Erdogan bat le fer tant qu'il est chaud en marquant la place de la Turquie dans le nouvel espace géostratégique arabe Erdogan se rendra la semaine prochaine en Egypte, Tunisie et Libye, trois pays du Printemps arabe, afin d'évoquer la relance de la coopération après les mouvements de révolte qui les ont bouleversés, a annoncé son service de presse. La première étape de ce périple sera l'Egypte où M. Erdogan est attendu le lundi 12 septembre pour un séjour de deux jours, précise un communiqué. Accompagné de plusieurs ministres, de haut responsables et des chefs d'entreprise, M. Erdogan s'entretiendra au Caire avec le maréchal Hussein Tantaoui, le chef d'Etat de facto de l'Egypte. Une série d'accords de coopération dans les domaines de l'économie, culture, enseignement et de l'encouragement des investissements réciproques notamment seront signés. Le chef du gouvernement turc doit en outre prononcer un discours lors d'une réunion ministérielle de la Ligue arabe dans la capitale égyptienne et rencontrer le secrétaire général de cette organisation, Nabil al-Arabi, souligne le document. M. Erdogan et sa délégation seront le 14 septembre en Tunisie pour rencontrer les dirigeants de ce pays dont le Premier ministre Béji Caïd Essebsi. Le Premier ministre turc se rendra le 15 septembre en Libye, dernière étape de son voyage, pour évoquer «la contribution que peu apporter la Turquie à la reconstruction de ce pays», indique le texte. Il y rencontrera Mustapha Abdeljalil, le président du Conseil national de transition (CNT), les autorités de transition libyennes, qui siège à Benghazi (est). Le communiqué ne fait pas état d'une visite de M. Erdogan à Ghaza. Mardi, M. Erdogan a annoncé qu'il pourrait se rendre à Ghaza, en marge de son déplacement en Egypte, mais qu'une décision finale n'avait pas encore été prise. Une telle visite dans la bande de Ghaza, dirigée par le mouvement islamiste palestinien Hamas, risquerait d'envenimer encore les relations entre la Turquie et Israël, anciens alliés stratégiques dans la région en froid depuis plus de deux ans. La Turquie a annoncé la semaine dernière plusieurs sanctions à l'encontre d'Israël qui refuse de s'excuser pour la mort, en mai 2010, de neuf Turcs lors de l'abordage par les forces israéliennes d'un ferry turc faisant partie d'un convoi humanitaire en route pour Ghaza La Turquie d'Erdogan cherche, par une diplomatie audacieuse déployée de Ghaza à la Somalie ou au Pakistan, à accéder au rang d'acteur mondial, mais l'exercice pourrait trouver ses limites dans la grave crise qui l'oppose à Israël. Le Premier ministre turc réaffirme ainsi l'ambition de faire jouer à la Turquie, pays musulman, membre de l'Otan, qui s'est ouvert ces dernières années à ses voisins arabes, un rôle de haut niveau au plan régional et international. «Il y a un espace vide, il n'y a plus de puissance arabe, et c'est la Turquie qui l'occupe», note Bertrand Badie, professeur en relations internationales (Paris). Le 19 août, M. Erdogan rendait visite aux victimes de la famine, en Somalie musulmane et gagnée par l'islamisme. Le chef du gouvernement turc était le premier responsable étranger de ce niveau à se rendre à Mogadiscio depuis le début de la guerre civile en 1991, exception faite du président ougandais Yoweri Museveni, en novembre. Leader d'un pays émergent, il a fait la leçon aux Occidentaux: «La tragédie qui se déroule ici (en Somalie, ndlr) est un test pour la civilisation et les valeurs contemporaines (...) Le monde occidental doit passer ce test avec succès pour montrer que les valeurs occidentales ne sont pas qu'une rhétorique creuse». En octobre 2010, M. Erdogan était au Pakistan, dans les zones ravagées par des inondations, où il a peaufiné son image de cham-pion de la solidarité musulmane et de l'islam modéré.