La présidentielle française est lancée «Je reconnais les responsabilités des gouvernements français dans l'abandon des harkis, les massacres de ceux restés en Algérie...», a déclaré hier le locataire de l'Elysée. On pensait que le chef de l'Etat français était réellement décomplexé par rapport à la guerre d'Algérie et qu'il prêtait de réelles et honnêtes intentions pour entamer une écriture apaisée et objective des exactions commises par l'armée française et ses supplétifs pendant plus de 132 ans d'une colonisation sauvage et barbare. Une période durant laquelle le peuple algérien a été spolié de sa terre, subi la torture, les massacres et les enfumages. Ne le voilà-t-il pas éprouver un sentiment de culpabilité envers ceux qui ont préféré prendre les armes pour combattre leurs frères qui ont décidé de libérer leur Algérie. Des harkis qui resteront des traîtres pour les Algériens. Que ceux parmi eux qui ont suivi la France dans sa retraite aient été marginalisés, parqués dans leur patrie d'adoption est une chose. Une histoire franco-française. Affirmer par contre que ceux qui sont restés en Algérie ont été massacrés, exterminés...relève du mensonge, de la manipulation de l'histoire. Les responsables algériens de l'époque n'ont en tout cas jamais lancé de mot d'ordre de ce type. Aucun historien digne de ce nom n'en fait référence. Le chef de l'Etat français ne l'a pas souligné dans le discours solennel qu'il a prononcé hier aux Invalides lors de la Journée d'hommage aux harkis, instituée en 2003 par l'ex-président Jacques Chirac, où il a reconnu la «responsabilité des gouvernements français dans l'abandon des harkis». «Je reconnais les responsabilités des gouvernements français dans l'abandon des harkis, les massacres de ceux restés en Algérie et les conditions d'accueil inhumaines des familles transférées dans les camps en France», a déclaré le chef de l'Etat français. Que ce dernier compatisse à ce que la République française a fait subir à ses harkis c'est tout à fait son droit. Mais qu'il laisse la porte ouverte à des massacres qu'auraient subi ceux qui n'ont pas suivi ou pu suivre la France, sur lesquels l'Algérie officielle naissante aurait fermé les yeux ressemble à un coup de poignard dans le dos. François Hollande était considéré comme un grand ami de l'Algérie, un pays avec lequel il avait décidé de construire un partenariat d'exception et gommer tous les malentendus hérités de son prédécesseur, Nicolas Sakozy, l'ex-président qui faisait partie de l'assistance lors de cet hommage rendu aux supplétifs de l'armée française qui ont pris les armes contre les combattants de l'Armée de Libération nationale a salué à sa manière leur action. «Le drame des harkis est celui de toute la France. [...] Une tache de sang indélébile reste sur notre drapeau», avait déclaré le 24 septembre, à Perpignan, le président du Parti les Républicains candidat de la primaire à droite de la prochaine présidentielle, près du camp de Rivesaltes (Pyrénées-orientales) où ont été parqués des harkis lors de leur arrivée en France. Les deux hommes qui ambitionnent de décrocher un nouveau bail au Palais de l'Elysée sont donc partis à la chasse aux voix de cette frange particulière de l'électorat français estimée à quelque 500.000 personnes, un réservoir traditionnellement acquis à l'extrême droite. François Hollande en bien mauvaise posture dans les sondages, sait pertinemment que pour se refaire une santé, toute voix sera la bienvenue. C'est donc en connaissance de cause qu'il a décidé d'aller chasser sur les terres de Marine Le Pen, la présidente du Front national serait même présente dans presque tous les cas de figure au second tour de l'élection présidentielle - qui doit se tenir, en principe, en mai 2017 - selon les instituts de sondage. «La grandeur est toujours du côté de ceux qui réparent plutôt que de ceux qui séparent», a souligné dans son discours l'actuel locataire de l'Elysée. Pas sûr qu'avec la «griffe tendancieuse de son message», que cela soit perçu de la sorte par ses «amis» algériens et même dans son propre camp.