L'Union européenne a mis sur pied lundi dernier une opération navale sans précédent pour combattre les trafiquants. Les opérations planifiées par l'Europe pour lutter contre le trafic des migrants en Méditerranée et son assimilation à une nouvelle traite d'esclaves ont été dénoncées par des centaines d'universitaires du monde, sociologues, historiens, ou politologues dans une tribune publiée jeudi. «Une dangereuse perversion de l'histoire est en train d'être colportée», pour justifier le fait «que certaines des nations les plus riches mobilisent leur flotte d'une manière pouvant conduire à la mort des hommes, femmes et enfants venant de certaines des régions les plus pauvres au monde et ravagées par la guerre», accusent les 310 signataires, issus d'universités d'Europe, d'Afrique, d'Amérique et d'Australie. Dans la tribune sur le site Opendemocracy.net, sociologues, historiens, ou politologues, dénoncent comme «totalement fausse et opportuniste» l'assimilation faite en Europe entre ce trafic des migrants et la traite des esclaves. Le Premier ministre italien, Matteo Renzi, qui a appelé l'UE à agir contre les «marchands d'esclaves du XXIe siècle» et le président français François Hollande, qui a fustigé les «nouveaux négriers» de la Méditerranée, ont notamment fait ce parallèle. «Les Africains réduits en esclavage ne voulaient pas se déplacer (...) ceux embarqués vers l'Europe le veulent», relèvent ces universitaires, dont nombre d'entre eux sont issus d'Oxford, Yale ou Sciences-Po (Paris). Ils retournent l'argument contre les pays européens, accusés d'être ceux qui entravent la circulation en sécurité des migrants, poursuivant ainsi «une longue tradition», en vertu de laquelle «les Etats esclavagistes des XVIIIe et XIXe siècle ont usé de violence pour empêcher certains groupes humains de se déplacer librement». «Nous exigeons que les dirigeants européens cessent d'abuser de l'histoire de l'esclavage pour légitimer des actions militaires», poursuit le texte. L'Union européenne a mis sur pied lundi dernier une opération navale sans précédent pour combattre les trafiquants qui, selon la chef de la diplomatie de l'UE, Federica Mogherini, «font mourir» des migrants en Méditerranée. Cette décision, dont l'entrée en vigueur est conditionnée par un feu vert des Nations unies, a été prise un mois jour pour jour après la mort de 800 migrants, dont beaucoup enfermés dans une cale, dans le naufrage d'un bateau de passeurs au large de la Libye. La Commission européenne a présenté mercredi dernier sa stratégie pour une politique migratoire. Quotas, réinstallation et lutte contre les passeurs font partie des mesures qui seront débattues ces prochains jours. Quant à la proposition phare, organiser une répartition de demandeurs d'asile dans l'Union européenne, le mécanisme des quotas selon des critères tels que le PIB, le nombre d'habitants, de demandeurs d'asile accueillis depuis 2010, de réfugiés réinstallés, le taux de chômage ont engendré des réactions dont la plus hostile est celle de la Grande-Bretagne.