Les chiffres sont effrayants et les causes demeurent, toutefois, mystérieuses alors que les méthodes de suicide s'avèrent multiples. Ces dernières années, et particulièrement durant la décennie en cours, le nombre des personnes qui choisissent de se donner la mort enregistre une augmentation inquiétante dans notre pays. Tizi Ouzou, cette région de Kabylie, n'est pas en reste des autres wilayas d'Algérie. Seulement, la surmédiatisation dont fait l'objet cette contrée fait en sorte que les événements sont plus répercutés par les médias. C'est le cas du suicide dont le taux, à en croire un psychiatre à Tizi Ouzou, n'est aucunement supérieur à celui des autres régions. «Le suicide compte parmi les 5 à 10 premières causes de décès; plus d'un million de personnes en meurent, chaque année dans le monde. Ce choix qui n'a jamais laissé indifférent touche le monde entier. En constante augmentation, le suicide est devenu un grave problème de santé publique. Il représente souvent l'aboutissement d'une lutte interne psychique...», explique Taïb Youcef, dans son livre intitulé Le suicide, ce tragique destin. En outre, selon les statistiques de l'association culturelle Izuran T'murth qui a organisé, samedi dernier, une journée d'information à la Maison de la culture Mouloud-Mammeri, 3709 cas et 1423 tentatives de suicide ont été signalés durant la période allant de 1993 à 2005, en Algérie. Les wilayas les plus touchées sont Tizi Ouzou, Béjaïa, Tiaret et Oran avec respectivement 100, 99, 24 et 21. En outre, en Grande Kabylie, les communes qui occupent la première loge de par le nombre de suicides sont Aïn El Hammam et Tigzirt. D'ailleurs, cette dernière a enregistré, le week-end écoulé, un nouveau suicide. Il s'agit d'un jeune âgé d'à peine 25 ans qui a décidé de mettre fin à ses jours par pendaison dans le village d'Issenadjen. Non loin de là, et quarante-huit heures plus tard seulement, un autre cas a été signalé à Makouda. Un homme de 54 ans s'est donné la mort. Par ailleurs, d'après des statistiques fournies par les services de la Protection civile, les hommes se tuent plus que la gente féminine. L'on relève ainsi 217 hommes, 25 femmes et 6 enfants ayant mis un terme à leur vie de 2001 à 2005. Les agents de la Protection civile ont également effectué, durant la même période, des interventions qui ont permis de sauver 59 personnes ayant tenté de se suicider. D'autre part, selon des spécialistes en la matière, les conduites suicidaires à risque sont caractérisées, entre autres, par la négligence de l'hygiène et des traitements médicaux ainsi que par des maladies psychosomatiques graves. De même, les causes pourraient être liées à des conflits antérieurs et à l'accumulation de problèmes insurmontables. La quasi-totalité des suicidés sont issus généralement des milieux sociaux défavorisés. Une enquête de la gendarmerie montre que 63% des cas enregistrés sont des chômeurs et que la pendaison représente 70% des moyens utilisés. Enfin, pour expliquer le fait que les femmes se suicident moins que les hommes, le Dr Bouzidi, chef du service psychiatrie au CHU Nédir-Mohamed de Tizi Ouzou, dira au cours d'une conférence animée samedi dernier à la Maison de la culture de la capitale du Djurdjura: «Les femmes se suicident moins parce qu'elles travaillent plus que les hommes. Donc, le grand problème c'est le chômage», a-t-il estimé.