En attendant, la France n'a pas encore reconnu ce crime La France a procédé, jusqu'en 1966, à 17 essais nucléaires dans le Sahara algérien. Gerboise, un nom de code qui sied mal au «gentil et doux» petit rongeur du Sahara, le «Djerbou'», a été attribué au tout premier essai nucléaire français, réalisé un certain 13 février 1960 sur le sol algérien, dans la zone de Hamoudia, à Reggane plus précisément, qui se situe à 150 km au sud d'Adrar. Ce crime contre l'humanité, immonde et dévastateur, ordonné par le général de Gaulle, avait déjà été dénoncé dans un document «choc» publié dans le journal français «Le Parisien». Il s'agit d'une carte relative à ces essais nucléaires. Classée «secret défense» sur décision de l'armée, cette carte n'a été dé-classifiée qu'au mois d'avril 2013. Elle montre l'étendue des retombées radioactives du premier essai nucléaire aérien effectué dans le Sahara. Cette explosion, quatre fois plus importante que la terrible bombe d'Hiroshima, de triste souvenir, avait permis à la France d'entrer de plain-pied dans le «Club» fermé des puissances nucléaires. Suivront d'autres «Gerboises» blanche, puis rouge, puis verte...en tout, pas moins de 13 autres essais, souterrains cette fois-ci. Au total donc, la France aura procédé à pas moins de 17 essais nucléaires dans le Sahara algérien jusqu'en 1966, soit quatre ans plus tard que l'indépendance du pays. Aujourd'hui, le grand public commence à découvrir l'étendue exacte des retombées nucléaires dans la région, à partir de cette «simple» carte. Le document en question montre de vastes zones de contamination, allant bien au-delà du Sahara algérien, observées jusqu'à deux semaines après le premier tir aérien de février 1960. En effet, des retombées radioactives ont été observées dans les pays subsahariens comme le Mali, la Mauritanie, la Côte d'Ivoire, le Sénégal, le Niger, la Centrafrique, le Tchad et le Ghana. Son impact pour la santé humaine se mesure douloureusement aujourd'hui (et hier) de par ses effets désastreux pour l'homme, la faune et la flore dans la région. Ainsi, le plus important préjudice recensé a été celui touchant la santé des habitants de la région à travers l'apparition de maladies diverses et inconnues, caractérisées par des malformations de tous types ainsi que des cas conséquents de cancer et de cécité. Une vingtaine de maladies cancéreuses a été répertoriée comme étant une résultante directe de la radioactivité par l'Organisation mondiale de la santé (OMS), dont certaines de contamination immédiate par la radioactivité et d'autres pouvant être développées à long terme. Le parcours du nuage «tueur» est connu. Un jour après l'explosion, il traverse le grand Sahara, en fonction des vents, et atteint Tamanrasset. En l'espace de 24 heures, l'Afrique subsaharienne est touchée. En Afrique centrale, Ndjamena et Bangui le sont aussi. A peine quatre jours après l'explosion, le nuage remonte vers l'Afrique de l'Ouest pour atteindre Bamako. Deux semaines après, toujours chargé de radioactivité, il atteint même les côtes méditerranéennes espagnoles, ainsi qu'une bonne moitié de la Sicile. Le mythe de la «bombe propre» à jamais enterré, conduit les vétérans français des campagnes nucléaires à demander réparation, pour les essais sahariens et polynésiens. Ce sont eux, et indirectement les victimes algériennes qui ont elles aussi saisi la justice, qui ont permis la dé-classification du document du Parisien. Les tests effectués ces dernières années, révèlent l'existence d'un «taux élevé» de radioactivité dans la région de ce drame innommable.«Crimes contre l'humanité», «crimes abjects et abominables», «violation des droits de l'Homme», ce sont là quelques qualificatifs décrivant ces essais nucléaires français et ses séquelles qui s'identifient à un drame qui interpelle la France sur son passé colonial. «L'horreur» est également relatée par les populations vivantes encore, témoins des fortes secousses ayant ébranlé la région de Reggane et les zones environnantes. Le porte-parole des victimes de ces essais en a appelé, à ce propos, aux responsabilités de la France coloniale, l'obligation d'indemniser les populations affectées par l'onde de dommages qui s'en est suivie. Un préjudice illimité sur la population et l'environnement sévit toujours d'autant plus que des déchets nucléaires demeurent sur le site des expérimentations, non encore assaini de la nocivité de la radioactivité. Une responsabilité qui continue, par ailleurs, d'interpeller la France, auteur des essais de Reggane mais aussi d'In Ecker (Tamanrasset) et des essais chimiques de Oued Namous (Béchar). Récemment le ministre des Moudjahidine, Tayeb Zitouni, avait soutenu à Paris qu'il était «grand temps» que l'Algérie et la France se penchent sur les dossiers en suspens dont celui relatif aux essais nucléaires. Une Commission inhérente aux essais nucléaires et axée principalement sur l'indemnisation des victimes. Pour rappel, un texte réglementaire (la loi Morin du 5 janvier 2010), préconise la reconnaissance et l'indemnisation par la France des victimes de ses essais nucléaires entrepris dans ses ex-colonies. Néanmoins, aucune victime algérienne n'a été indemnisée jusqu'alors dans le cadre de cette loi. La visite en Algérie en avril 2015, du secrétaire d'Etat français aux Anciens Combattants, Jean-Marc Todeshini, la veille de la commémoration des manifestations du 8 Mai 1945, se voulait être pourtant l'expression d'une volonté «concrète» de la France d'assainir cette page d'histoire entre les deux pays. Avant lui, c'est le chef de l'Etat français, François Hollande qui, en décembre 2012, avait soutenu que les conséquences des essais nucléaires étaient «pleinement assumées et prises en compte par l'Etat rançais qui agit en toute ransparence». Le président de l' «Association du 13 février 1960», Omar Hamel, a appelé à la nécessaire prise en charge des victimes des essais nucléaires français effectués à Reggane et à la décontamination des sites des déchets radioactifs qui continuent à faire de Reggane et des régions affectées des zones d'essais, lesquelles coûtent la vie aux habitants et des fonds colossaux à l'Etat dans le cadre de la prise en charge des victimes.