches ou des amis, devenu de nos jours pratiquement rare. Le gage de l'or est de retour et l'on assiste, désormais, à de plus en plus de femmes qui n'hésitent pas à recourir à cette pratique pour assurer à leur progéniture une bonne rentrée scolaire, acheter un véhicule ou même faire des travaux chez soi. «Lahdayed lechedaïd», ce dicton bien connu chez nous, prend ici toute sa signification. Le prêt sur gage ne laisse point indifférentes les mères de famille, notamment en cette période caractérisée par des frais excessifs qui constituent un coup très dur pour leur maigre budget. Presque, effacées, lasses, les yeux baissés, elles se faufilent pour brader leurs bijoux, optant pour le prêt sur gage ou carrément la vente. Il faut signaler que la plupart des bijoux proposés à l'hypothèque bancaire sont achetés auprès des «trabendistes» qui écument le pays. Aujourd'hui, le prêt sur gage sur l'or permet à de nombreuses familles de résoudre leurs problèmes financiers et même de souffler en attendant des jours meilleurs. C'est, en tout cas, ce que pense une sexagénaire, rencontrée à proximité de l'agence BDL d'Oran, qui affirme que pour marier son fils, elle n'a pas trouvé d'autre alternative que de mettre au clou ses bijoux. Une décision difficile à prendre, ajoutera-t-elle, mais nécessaire. Pourtant, l'offre actuelle n'a pas changé depuis plusieurs années au point ou certains habitués se demandent si les responsables de la BDL sont conscients des nouvelles donnes du marché de l'or. Mille dinars le gramme d'or ouvragé, alors que dans le marché le cours culmine à 5000 DA et l'or cassé est repris entre 2500 et 3000 DA. Les habitués de cette agence sont unanimes pour affirmer que ce faible afflux s'explique par l'offre peu attrayante en plus du taux d'intérêt de 8% par an jugé élevé. Sauf pour les citoyens aux besoins énormes qui comptent, une fois la période des grandes dépenses passée, rembourser périodiquement le prêt en se serrant la ceinture. Dès lors, le recours à la vente en or cassé à moitié prix devient inévitable et les artisans bijoutiers espèrent de telles aubaines qui leur permettent de s'approvisionner en matière première à bon marché, qu'ils écouleront sur le large marché informel qui échappe à tout contrôle. L'autre solution est de recourir à des usuriers et il en existe même s'ils vous mettent en avant l'aspect d'entraide alors qu'ils ont fait de cette activité rentière leur spécialité comptant bien sur la détresse des ménages. Comme cette femme qui se présente pour un prêt en urgence pour les besoins d'une intervention chirurgicale. Dix chèques à la main pour les présenter à l'usurier, notre interlocutrice estime que le recours à l'usure, même si la riba est pêché, est la solution salutaire. Sans nous dévoiler ni la somme ni le taux d'intérêt exigé, notre interlocutrice était visiblement dans l'embarras. Revenant sur le prêt sur gage qui a constitué une issue de secours, notre interlocutrice a révélé qu'elle a sacrifié ses meilleurs bijoux et que l'offre de l'usurier est beaucoup plus avantageuse notamment avec le refus depuis trois ans de la BDL de gager tout bijou non poinçonné. En attendant le retour des crédits à la consommation, le prêt sur gage, aura encore devant lui de beaux jours.