Plus de 110 journalistes et collaborateurs des médias ont été tués l'an dernier dans l'exercice de leur métier. Reporters sans frontières «tire la sonnette d'alarme» dans son rapport annuel 2007, publié le 1er février, et qui dresse un bilan accablant de la situation de la liberté de la presse dans le monde. Il faut remonter à 1994, année du génocide au Rwanda, selon l'organisation, pour trouver une année aussi meurtrière pour la presse que 2006: plus de 110 journalistes et collaborateurs des médias ont été tués l'an dernier dans l'exercice de leur métier. Le rapport de 160 pages dresse le bilan pays par pays de l'état de la liberté d'expression dans le monde au cours de l'année écoulée. Sami al-Hadj, détenu dans la prison américaine de Guantanamo Bay, depuis quatre ans sans qu'aucune accusation ne lui soit signifiée, constitue de son côté un cas type des entorses faites par les meilleures des démocraties occidentales aux principes qu'elles n'arrêtent pas de brandir en référence. Assistant-cameraman de la chaîne qatarie Al Jazeera, il a été arrêté le 15 décembre 2001 en Afghanistan et transféré à la base militaire de Guantanamo le 12 juin 2002. Aucun procès n'a eu lieu depuis lors. Pour RSF qui a longtemps observé un silence très critiqué à propos de Sami al-Hadj, le quiproquo est levé, avec une nouvelle orientation de soutien pour le cameraman. Mais la nouveauté chez RSF, cette fois-ci, c'est son agressivité envers les démocraties occidentales. Dans sa préface, le secrétaire général de RSF, Robert Ménard, affirme que l'année qui vient de s'écouler aura été «marquée par le peu d'ambition, et parfois même le renoncement, des pays démocratiques à défendre partout les valeurs qu'ils sont censés incarner». Reporters sans frontières souligne encore, parmi d'autres «raisons de s'inquiéter et d'être pessimistes», le manque de courage des régimes démocratiques face au président russe, Vladimir Poutine. Au moment de l'assassinat d'Anna Politkovskaïa, écrit Robert Ménard, «le Parlement européen s'est bien gardé de proposer la mise en place d'une commission d'enquête internationale, comme de nombreuses organisations non gouvernementales le réclamaient». De ce fait, l'organisation Reporters sans frontières (RSF) épingle la «lâcheté» et le «renoncement» des pays démocratiques à défendre la liberté de presse en 2006. En 2006, plus de 110 professionnels des médias ont été tués, selon l'organisation. Irak, Mexique, Philippines, Russie, Liban...sont parmi les pays les plus dangereux, selon RSF qui décrit longuement la situation chez les «prédateurs de la liberté de la presse», pointant du doigt notamment la Chine. Mais 2006 a surtout été marquée par «la multiplication des abandons, des lâchetés et des compromis, de la part de ceux dont on est pourtant censés attendre qu'ils défendent avec constance la liberté d'expression», juge-t-elle. L'Union européenne «continue à se taire sur les violations massives des libertés de penser, de dire et d'écrire dans les pays qui bénéficient de ses largesses», dit RSF, qui fustige également les Etats-Unis, «largement déconsidérés» en raison du maintien en détention sans charges d'un journaliste d'Al Jazeera à Guantanamo et des «emprisonnements à répétition» de journalistes américains refusant de dévoiler leurs sources. Dans ce sombre tableau, RSF voit peu de lueurs d'espoir. Elle cite tout de même l'adoption à l'unanimité fin décembre par le Conseil de sécurité de l'ONU, d'une résolution consacrée aux dangers encourus par les journalistes dans les zones de guerre. Ce texte «restera lettre morte s'il n'y a pas de suivi», prévient RSF. Mais «il prouve qu'un Etat ou une institution peut bouger les lignes».