La règle des 51%-49% un frein à l'investissement étranger... Si cette règle défend l'intérêt de l'entreprise tout en freinant l'investissement étranger, il est indispensable de trouver une solution de juste milieu. Qu'est-ce qui a pu bien changer entre décembre et hier? En décembre dernier, le ministre de l'Industrie, Youcef Yousfi, avait balayé toutes les critiques des hommes d'affaires étrangers sur la règle des 51%-49%. Il avait alors déclaré au micro de la chaîne Une de la Radio nationale «les gens commencent à apprendre ce qu'est cette règle, nous n'avons pas de problème», précisant que «les grandes entreprises américaines, saoudiennes, allemandes, françaises, chinoises ou saoudiennes sont présentes en Algérie (...).Certaines petites entreprises disent qu'elles ne trouvent pas de partenaire algérien avec qui s'associer, mais les gens commencent à comprendre comment cette règle est appliquée sur le terrain». Cette affirmation du ministre était une réponse aux nombreuses critiques émises notamment par le Medef, en visite à cette période en Algérie. Hier et au forum d'Echaâb, Youcef Yousfi semble annoncer l'intention de l'Etat d'abandonner cette règle imposée dans la loi de finances de 2009. «La règle des 51% - 49% n'est pas un texte sacré et ce n'est pas du Coran», a affirmé le ministre au forum Echaâb, a ajoutant que «l'Etat est disposé à la revoir dans le fond, si l'intérêt de l'Algérie le dictait». Pour une annonce, c'en est une! Et elle fera le bonheur de tous les investisseurs étrangers! Mais pourquoi l'Etat a-t-il pris cette décision maintenant après avoir défendu fermement cette règle pendant près d'une dizaine d'années? Faut-il rappeler les déclarations de Ahmed Ouyahia, deux ans après l'instauration de cette règle, lorsqu'il avait soutenu, lors des travaux d'une réunion de la tripartite, «il a souvent été dit que la loi de finances complémentaire 2009 a introduit des mesures contraignantes pour l'investissement, alors que cette législation veut donner une chance au capital national et à l'entreprise algérienne chez eux en Algérie. Au demeurant, la règle dite des 51%-49% dans l'investissement, a été en fait admise par nos partenaires comme en témoignent les importants projets conclus ou en cours avec de grandes entreprises occidentales». Même le Forum des chefs d'entreprise (FCE) défend cette règle. Son patron, Ali Haddad, a affirmé «au FCE, nous défendons cette règle. Nous soutenons le président de la République sur cette loi. La règle en question protège l'entreprise algérienne. Ce n'est pas parce que cette règle est là qu'on ne peut pas faire des affaires». Et cet avis, très défendu par la secrétaire générale du Parti des travailleurs qui considère que la règle des 51%-49% relève de la souveraineté du pays, est également partagé par les Américains dont le rapport 2017 sur le climat d'investissement dans le monde, du département d'Etat américain, a indiqué qu'à l'opposé des PME, les grandes entreprises américaines «peuvent trouver des façons créatives pour travailler dans le cadre de la règle 51%-49%». Il explique, en se référant aux précisions apportées par le gouvernement algérien sur l'institution de cette mesure, que cette règle vise à empêcher la fuite des capitaux, protéger les entreprises algériennes, créer de l'emploi pour les nationaux et assurer un transfert de technologie. L'investisseur étranger peut dans certains cas détenir la majorité du capital d'une entreprise mixte en s'associant avec plusieurs partenaires nationaux, rappelle le document qui explique qu'en dépit du fait que la règle des 51%-49% fixe l'actionnariat étranger à 49%, «il y a peu de lois contraignant l'investissement étranger» en Algérie. Mais à part les Américains, les investisseurs français et européens en général, ont tout le temps émis des réserves à cette règle. Le président français Emmanuel Macron avait lâché, lors de sa visite en 2017 à Alger «aucun pays n'a assuré son développement économique avec une règle des 51%-49%». De même que l'organisation patronale française (Medef) avait estimé que «le défaut de paiement des entreprises, les licences d'importation, le rapatriement des dividendes et la règle des 51%-49%», sont les freins au développement du partenariat stratégique algéro-français. L'UE avait aussi invité l'Algérie à assouplir cette règle afin de faciliter l'accession de l'Algérie à l'OMC. Il est clair que cette règle fait polémique, mais si elle sert réellement à défendre l'intérêt de l'entreprise algérienne tout en freinant l'investissement étranger, il est indispensable de trouver une solution du juste milieu. Il serait peut-être possible à l'Etat de préserver sa décision souveraine en imposant la règle pour les projets stratégiques et d'énoncer d'autres critères pour les autres projets.