Cette célébration et le faste qu'on veut donner à l'événement ne semblent pas faire l'unanimité de bon nombre de citoyens. Des associations sont montés au créneau pour dénoncer ce qu'elles qualifient de dilapidation des deniers publics et d'atteinte à la ville et à ses symboles. La fédération des associations culturelles et de la jeunesse de la wilaya d'Oran, qui regroupe plusieurs associations actives, dans un communiqué adressé à la presse, se dit outrée par le caractère opaque dans lequel sont menés les préparatifs de la célébration du 11e centenaire d'Oran. En effet, tout Oran parle d'une enveloppe financière de 20 milliards de centimes consacrée aux festivités. Des langues se sont déliées pour dénoncer ce gaspillage caractérisé au moment où la ville tombe en ruine. Le communiqué insiste sur la volonté de certains d'user de leurres pour masquer les plaies qui rongent la ville. «Tout le monde connaît l'état de notre cité qui nécessite plus qu'une opération de relookage dont le brillant s'estompera sitôt les invités de marque rentrés chez eux», précise le document qui invite les responsables du comité d'organisation à faire preuve de maturité en élargissant la concertation aux forces vives de la ville afin de donner à l'événement toute sa dimension historique, civilisationnelle et culturelle. Des projets de programme ont été discutés les derniers jours, ébauches qui, semble-t-il, n'ont pas fait l'unanimité autour d'elles. On avait évoqué la possibilité de montrer un grand spectacle théâtral dont l'enveloppe a été estimée à 3 milliards de centimes. Cette idée avait fait sortir des hommes de culture, des personnalités de théâtre ainsi que des associations de leurs gonds, estimant que cette forme de théâtre (opérette ou melhama) a montré qu'elle n'était pas encore attractive pour le public algérien habitué à des formes plus conventionnelles. «De plus, a-t-on des metteurs en scène, des comédiens ou des techniciens capables de présenter un spectacle de haute facture», dira un homme de culture bien connu à Oran. Au mois de février 2000, la fédération des associations culturelles et de la jeunesse d'Oran avait déjà rendu public un communiqué dans lequel elle avait dénoncé les pratiques d'exclusion exercées sur les bonnes volontés qui ne voulaient pas souscrire à l'idée du «fardage» de la ville au lieu de lui consacrer tous les efforts pour la sauver du désastre qui la guette. L'état du vieux bâti, les insuffisances en matière d'infrastructures scientifiques, culturelles, de jeunes et de logements ont été passées en revue dans le communiqué très critique et qui n'avait pas ménagé les opportunistes qui avaient accaparé l'occasion (la célébration du 11e centenaire de la ville) pour partir à l'assaut des deniers publics. «Consciente de son devoir envers le citoyen, la fédération met en garde contre tous ceux qui seraient tentés d'utiliser cet événement à des fins non avouées. Elle exhorte les citoyens à rester vigilants, pour barrer la route devant ceux qui excellent dans l'art de dévoyer les initiatives citoyennes pour en faire des opportunités servant leurs intérêts. Elle met en garde contre toute tentative de marginalisation des volontés qui portent la ville, son histoire, son patrimoine et son avenir dans leur coeur», conclut le communiqué. Cette sortie de la fédération constitue un véritable pavé jeté dans la mare de ceux qui déclarent qu'ils se sont mobilisés pour faire de la célébration du 11e centenaire de la ville d'Oran un événement grandiose. En attendant que le coup d'envoi soit donné aux festivités, d'autres bâtiments vermoulus risquent de tomber sur la tête de leurs occupants puisque au lieu d'une véritable rénovation d'Oran, on continue de faire dans le ravalement de façade.