Maître Boukhedir a parlé d´erreur et de pardon. Son client était out! Sitôt les fêtes religieuses passées (Moharam 1430, Achoura et les vendredis avant et après ces journées) les esclaves de Bacchus ont repris le chemin des bars, gargotes clandos, les restos où la bouteille est reine pour s´abreuver à gogo et étancher leur soif. Seulement, il y a ceux qui boivent et se calment, il y a ceux qui consomment et s´endorment, il y a ceux qui se gargarisent et s´allongent et il y a ceux, les plus dangereux, qui boivent et prennent le volant. Et la loi réprime ce délit à travers l´article 67 de l´ordonnance 01-14-2004, un texte qui donne à réfléchir à tous ces amateurs irresponsables de consommation d´alcool, qui présument le grave risque de conduire allant souvent vers la mort invonlontaire et les «blessures involontaires». Abdenour B., la quarantaine, employé dans une boîte privée, père de deux enfants, a passé la nuit du samedi à dimanche en taule pour conduite en état d´ivresse. Il a comparu devant Sihem Bechiri, la sévère juge (dans ce genre de dossiers) de la section correctionnelle du tribunal de Bir Mourad Raïs (cour d´Alger). Résidant à Staouéli, le détenu avait été pris la langue sur le goulot, à Hydra. Ce qui explique sa comparution à Saïd Hamdine où trône le tribunal de Bir Mourad Raïs. La salle était comble. Les délits, on ne vous le dit pas. Mourad Hellal, ce procureur qui monte est sur le qui-vive. Il lui arrive même de requérir sévèrement tant il a en horreur pas les ivrognes - c´est leur problème et leur vie privée - mais ceux qui s´abreuvent et prennent le risque de conduire dans leur état. Et ce Abdenour B. avait été surpris avec un gramme trente-trois, un peu plus que la norme arrêtée par la loi. Pauvres circulations: la routière et la sanguine! Constitué la veille par la famille, Maître Lamine Boukhedir, en bon avocat organisé, avait bien pensé sa plaidoirie en décidant de ne pas s´aventurer devant cette Bechiri qu´on lui avait présentée comme étant redoutable en matière d´application et d´obéissance à la loi. C´est pourquoi il avait choisi de ne pas trop s´étaler et donc agacer le tribunal. «Vite et bien» avait-il pensé en son for intérieur avant de s´avancer vers le pupitre de la magistrate en prenant soin de ne pas tourner le dos à son compatriote de la «Coquette» et «Patrice Lumumba» ex-St-Cloud et surtout du cap de Garde (Ras El Hamra). C´est humain, comme on dirait, face à une situation qui voit un regard de rebelle dans les yeux de quelqu´un qui assiste à la maltraitance d´un animal domestique. Il est vrai que l´avocat savait à qui il avait affaire car Bechiri, la juge, fait partie des magistrats propres, compétents avec cette rudesse justement propre aux présidents de section pénale, prompts à obéir à la loi juste pour prouver aux justiciables que lorsqu´ils s´accrochent désespérément à la «branche» justice, celle-ci sait s´y prendre, en allant droit vers des verdicts sains et sereins. C´est pourquoi Maître Boukhedir est allé lui aussi vers le mea-culpa de son client, en soulignant fort à propos que «l´erreur étant humaine, le pardon lui est...divin!» Cette sortie va probablement pousser la présidente à ne pas verser dans l´excès en infligeant une peine de prison de six mois assortis du sursis, une amende ferme et une suspension du permis de conduire pour une durée de trois mois, le temps que le printemps fasse un retour sobre et fleuri... Le détenu lui, était confus, malheureux, en un mot: «Out». Le pauvre, si l´on peut le qualifier ainsi, devait penser aux dommages collatéraux, causés au sein de sa famille. Oui, nous, nous voulons bien, mais a-t-il une seule fois pensé à sa famille et aux effets dévastateurs d´une conduite en état d´ivresse? Espérons pour lui que ce fut une première et ultime fois!