L'image du pape François dans une prière muette face au «mur de l'apartheid» en Cisjordanie a fait le tour des réseaux mondiaux L'image marquante du voyage du pape restera sa prière muette devant le béton du «mur» en Cisjordanie occupée, victoire indiscutable des Palestiniens dans la guerre de «propagande» avec Israël. C'est cette image du pape François penché sur le «mur de l'apartheid» qui restera pour l'histoire malgré la volonté du pape de compatir aux souffrances de tous, selon des analystes. «Une image de la visite du pape est déjà passée dans l'Histoire», affirmait le quotidien israélien Yediot Aharonot, décrivant la photo de sa halte impromptue dimanche devant la barrière de séparation à Bethléem comme «un succès immédiat de relations publiques palestinien». «Les Palestiniens ont été touchés par l'arrêt du pape François au mur de l'apartheid sur le chemin de la place de la Mangeoire» pour y célébrer la messe, «et il a été manifestement ému par cette expérience», a remarqué une dirigeante de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), Hanane Achraoui. En outre, il a «délibérément choisi d'aller directement d'Amman à Bethléem, reconnaissant ainsi dans les faits l'Etat de Palestine», a-t-elle souligné. Lors de la messe à Bethléem, la tribune était ornée d'un tableau géant de la naissance de Jésus, représenté enveloppé d'un keffieh, le symbole national palestinien. Des enfants du camp de Dheisheh ont ensuite offert à François une carte fictive de réfugiés de l'ONU au nom de Jésus, qualifié de «premier réfugié». En chemin, le pape a fait arrêter sa voiture découverte pour descendre au pied de la barrière, une «décision personnelle» selon son porte-parole, Federico Lombardi. «Un mur est un signe de division, le signe de quelque chose qui ne fonctionne pas. Nous avons à créer une situation où l'on n'ait plus à avoir de murs», a plaidé le père Lombardi. A la demande des dirigeants israéliens, mécontents de l'impact de ces images, le souverain pontife a effectué une nouvelle étape imprévue lundi dernier à Jérusalem, au mémorial des victimes d'attentats, accompagné par le Premier ministre, Benjamin Netanyahu. Dans une tribune publiée hier, Eitan Haber, ancien collaborateur du Premier ministre israélien assassiné, Yitzhak Rabin, déplore que «les Palestiniens comme les Israéliens aient dévié du programme initial pour se livrer à une bataille de coups fourrés aux dépens du chef des catholiques». «Beaucoup dans le monde, pas seulement les catholiques, sont navrés par les jeux qui ont été joués en utilisant le pape», estime-t-il. Selon Andrea Tornielli, un vaticaniste italien qui connaît personnellement Jorge Bergoglio, «il n'a été récupéré ni par les Israéliens ni par les Palestiniens», mais a réussi à se montrer «proche des souffrances de tous, de toutes les parties». «François a su être politique en étant religieux, exclusivement religieux», résume Mgr Pascal Gollnisch, directeur général de l'Oeuvre d'Orient, importante ONG d'aide aux églises d'Orient. Pour un commentateur du quotidien Haaretz, Israël a offert, «dans le complexe jeu de poker de la propagande papale, une «quinte flush royale» aux Palestiniens». Il ironise sur «le responsable israélien qui a imaginé le brillant nouveau protocole exigeant que le pape dépose une gerbe sur la tombe de Herzl», fondateur du sionisme, un geste inédit. «Faut-il s'étonner que les Palestiniens aient riposté par un arrêt supplémentaire de leur cru?». «Les Israéliens emmènent leurs visiteurs à Yad Vashem pour rappeler la souffrance juive, il y a plus d'un demi-siècle, à des milliers de kilomètres. Désormais, ils visiteront la tombe de Herzl, mort en Autriche en 1904», explique-t-il. «Mais les Palestiniens montrent eux, le mur, la preuve écrasante, de nzuf mètres de haut, de la souffrance infligée par Israël, ici et maintenant».