Irrationnel. L'organisation pour l'interdiction des armes chimiques (Oiac) a commencé, hier, son enquête dans la ville de Douma près de Damas. Soit 24 heures après les frappes militaires des coalisés (Etats-Unis, Angleterre et France) contre la Syrie. Ce calendrier pose un sérieux problème sur l'intelligence humaine et même sur les capacités de raisonnement du monde occidental. Sur quoi vont enquêter les experts de l'Oiac? Officiellement ils vont vérifier si la Syrie respecte la convention sur l'interdiction des armes chimiques qu'elle a signée au même titre que les 191 autres Etats membres. C'est-à-dire chercher à confirmer ou infirmer les accusations des pays occidentaux sur l'utilisation des gaz toxiques par l'armée syrienne contre la population civile. S'il est vrai que c'est le gouvernement syrien qui a lui-même invité l'Oiac à procéder à une enquête sur son territoire, elle l'a fait le 10 avril dernier. Soit quatre jours avant les attaques aux missiles américains, anglais et français. Pour résumer, les enquêteurs ont été invités avant les attaques et ils commencent leur travail deux jours après. Ce qui n'est pas normal. Pourquoi? L'Oiac est une organisation onusienne qui a son siège à La Haye (Pays-Bas). Les Etats-Unis, la France et l'Angleterre sont membres de cette organisation. Ces trois pays ont lancé leurs missiles (une centaine) contre la Syrie dans la nuit de vendredi à samedi dernier parce que, disent-ils, ils ont «la preuve que l'armée syrienne a utilisé des armes chimiques contre la population civile». Dès lors, l'esprit rationnel aurait voulu que ces pays fournissent ces «preuves» aux enquêteurs de l'Oiac pour leur éviter de faire le déplacement jusqu'en Syrie. Ils auraient ainsi gagné du temps et de l'argent. Et le monde entier aurait, par la même occasion, pris connaissance de ces «preuves». Eh bien non, ces trois pays coalisés n'ont pas pensé ou n'ont pas voulu, ou tout simplement n'ont pas pu opter pour ce cas de figure de gestion intelligente des affaires du monde. Effectivement, ce n'est pas intelligent de leur part. Car et si les experts de l'Oiac ont maintenu leur enquête malgré les «certitudes» des coalisés, c'est qu'ils ont des doutes sur les «preuves» qu'ils disent détenir. Une telle position a déjà son effet contre-productif sur la crédibilité de ces pays. L'opinion mondiale suit cette enquête. Dans le cas où l'enquête aboutit à l'inexistence de ces armes chimiques, le monde entier aura la preuve, réelle cette fois, du mensonge utilisé par l'Occident pour étaler sa force contre tous ceux qui refusent la soumission. Il y a de fortes probabilités sur l'issue de cette enquête. Elles sont basées sur le fait que c'est la Syrie qui a invité officiellement les enquêteurs. De plus, le lancement des missiles par les coalisés la veille de l'enquête peut laisser penser que c'est la politique du fait accompli qui a prévalu dans la prise de décision. Les peuples du monde et l'histoire graveront ces moments qui rappellent la «politique de la canonnière» du XXe siècle. Et la doctrine du «Big Stick» (gros bâton) du XIXe siècle. Le tout sous emballage des «droits de l'homme» et de la «démocratie»!