Les deux producteurs ont prôné le rapprochement entre nos deux pays «frères» en diffusant plus de films algériens en Tunisie. Dans le cadre de la semaine cinématographique qui a élu domicile depuis mercredi dernier à la cinémathèque algérienne, une conférence de presse a été animée dans la matinée par deux spécialistes en la matière qui nous ont donné un aperçu global sur l'état de la production cinématographique en Tunisie et faire le parallèle avec l'Algérie. Ibrahim Letaïf, producteur mais aussi scénariste et réalisateur de nombreuses comédies et président de l'Association agence de court métrage et du documentaire, dira d'emblée, être un défenseur de la langue de Voltaire à propos de son court métrage La Dictée (Visa) 2004 qui a obtenu plusieurs récompenses dont le Tanit d'or JCC Carthage (2004), le grand prix du court métrage au Bénin (2004), le prix du public à Milan (2005) ou encore le prix de la jeunesse à Tétouan (2005). «C'est impossible qu'un film algérien, tunisien ou maghrébin soit rentable dans son propre pays vu l'exiguïté des salles et du marché», dira pour sa part Nejib Ayed, critique cinématographique et producteur notamment de feuilletons pour la télé, et de souligner : «15% des coûts de production sont récupérés en Tunisie. Cela n'engage même pas à faire des films. Notre cinéma est financé en partie par l'Etat. Moi, je mets 20% de ma propre poche, de ma société. Le reste est subventionné par l'Etat aussi bien par le ministère de la Culture que la télé, et qui revient à environ 35 à 40%. Cela nous aide énormément. La télé coproduit nos films de façon quasi systématique. C'est dû en partie au fait que des gens qui étaient dans notre camp sont passés à la télé». Et d'évoquer le système algérien: «En Algérie, ce n'est pas tout à fait le cas. Les films tunisiens passent sur la télévision algérienne. C'est déjà une bonne chose mais il faut arriver à un arrangement pour créer des paramètres qui permettent de financer nos films entre nous». M. Nejib Ayed expliquera l'absence du public par la décentralisation de la population, notamment. «Il existe des salles de cinéma qui datent des années 50. Les gens habitaient dans des zones urbaines. Aujourd'hui, ils habitent les banlieues. Ils doivent se déplacer pour aller au centre-ville. Le public n'est pas au rendez-vous». Pour y remédier, des multiplexes sont créés nous apprend-on. «Or, les centres culturels qui ont pris la relève n'arrangent pas les choses car il faut que les gens apprennent à aller au cinéma comme si c'était un spectacle, car s'en est un», avoue Nejib Ayed. Pour Ibrahim Letaïf «nous avons toujours étés catalogués de cinéma du tiers-monde. Je suis pour la diversité du cinéma», dit-il et de relever : «Le réalisateur Belkacem Hadjadj est en train de réaliser un site, un projet qui m'est très cher, celui de réunir tous les acteurs du Maghreb». Et Najib Ayed de constater avec dépit: «Nous n'avons pas la possibilité de voir vos sites-com ou vos feuilletons algériens sur la télévision tunisienne». Et de lancer un coup de gueule : «Montrer des feuilletons égyptiens sur des chaînes publiques, c'est un crime ! Les Libanais produisent pour des raisons économiques. J'ai envie de voir une image qui me ressemble. Il faut que les pouvoirs publics prennent en considération la notion de proximité». A propos de l'éventuelle ingérence de l'Etat dans la production cinématographique tunisienne, vu que, question financement, il se taille la part du lion, Najib Ayed confie : «Tout le monde sait que nous avons un problème de liberté d'expression». «Mais je peux vous assurer que la censure est minime. C'est nous qui naviguons entre les commissions..», ajoutera Ibrahim Letaïf.