Le camion-bélier qui a servi au terroriste «Je sais que cela serait pour nous particulièrement difficile à supporter s'il se confirme que cet acte a été commis par une personne qui a demandé à l'Allemagne protection et asile», a déclaré la chancelière allemande. Condamnés par la majorité des capitales dans le monde ainsi que par l'Onu, les attentats terroristes qui ont ciblé lundi dernier l'ambassadeur russe tué à Ankara et le marché de Noël à Berlin, en Allemagne, ont également suscité une vague d'émotion considérable. Plus que jamais, les pays européens sont en état d'alerte générale, d'autant que ces attentats sont intervenus en période de fêtes de fin d'année. En décidant de frapper le même jour en Turquie et en Allemagne, les commanditaires ont sans doute voulu transmettre un message, sanglant comme à leur habitude. S'agissant du meurtre inqualifiable de l'ambassadeur russe, il est clair qu'il vise à compromettre le rapprochement entre Moscou et Ankara et à saboter la réunion programmée hier sur la Syrie. D'ailleurs, la Russie et l'Iran, alliés de Bachar al-Assad, et la Turquie, soutien des rebelles syriens, ont convenu hier de l'importance d'étendre le cessez-le-feu en Syrie, après des discussions tripartites à Moscou de leurs chefs de la diplomatie. Les trois pays, qui se réunissaient sans les Américains ou les Européens, ont par ailleurs souligné être prêts à être les «garants» de négociations de paix entre le régime syrien et l'opposition, selon le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov. En Allemagne, l'objectif des terroristes est non seulement de punir ce pays qui est membre de la coalition internationale en Irak et en Syrie mais aussi et surtout de déstabiliser la chancelière Angela Merkel, artisan de l'accueil massif de près d'un million de réfugiés. Décriée par l'opposition et même au sein de son propre parti, la CDU, pour cette politique en faveur des migrants, elle a enregistré lors des récentes élections régionales un désaveu inquiétant et se voit contrainte de revoir la copie. Elle a dès lors qualifié hier d'»attentat terroriste» l'attaque au camion-bélier la veille sur un marché de Noël de Berlin pour indiquer que son auteur était probablement un demandeur d'asile. «Je sais que cela serait pour nous particulièrement difficile à supporter s'il se confirme que cet acte a été commis par une personne qui a demandé à l'Allemagne protection et asile», a-t-elle déclaré à la presse dans sa première réaction depuis le carnage de la veille qui a fait 12 morts. Réagissant à cet attentat, le président russe Vladimir Poutine s'est dit «choqué» par la «brutalité et le cynisme» de l'attaque du marché de Noël. Le chef de l'Etat russe «a présenté ses condoléances au président allemand J. Gauck et à la chancelière allemande Angela Merkel en affirmant que «ce crime commis contre des civils choque par sa brutalité et son cynisme». Une brutalité et un cynisme déjà manifestes dans le meurtre commis à Ankara d'où a été lancée une menace claire et directe. La référence du policier qui a tué l'ambassadeur russe aux évènements d'Alep et à la soif de vengeance qui anime sa confrérie ne souffre d'aucune ambigüité. Daesh vaincu à Alep, acculé à Mossoul, menacé dans ses derniers retranchements à Raqqa et quelques poches dans la province d'Idleb, a la réaction du fauve blessé. Il doit montrer, coûte que coûte, que ses capacités de nuisance demeurent intactes et que la partie est loin d'être finie. La question qui hante les esprits, au lendemain de ces deux attentats, est la suivante: à qui le tour? Démonstration a été faite que l'EI peut encore frapper n'importe quand et n'importe où. D'où un branle-bas de combat sans précédent dans les pays qui se savent des cibles premières, la France, la Belgique et, à un degré moindre, la Hollande. La vigilance y a été renforcée et les dispositifs de prévention multipliés. En maintenant la pression et en rééditant à chaque occasion ses attentats aveugles, l'organisation terroriste poursuit un double objectif. Se venger, comme il a été dit, de chaque pays membre de la coalition internationale dont les bombardements massifs en Irak et en Syrie ont quelque peu ébranlé ses certitudes, d'une part, et d'autre part forcer ces pays qui accueillent d'importantes communautés de musulmans, pour l'essentiel maghrébine et turque, à verser dans une islamophobie outrancière. Laquelle islamophobie qui s'est beaucoup accrue depuis les attentats qui ont ciblé la France et la Belgique, notamment, nourrit l'extrémisme dont le triomphe politique aura pour conséquence de radicaliser les droites traditionnelles et d'entraîner un déclin inéluctable de ces mêmes pays.