Profondément divisés sur la politique commune d'asile, et en particulier sur le système de répartition obligatoire des réfugiés, les Européens peinent à dissimuler leurs divergences, dévoilées au grand jour à la fin de l'année 2017 suite à la polémique qui a éclaté au coeur même des institutions de l'UE. Plus de deux ans après la crise migratoire sans précédent qui a fait vaciller son unité et menacer son existence, l'UE n'a toujours pas réussi à accorder les violents sur la réponse à apporter au défi des réfugiés. Même la réduction de plus de moitié (63%) du nombre total de migrants irréguliers vers l'Europe, annoncée en novembre n'a pas aidé les dirigeants européens à surmonter leurs désaccords. En témoigne la récente querelle entre le président du Conseil européen, Donald Tusk et un membre de l'exécutif européen, le commissaire à la migration, Dimitris Avramopoulos. Alors que la Commission européenne s'efforce de relancer son programme de quotas pour l'accueil des réfugiés, le président du Conseil européen a jeté un pavé dans la marre à la veille du sommet européen de décembre, le dernier de l'année 2017. Dans une lettre adressée aux dirigeants européens, Donald Tusk a affirmé que le débat autour de la possibilité de mettre en place des quotas obligatoires de répartition des réfugiés «s'est révélé hautement conflictuel» et le mécanisme «inefficace», les exhortant à «s'engager plus directement sur les questions politiques sensibles de la migration». Ces déclarations ont soulevé le courroux du commissaire Avramopoulos qui a qualifié le document préparé par le président du Conseil européen d'«inacceptable» et d' «anti-européen». Le porte-parole de la Commission européenne Margaritis Schinas a exprimé, pour sa part, «la forte désapprobation» de l'exécutif, soutenant que le programme de répartition des réfugiés «n'a pas été imposé, mais adopté» et a permis «la relocalisation de 90% des personnes éligibles». Bien que la question de la migration a été à l'ordre du jour du sommet européen, aucune conclusion n'a été adoptée à ce sujet. A la fin du débat organisé autour du dîner de travail, les Européens sont restés plus divisés que jamais. Il y a deux ans, pour faire face à la crise migratoire, la Commission européenne a lancé un programme de relocalisation et de réinstallation des demandeurs d'asile, qui a pris fin le 26 septembre dernier. Le plan prévoyait de répartir dans les différents Etats membres les demandes de 160 000 migrants en deux ans arrivés en Italie et en Grèce, confrontés à un afflux massif de migrants. Mais plus de deux ans plus tard, seuls 32 000 migrants ont pu être relocalisés dans certains Etats membres de l'UE. Trois pays d'Europe centrale et orientale, la Hongrie, la Pologne et la République tchèque qui refusent toujours d'accueillir des migrants dans le cadre de la relocalisation, ont été renvoyés devant la Cour de justice de l'UE. Pour prendre la suite de ce programme de répartition des migrants, la Commission a annoncé le 27 septembre dernier la mise en place d'un nouveau programme de réinstallation de réfugiés qui permettra d'accueillir 50 000 autres personnes dans l'UE durant les deux prochaines années, notamment depuis des pays d'Afrique du Nord. Un budget de 500 millions d'euros à titre d'aide aux efforts de réinstallation des Etats membres a été «mis en réserve» par l'exécutif européen afin d'encourager les Etats à offrir plus de place d'accueil. Contrairement au programme de «relocalisation» de demandeurs d'asile depuis l'Italie et la Grèce, arrivé à échéance le 26 septembre 2017, le nouveau programme n'instaure pas de quotas obligatoires, mais relève de la bonne volonté des Etats membres à accueillir des réfugiés. L'UE a recouru également à l'externalisation des contrôles migratoires en sous-traitant leur exercice à d'autres acteurs, essentiellement les Etats d'origine et de transit des migrants. En mars 2016, la Turquie et l'UE concluent un deal. En échange de quelques milliards d'euros et de la réouverture des négociations avec l'UE, Ankara s'engageait à stopper les flux et à accepter le retour de tous les migrants arrivés après le 20 mars (date de l'entrée en vigueur de l'accord) dont la demande d'asile aurait été rejetée.