Surprenant Kaïs Saïed. Le président tunisien a encore pris de cours tout son monde, et notamment les partis et les parties étrangères qui ont multiplié les accusations et les cris d'alarme sur des mesures censées compromettre le processus démocratique dans le pays. Lundi soir, à la faveur d'un discours télévisé inattendu, le chef de l'Etat a non seulement confirmé qu'il entend rester droit dans ses bottes et accomplir les grandes réformes souhaitées par le peuple tunisien, en général, et la jeunesse, en particulier, mais aussi qu'il maintient en l'état le gel de l'Assemblée des Représentants du Peuple (ARP) jusqu'à la tenue de nouvelles élections législatives, convoquées en décembre 2022, au terme de consultations préalables auxquelles prendra part la population dans son ensemble. Un bel exemple de démocratie participative contre lequel les capitales occidentales ne peuvent décemment se dresser, même si d'aucunes poursuivent leur rengaine sur la nécessité de maintenir «l'expérience de la jeune démocratie tunisienne» sur les rails. Le calendrier énoncé par le président au plan institutionnel et politique va doter la Tunisie d'un nouveau Code électoral, d'une révision de la Constitution de 2014 ainsi que de diverses autres réformes politiques de nature à contrecarrer la corruption et le blocage qui ont prévalu ces dernières années au point de condamner une population entière à une précarité socio-économique grave. Ces mesures étaient très attendues et le président Saïed le savait qui entend avec un tel processus dont le démarrage interviendra dans quinze jours, à peine, marquer le point de non-retour à ce qu'il a qualifié, à plusieurs reprises, de «dérive inacceptable». En janvier, donc, va être engagée une large consultation référendaire sur plate-forme électronique, jusqu'au 20 mars 2022, en vue de doter le pays des textes nécessaires pour la convocation de législatives, fixées au 17 décembre 2022. Les Tunisiennes et les Tunisiens seront ainsi consultés avec un questionnaire simple et clair et ce seront leurs réponses qui détermineront l'orientation générale de la future Constitution et de la loi électorale. Outre la plate-forme électronique, des débats sont également prévus au sein de chaque délégation territoriale ainsi qu'à l'adresse de la communauté tunisienne à l'étranger. Il appartiendra à un comité ad hoc d'élaborer la synthèse de la somme de propositions recueillies au plus tard fin juin 2022. Et c'est le 25 juillet, soit un an jour pour jour après le renvoi du gouvernement Mechichi et le gel du Parlement que le peuple tunisien sera appelé au vote par voie de référendum, ouvrant ainsi le processus à la tenue des élections, sans aucune ingérence. «Je suis déterminé à faire tenir ces échéances, a assuré Kaïs Saïed, afin de restituer le pouvoir au peuple. La voie est parsemée d'embûches, mais nous ferons face à toutes les manoeuvres, et nous y réussirons.» Tellement déterminé, d'ailleurs, qu'il compte promulguer un décret concernant des suites pénales contre tous ceux qui sont compromis dans des affaires préjudiciables à l'Etat et au peuple.