L'Algérie est à quelques encablures d'une échéance très importante: l'élection présidentielle L'ANP s'acquittera «en toutes circonstances, des grandes et délicates missions constitutionnelles qui lui sont dévolues». Dans un contexte politique, fragile, agité et délicat, l'Armée sort de sa réserve et lance un premier message par la voix du vice-ministre de la Défense nationale, Ahmed Gaïd Salah: «L'ANP a des missions constitutionnelles claires et elle les appliquera à la lettre.» C'est ce qui est compris globalement dans le message adressé hier, par le chef d'état-major lors de la réunion des cadres du système de formation dans l'ANP, tenue à l'Ecole nationale préparatoire aux études d'ingéniorat. Rappelant le rôle primordial de l'ANP dans l'accomplissement de ses missions constitutionnelles, le général de corps d'armée a souligné que ce sont des objectifs d'une extrême importance «qui requièrent de nous, aujourd'hui, de consentir des efforts véloces et continus à plus d'un titre, à la lumière du soutien et des orientations de Son Excellence, le président de la République, chef suprême des Forces armées, ministre de la Défense nationale». Le général-major Gaïd Salah s'exprimait devant les commandants des établissements de formation militaire et des chargés de la formation au niveau des commandements de forces et des directions et services centraux. Face à ce parterre de qualité, le chef d'état-major rappelle avec force les missions de son institution et appuie que l'ANP exécutera parfaitement et complètement «et en toutes circonstances, des grandes et délicates missions constitutionnelles qui lui sont dévolues, en parfaite conformité avec la politique de défense nationale et le besoin de renforcer ses fondements et assises fondamentales». Ces rappels du chef d'état-major interviennent à 34 jours de l'élection présidentielle qui suscite de nombreux commentaires quant au rôle de l'ANP dans cette phase cruciale. D'anciens militaires ont franchement appelé à l'arrêt du processus électoral, comme le général à la retraite, Mohamed Tahar Yala, alors que d'autres personnalités politiques sollicitent son arbitrage pour une phase de transition. Dans les deux interventions qu'il a faites publiquement, l'ancien chef de gouvernement, Mouloud Hamrouche, a réservé une place de choix à l'institution militaire qu'il a encensée et qu'il considère comme sa «maison». Pour M.Hamrouche «il est du devoir de l'armée de réagir» face à la «paralysie dangereuse des institutions». Etrange avatar des situations quand on sait que l'une des raisons qui ont conduit M.Hamrouche à rendre son tablier en juin 1991, était due justement à l'intrusion de l'institution militaire dans le champ politique. Aujourd'hui, soit 23 ans plus tard, M. Hamrouche se dit persuadé qu'«il n'y a aucune chance d'instaurer un système démocratique sans l'aval de l'Armée» et son appel est clair: l'Armée doit intervenir dans le champ politique. L'ancien chef de gouvernement dit craindre surtout l'après-17 avril, car selon lui «une révolte populaire menace le pays». M.Hamrouche signifie-t-il que le pays est réellement menacé de dislocation, comme ce fut dans les années 1990? C'est ce qui expliquerait cette sollicitation de l'institution militaire «ne pas se laisser surprendre par les débordements» qui guettent le pays. Cet appel sibyllin vient-il de recevoir une réponse tout aussi sibylline quand le vice-ministre de la Défense nationale et chef d'état-major, le général Ahmed Gaïd Salah, rappelle que l'ANP s'acquittera «en toutes circonstances, des grandes et délicates missions constitutionnelles qui lui sont dévolues». Un vrai discours ésotérique entre un ancien militaire et un militaire en fonction. Entre les deux, les hommes politiques sans boussole, sans repères se perdent au milieu de l'océan. Où se trouvent les rivages de la paix?