Aurasien, Benflis n'a pas dérogé à la réputation ni à l'image. Ferme et déterminé, il a fait du développement local une condition sine qua non du sursaut national. Détails. Avant de rallier Khenchela, M.Benflis a clôturé sa visite à Constantine par une réunion avec les autorités locales, les cadres et le élus de la wilaya, au niveau de la rutilante université de Constantine. A l'issue de la présentation des bilans et des exposés des ministres, le Chef du gouvernement a annoncé le déblocage de 6 milliards de centimes pour l'ensemble des projets présentés dans le cadre des actions urgentes. Hier donc, la wilaya de Khenchela a accueilli M.Benflis. L'une des haltes marquantes de la matinée, a été la visite de la daïra de Bouhmama, dont le chef-lieu se présente comme une bourgade confinée dans un massif montagneux et enfoncé dans la gadoue et les trop nombreux problèmes socio-économiques. Au terme d'un tour effectué dans ce petit ensemble de constructions et de rues défoncées à souhait, M.Benflis a pris difficilement la parole devant une foule qui ne cessait de lancer, à tour de larynx échauffés, d'interminables jérémiades. «Soussem!» (taisez-vous), ordonna Benflis dans un berbère qui arracha des applaudissements nourris: «C'est moi qui désigne celui qui s'adresse à moi.» Et un habitant de ce bled perdu entre nulle part et les montagnes, de prendre la parole: «Ce n'est pas une daïra, nous n'avons aucune infrastructure. Tous les projets ont été destinés à d'autres daïras. Nous demandons à ce qu'on rende à Bouhmama son envergure de daïra.» Des voix s'élèvent, apportant leurs lots de plaintes. Le Chef du gouvernement a rappelé à l'ordre : «Vous me laissez parler ou je vous dis au revoir», et s'adressant à un citoyen qui intervient énergiquement: «Je suis un Chaoui tout comme toi, si je n'ai pas envie d'écouter, je n'écoute pas!» Le point d'ordre a donné son effet. Profitant de cette maîtrise de la situation, Benflis revient à la charge: «Les problèmes ne se règlent pas en un jour ou en 10 jours. Les ministres sont là, et ils reviendront pour étudier vos problèmes.» Le chef de l'Exécutif a ajouté que même si la mauvaise gestion et la corruption existent, l'essentiel est de «se tourner vers le drapeau national». «ahya El Djazaïr!» (Vive l'Algérie), entonne la foule. Sur sa lancée, il apostrophe la foule: «Par étape, par la sagesse, nous réglerons nos problèmes. Faut-il tout brûler quand cela n'a pas été réglé en un jour?», qui lui répond: «Non, non». «Parlez du chauffage, les services de forêts doivent nous fournir du bois pour nous chauffer. L'hiver ici, est très rude, c'est très important, ne l'oubliez pas», nous saisit un citoyen. Mais, il y a aussi, parmi les points soulevés par les citoyens, l'eau potable, le gaz de ville, etc. Lors de la rencontre avec les «patriotes» de Bouhmama à la Maison de jeunes, M.Benflis a reconnu que la wilaya de Khenchela est «marginalisée, oubliée, mahgora!» Le Premier ministre s'est présenté comme un homme de dialogue et de conviction, mais aussi comme un homme franc. «Peut-être qu'il y a assez d'argent pour votre wilaya, mais n'oubliez pas les 47 restantes. S'il y a un sou, on le partagera sur toutes les wilayas. Vous êtes le rempart solide contre le terrorisme barbare», a conclu M.Benflis. La seconde station importante est le Chabor, l'un des plus grands bidonvilles de Khenchela. 10.171 habitants, selon des sources officielles, 13.000 selon un jeune habitant de cet ensemble chaotique de 21,23 hectares. Benflis a fait un tour dans la plupart des quartiers qui composent cet amas urbain, et a visité quelques «gourbis» avant d'annoncer, à la grande satisfaction de la foule venue nombreuse l'écouter, le relogement de l'ensemble des habitants du Chabor. Ce quartier avait, il y a une semaine, connu un mouvement de contestations inquiétant. «J'ai vu et j'ai compris», a lancé Benflis du haut de la tribune, improvisée sur un pick-up. Un jeune homme a été discrètement embarqué par deux «organisateurs» locaux. «Je n'ai fait que remettre une lettre au garde du corps», se défendait-il alors que les deux individus l'emmenaient fermement dans un véhicule avant de disparaître. Dans la foulée des inaugurations, M.Benflis a fait un tour du côté du projet du stade semi-olympique de 10.000 places, dans la commune de Khenchela. Autre point à mettre en exergue, la visite effectuée au niveau du barrage de Babar. Dans ce cadre, la proposition de la wilaya a été le renforcement de l'AEP (réseau d'alimentation en eau potable) de Khenchela à partir du barrage de Babar, compte tenu du déficit que connaît le chef-lieu de wilaya, de la sécheresse qui dure depuis six ans, et des délais qu'exige le transfert projeté à partir de Beni Haroun. Avant de regagner, aujourd'hui, la wilaya d'Oum El-Bouaghi, M.Benflis a inscrit au programme d'hier une rencontre avec la «société civile», ainsi qu'une réunion avec les autorités locales et les élus de la wilaya.