Les tractations ont donné lieu à des résultats surprenants cette APC bascule vers le MPA par la grâce d'une seule voix: une voix faussant tous les calculs. Abdelhakim Bettache devrait donc, sans retournement de situation, diriger la mairie d'Alger au nom du MPA (Mouvement populaire algérien), parti du ministre Amara Benyounès. Mais l'élection de ce transfuge du RND passe mal chez ses adversaires qui dénoncent une fraude. Explications: depuis hier, on a suivi ces péripéties dans les coulisses jusqu'au moment décisif où cette APC bascule vers le MPA par la grâce d'une seule voix: une voix faussant tous les calculs. Il est 19 heures. Devant l'APC d'Alger-Centre, une foule de citoyens se disperse dans un climat de liesse indescriptible: c'est le nouveau maire de la commune, Aldelhakim Bettache du MPA qui vient d'être élu. Il faut dire que la séance était houleuse et s'est déroulée dans un climat électrique à telle enseigne qu'un dispositif sécuritaire imposant a été déployé sur les lieux des tractations. Que s'est-il passé au juste? «Hier, on est entrés pour voter. On était deux coalitions. La première était composée du FLN, RCD, RND et du PT, soit 13 élus. La deuxième, le MPA et Djil Djadid avec 12 élus», raconte le Dr Belmekki tête de liste et élu RCD. «Le wali délégué a eu deux heures de retard. La cérémonie qui devait se dérouler à 14 heures 30 comme prévu dans les convocations ne s'est tenue que vers 16h30», explique le Dr Belmekki. Chacune des deux coalitions a présenté un candidat. «Un traitre dans nos rangs» Les deux candidats qui se disputaient le poste de maire d'Alger, sont l'élu du MPA et celui du FLN. Jusque-là, rien d'anormal. Mais c'est là où a «commencé l'arnaque», selon Dr Belmekki. Il raconte: «Les deux coalitions ne se sont entendues qu'au moment du vote, chaque élu qui sort de l'isoloir ramène avec lui le bulletin du candidat adverse», raconte-t-il. Le problème c'est qu'à la fin du vote, un miracle s'est produit: il y avait un bulletin en plus! «On est trahis par un des nôtres, mais comment se fait-t-il qu'il y ait un bulletin en plus? La seule explication est que des bulletins ont été préparés bien avant et non pas été tapés sur place comme le veut le règlement», dénonce la coalition autour du candidat FLN. Elle s'est rendu compte mais trop tard, elle a perdu le vote. Elle crie au scandale. Tout compte fait, le wali délégué, qui supervisait le scrutin, a refusé de prendre les réclamations des élus coalisés autour du candidat FLN, en justifiant qu'il ne prendra en compte «que des résultats de l'urne». Bien sûr, l'urne est cohérente et ne compte aucun bulletin en plus. L'heureux maire est bel bien le candidat du MPA. A chaud, les déçus quittent les lieux en contestant les résultats. Dans un communiqué toujours à chaud rendu public ces derniers, dénoncent: «Nous informons les médias et l'opinion publique qu'au cours du vote qui a eu lieu pour désigner le président de l'APC d'Alger- Centre au sens de l'article 80 de la loi organique, une fraude s'est déroulée sous l'oeil avisé des autorités en charge de l'organisation du scrutin en découvrant un nombre de bulletins supérieurs à celui des élus qui est de 23», dénoncent-ils ajoutant que «devant ce forfait électoral, les représentants de quatre partis politiques que sont le PT, RCD, RND et le FLN, se sont retirés et refusent les résultats». Carnaval électoral Il y a une grande différence entre «les tractations» d'élus pour désigner les exécutifs municipaux et les accords entre les appareils de partis. Les accords entre élus répondent à des logiques locales. L'installation des exécutifs communaux et de wilaya se déroulent dans un véritable esprit que seules les incohérences des codes, communal et électoral peuvent en créer. Pour K.R, un militant démocrate, cet imbroglio juridique «signe d'une manière flagrante la volonté du système à museler l'expression citoyenne. Ne pouvant pas la contenir totalement, il y est allé à l'aide de cet arsenal juridique pour réduire le plus possible l'impact politique d'une élection, fut-elle locale, à démontrer qu'une alternative au système est possible». Selon lui, au lieu d'un scrutin majoritaire à deux tours qui aurait pu permettre une compétion électorale plus saine mais surtout une expression démocratique, «le pourvoir a réussi à piéger tous les compétiteurs dans sa propre logique de marchandage politique. Cela dit, si les tractations entre élus pour désigner les exécutifs communaux, principalement, répondent à des logiques que seules les données locales peuvent en dicter, il en est autrement des accords signés entre états-majors des partis politiques». En effet, un élu est aussi un représentant du peuple et de ses électeurs. C'est en cela que l'accord signé entre le FFS, FLN, RND à Tizi Ouzou dépasse de loin les simples tractations d'élus. «Il porte le sceau d'une connivence fondamentale autant qu'il exprime un choix politique qui passe au-dessus des légitimités exprimées par les résultats du vote», explique-t-il. Ce qui est incompréhensible est qu'aucun parti n'ait été vigilant quant à ces deux lois que sont le Code communal et le Code électoral, diamétralement opposés. Il est rappeler que seuls les journalistes ont mené une bataille contre ces codes décousus par le FLN et le RND lors de leur présentation au Parlement. Les journalistes ont soulevé toutes les contradictions et ont dénoncé le dépouillement des élus de toute prérogative alors que les partis qui se disent de l'opposition se sont murés dans un silence assourdissant. Aujourd'hui, ils doivent assumer les conséquences.