La Commission européenne a durci le ton, hier, face aux Etats membres de l'UE, en menaçant de sanctions ceux qui refusent d'accueillir des réfugiés, tout en appelant à durcir les mesures nationales contre les migrants économiques. Sur ces deux facettes de sa politique migratoire, la Commission a adressé un message de fermeté, sur fond d'arrivées incessantes sur les côtes italiennes et de fragilité du partenariat noué avec la Turquie pour mettre fin aux traversées massives en mer Egée. «Il en va de notre devoir de pouvoir affirmer clairement, aux migrants, à nos partenaires dans les pays tiers et à nos concitoyens, que si des personnes ont besoin d'aide, nous les aiderons, sinon, elles doivent rentrer», a insisté le vice-président de la Commission, Frans Timmermans. L'exécutif européen «n'hésitera pas» à lancer des procédures d'infraction contre les pays refusant d'accueillir des demandeurs d'asile depuis l'Italie et la Grèce, a prévenu devant la presse le commissaire chargé des migrations, Dimitris Avramopoulos. Le commissaire avait jusque-là surtout insisté sur sa préférence pour le dialogue afin de «les convaincre». Quelque 13.500 demandeurs d'asile ont pour l'heure été «relocalisés» depuis la Grèce et l'Italie (dont environ 9.600 depuis la Grèce), alors que les autres pays européens s'étaient engagés en septembre 2015 à en répartir jusqu'à 160.000 en deux ans. «Plus d'excuses» Ce plan, réservé aux migrants ayant le plus de chances d'obtenir un statut de réfugiés (principalement les Syriens et les Eyrthréens), visait à la fois à montrer la solidarité de l'UE avec ceux qui fuient la guerre et à soulager l'immense pression sur Athènes et Rome. Mais la Hongrie, l'Autriche et la Pologne «refusent toujours de participer au programme», tandis que d'autres (la République tchèque, la Bulgarie, la Croatie et la Slovaquie) «n'y prennent part que dans une mesure très limitée», a déploré la Commission. De fait, les objectifs du plan, contesté en justice par la Hongrie et la Slovaquie, ont été considérablement réduits: 54 000 places (sur les 160 000) ont été rendues disponibles pour des «réinstallations» de Syriens depuis la Turquie, dans le cadre du pacte migratoire scellé en mars 2016 avec Ankara. Et ce même accord a considérablement fait chuter les arrivées en Grèce, avec des «traversées quotidiennes entre la Turquie et les îles grecques qui sont passées de 10.000 personnes par jour en octobre 2015 à 43 par jour aujourd'hui», selon la Commission. Rétention Le nombre de personnes éligibles à une relocalisation depuis la Grèce est désormais estimé à environ 20 000 par la Commission, contre près plus de 5 000 en Italie, où la plupart des arrivants sont considérés comme des migrants économiques. Mais même ce total de moins de 30 000 personnes restant à répartir dans l'UE ne sera pas atteint au rythme actuel. «Il n'y a plus d'excuses» pour les Etats membres, a insisté M. Avramopoulos. Bruxelles a aussi présenté jeudi un «plan d'action» pour renvoyer de manière beaucoup plus systématique les migrants économiques. La Commission, qui a proposé de mettre à disposition 200 millions d'euros en 2017, demande notamment aux Etats membres de raccourcir «les délais de recours» contre les décisions de retours, qui ne doivent plus «comporter de date d'expiration». Elle a pressé tous les Etats membres à placer «en rétention les personnes auxquelles une décision de retour a été signifiée», dès lors qu'il y a un «risque de fuite», et à autoriser des durées de rétention d'au moins six mois. Les centres de rétention ne doivent pas «être considérés comme quelque chose ressemblant à des camps de concentration, ce qui serait très éloigné de nos principes», s'est défendu M. Avramopoulos. Les négociations d'accords de réadmission avec des pays tiers doivent être accélérées, a également demandé l'exécutif européen, appelant «à la conclusion rapide» avec le Nigeria, la Tunisie et la Jordanie, et à «nouer un dialogue avec le Maroc et l'Algérie». Interrogé sur la possibilité d'installer des camps de migrants en Afrique, où l'UE ferait le tri entre réfugiés et migrants économiques, M. Avramopoulos a assuré qu'«on n'en est pas encore arrivés à ce stade».