Pas moins de 100 journalistes ont été tués en Irak depuis mars 2003, a annoncé le Comité pour la protection des journalistes (CPJ), basé à New York. L'ONG a publié, hier, à l'occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse, un rapport d'enquête qui porte sur les années 2002-2007 concernant le top 10 marquant le déclin des droits de la presse dans le monde. L'Ethiopie, la Russie, le Pakistan, le Maroc figurent parmi les dix Etats ayant connu la plus grave détérioration des droits de la presse en cinq ans, estime le Comité pour la protection des journalistes (CPJ). Dans ce top 10 figurent des Etats hier assez ouverts mais de plus en plus tournés vers la répression, comme la Thaïlande et le Maroc. D'autres enfreignent les libertés depuis longtemps, mais ont encore accru cette tendance, comme Cuba (détentions, expulsions). L'Ethiopie arrive en tête de « la liste du déshonneur » du CPJ, qui dénonce dans ce pays l'interdiction de journaux (huit sur la seule année 2006) et de sites internet, l'emprisonnement de 18 journalistes et l'exil forcé de dizaines d'autres. Seule une poignée de publications indépendantes continue d'exister, grâce à une intense autocensure, relève l'organisation. La Gambie (11 journalistes emprisonnés en 2006) est 2e de ce top 10, juste devant la Russie. Le CPJ constate que dans la Russie de Vladimir Poutine, les trois chaînes nationales sont désormais sous contrôle et onze journalistes ont été assassinés en cinq ans (et aucun cas n'a été résolu). La République démocratique du Congo, qui arrive en 4e position, a vu deux journalistes assassinés en 2005, l'explosion des procès pour diffamation et l'augmentation du nombre des détentions, ajoute le rapport. Dans le classement, viennent ensuite Cuba, le Pakistan, l'Egypte, l'Azerbaïdjan, le Maroc et la Thaïlande. Le rapport souligne notamment que le Pakistan a vu huit journalistes tués en cinq ans, et au moins quinze enlevés, avec parfois le service de renseignement au cœur des soupçons de kidnapping, selon la même source. Quant au Maroc, il se rapproche désormais de la Tunisie pour le nombre de journalistes condamnés à la prison, relève le CPJ. Les 34 prédateurs de la liberté de la presse Pour sa part, Reporters sans frontières (RSF) basée à Paris, a publié, hier, la liste des 34 « prédateurs de la liberté de la presse », dont la plupart sont des responsables politiques de haut niveau, mais ils peuvent également être des chefs de milices, de groupes armés ou encore des cartels de la drogue. Ainsi, en 2007, le président du Laos, Choummaly Sayasone, et celui de l'Azerbaïdjan, Ilham Aliev, ont fait leur entrée dans la liste des plus grands ennemis de la liberté de la presse, de même que les cartels de la drogue mexicains, responsables de l'assassinat de plusieurs journalistes. Parmi les « prédateurs de la liberté de la presse », figurent notamment les groupes islamistes armés en Afghanistan, au Bangladesh, en Irak, au Pakistan et dans les Territoires palestiniens, le roi d'Arabie Saoudite Abdallah Ibn Al-Saoud, les présidents chinois et russe Hu Jintao et Vladimir Poutine ou encore le guide suprême de la République d'Iran, Ali Khamenei. RSF rappelle que 29 journalistes et collaborateurs des médias ont été tués pour avoir exercé leur métier depuis le début de l'année 2007 et que 129 professionnels des médias sont actuellement emprisonnés (125 journalistes et 4 collaborateurs). Treize journalistes sont actuellement retenus en otages dans le monde. Une autre étude vient d'être publiée par Freedom House, qui se trouve à Washington, qui souligne que la liberté de la presse a connu un net recul en 2006 dans le monde, tendance particulièrement alarmante en Asie, en Amérique latine et en Russie. L'organisation de défense des libertés s'inquiète notamment des restrictions imposées aux sites internet, en Russie par exemple où le gouvernement a accru ses efforts pour « marginaliser plus encore les voix des médias indépendants ». La Chine, le Vietnam, l'Iran aussi continuent d'emprisonner nombre de journalistes et « cyberdissidents », ajoute le bilan 2006. « Les coups portés aux médias sont inévitablement suivis de coups portés aux autres institutions démocratiques », note la directrice de Freedom House, Jennifer Windsor. Le rapport maintient au top cinq des pays « les pires du pire » : la Birmanie, Cuba, la Libye, la Corée du Nord et le Turkménistan. En outre, Presse Emblème Campagne (PEC), organisation de défense des journalistes basée à Genève, tire la sonnette d'alarme sur l'assassinat des journalistes. « Depuis le 1er janvier, au moins 34 journalistes ont été tués dans l'exercice de leur fonction, soit deux par semaine », a précisé le secrétaire général de la PEC, Blaise Lempen. Après l'Irak (17 morts), les pays les plus dangereux pour les journalistes ont été l'Afghanistan, le Mexique, les Philippines et le Sri Lanka (2 tués chacun). Un journaliste a été tué depuis le début de l'année en Erythrée, Turquie, Haïti, Brésil, Ghana, Somalie, Russie, Pérou et Zimbabwe. « L'an dernier avait été l'année la plus sanglante depuis la Seconde guerre mondiale. Au rythme actuel, le nombre de victimes risque encore d'être plus élevé cette année », avertit la PEC. En Algérie, la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'homme (Laddh) rappelle que les médias lourds restent le monopole du pouvoir politique, les journaux télévisés de l'ENTV une propagande quotidienne digne de l'ère du parti unique. La Laddh déplore que les sources d'informations sont verrouillées et l'accès aux sources est contrôlé. Elle considère que la dépénalisation des délits de presse et la levée de l'état d'urgence demeurent des revendications pressantes. La Laddh rappelle les engagements du gouvernement algérien à respecter les conventions et pactes internationaux qu'il a ratifiés en matière de liberté de la presse et d'expression et demande leur traduction effective par les juges dans le droit interne.