Sentant arriver au galop la fin du mois de février, Abdelhamid Bourezg, le juge, a présidé son audience en roue libre... Depuis la nuit des temps, le tribunal de Bir Mourad Raïs a vu défiler derrière les pupitres des différentes sections toutes disciplines confondues des lumières dont certaines ont été au plus haut sommet de Dame Justice. Mohammed Khellafi par exemple est aujourd'hui procureur général adjoint à Tipasa alors qu'il y a un quart de siècle, il était sur le siège du ministère public dudit tribunal. A cette époque-là, Mourad Belalta, l'actuel président de la section correctionnelle du tribunal de Bir Mourad Raïs gigotait dans le landau de la famille à El Khemis, à deux pas du cabinet du bâtonnier Abdelkader Brahimi, toujours en exercice mais à...Blida, car à El Khemis, c'est plutôt gris... Et Belalta a, entre-temps, grandi, étudié, été jeté à l'Ecole supérieure de la magistrature et en est sorti plus qu'un major. Il occupe le siège du mardi avec un rôle aussi monstrueux que ceux de Samira Kirad, la juge du jeudi et Abdelhamid Bourezg, l'«ogre» du mercredi, comme aiment à le nommer les inculpés aux gros délits tels ceux coupables de coups et blessures volontaires sur ascendants, ceux qui boivent et prennent le volant par exemple. Et si Bourezg est un «ogre» en matière d'application de la loi, Belalta, lui, n'en est pas loin. L'essentiel étant de rendre justice sans complaisance certes, mais rigoureusement, histoire de prouver que cette nouvelle génération est là pour «casser» les us et coutumes malsains ou encore des tabous qui défigurent la magistrature. Ce mardi, Mourad Belalta était, encore une fois, dans son jour. Il a devant lui deux individus qui s'affrontent autour d'une escroquerie que les deux parties se jettent au visage en attendant que la Justice tranche. Et ce magistrat posé, appliqué, qui sait écouter et même décortiquer un dossier qualifié de... lourd par le représentant du ministère public a, comme d'habitude, su suivre les déclarations des uns et des autres ainsi que leurs conseils. L'assistance, composée de novices en matière de tenues d'audiences pénales, suit sans tenir le fil qui mène à la compréhension de la «chose». Deux parties côte à côte! Hou là là! Et lorsque nous écrivons les deux parties, nous sous-entendons inculpé-victime. Une partie demandante et une autre en face repoussant de toutes ses forces l'inculpation. L'habitude des audiences nombreuses auxquelles nous assistons nous pousse à nous interroger sur ce que vont raconter les deux parties i-e les deux hommes, l'inculpé d'abord et la victime ensuite. L'inculpé n'a, peut-être pas, le même statut que la victime, mais ils ont les mêmes «privilèges», comme par exemple, toute la latitude et le temps pour expliquer leurs positions. Et lorsque deux adversaires ont en face d'eux, un magistrat du siège tolérant, c'est une bonne justice qui se profile. Ce qui n'est pas admis, c'est le mensonge ou les déclarations contradictoires. Pire! Lorsque ces déclarations contradictoires contredisent celles faites durant l'instruction ou le jour de la présentation. Là, nous prions souvent Allah pour qu'il ouvre le coeur du juge qui se doit de faire court, sinon nous passerions la journée... Heureusement que dans cette affaire, il s'agit de deux - pas amis, ni copains -, écrivons tout simplement connaissances, qui se sont jetées dans le bassin d'un loyer qui ne dit pas son nom avec comme «cartouches» un papier de «gardiennage» et deux déclarations de versements pour le prévenu 60 millions de centimes et la victime 270 millions de centimes. Quel cafouillage sans notaire! Or, ce jour, il semble que l'amiable ait joué. L'inculpé-détenu n'a qu'un désir! la liberté provisoire. «Nous nous sommes mis d'accord pour régler le litige!», dit l'avocat de l'étourdi qui s'était tiré une balle dans le pied en faisant ce qu'il croyait être une affaire, mais qui s'était trouvé avec une cheville prise dans un piège à ours dans les bois en décembre. Comme d'habitude, Bourezg juge les seuls faits et pour une fois, va devoir se priver de son pêché mignon: les mini-prêches qu'il adore distribuer lorsque son rôle est tolérant et le temps à sa portée. Disons que ce mercredi, a dû pousser ce bon magistrat à faire fi d'un mauvais sang qui ne vaut pas le coup d'être vécu...